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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Hedy Lamarr: From Extase to Wifi (Bombshell: The Hedy Lamarr Story)
USA / 2017
06.06.2018
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HONORED LADY
Peu importe si vous connaissez ou pas Hedy Lamarr. Le documentaire d’Alexandra Dean vous propose un parcours assez exhaustif de son existence mouvementée, de son enfance en Autriche entre les deux guerres à sa fin solitaire en Floride. Paradoxalement, la cinéaste s’intéresse assez peu à sa carrière d’actrice, hormis quelques films symboliques, et à son talent de comédienne.
From Extase to wifi résume en fait très bien le portrait de celle qui incarna Dalila pour le Samson et Dalila de Cecil B. De Mille (en plus de jouer avec Clark Gable, Spencer Tracy, Charles Boyer, James Stewart…). Extase est le film qui l’a révéla (et qui fit scandale à cause d’un montage simulant un orgasme féminin) à l’âge de 19 ans en Autriche. De là, elle deviendra actrice, son métier qui l’a rendit célèbre. Après avoir été Sissi sur les planches pour gommer son image sulfureuse, elle se marie à un industriel proche des Nazis (un premier mariage sur six !). Avant la guerre, la jeune femme migre à Londres où elle signe un contrat avec la MGM. Elle devient une star, faisant fantasmer des millions d’hommes (dont Mel Brooks qui livre ici des témoignages amusants). Elle oublie sa judaïté, Vienne et cherche à devenir une patriote américaine modèle.
Sois belle et tais-toi
Sa beauté fut un atout indéniable. Elle fut aussi son ennemie. C’est là que le documentaire prend tout son intérêt. En s’intéressant davantage à la psychologie de Hedy Lamarr, à ses erreurs comme à ses réussites, on découvre en premier lieu une femme fragile, battante, prête à tout pour garder son statut social, sans qu’on sache vraiment si c’est calculé, piégée par le mirage hollywoodien. Farouchement indépendante, elle fut ainsi l’une des premières productrices du système tout en se rebellant contre son studio. Inconsciemment féministe, elle affichait une liberté sexuelle et assumait l’éducation de ses enfants, même lorsqu’elle n’avait pas d’époux. Avec un humour parfois grinçant et une dérision délicieuse, sa personnalité fournit au film des moments légers, qui contrastent avec le déclin amorcé dès les années 1950, sous dépendance de médicaments la rendant bipolaire. De faits divers en absence de travail, Hedy Lamarr n’intéresse plus que les journaux sensationnalistes.
Mais, si Extase a lancé son nom en haut de l’affiche, ce qu’Alexandra Dean (et sans doute les enfants de la star disparue il y a 18 ans) a voulu dévoiler est une toute autre vérité, forcément ailleurs. Car l’actrice était aussi inventrice. Une grande partie du film est consacrée à ce hobby « savant » qui l’amena à breveter un système de communication par saut de fréquence pendant la seconde guerre mondiale, brevet utilisé plus tard par l’armée américaine (jusque dans sa dissuasion nucléaire) et qui sert de « base » au wifi et au gps aujourd’hui.
La femme savante
Tout le poids didactique du docu se situe là : réhabiliter la belle Hedy (dont le nez servit de modèle à des générations d’actrices), femme cobaye de la chirurgie esthétique lorsqu’elle a pris de l’âge, en scientifique reconnue sur le tard (son manque de rigueur et ses humeurs lui ont coûté finalement une fortune).
Ce Dr Hedy et Miss Lamarr passionne même si sur la forme le documentaire s’avère classique avec ses archives, incluant plusieurs inédites, ses témoignages, y compris de stars comme Diane Kruger, et ses extraits de films (trop rares).
Ce que l’on retient n’est d’ailleurs pas tant l’ascension vers la gloire et le crépuscule presque misérable d’une femme qui a traversé le siècle, sur pellicule et en gros titres de journaux, mais bien la complexité d’une icône qui inspire encore les féministes, les geeks et les cinéphiles.
vincy
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