Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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A Star is Born


USA / 2018

03.10.2018
 



BORN AGAIN





C'était l'affiche la plus glamour du Festival de Venise cette année et c'est aussi la plus chic de la rentrée : le duo Bradley Cooper, aka the sexiest Man alive, et Lady Gaga, dans A star is born (en lettres dorées). Ils n'avaient à priori rien en commun, sauf peut-être leur exigence de 'performer' devant la caméra pour lui et sur scène pour elle. Et pourtant leur rencontre à l'écran fait des étincelles. C'est le premier grand rôle au cinéma de la chanteuse, et c'est la première fois que l'acteur Bradley Cooper passe derrière la caméra. Ce A star is born, nouvelle version, ressemble à la fois à une comédie romantique, à une sorte de film biographique et à un film musical. Trois promesses pour un mélo dont on connaît l’histoire par cœur. Les fans de Bradley et les 'little monsters' de Gaga seront aux anges. La surprise est double: Cooper est un chanteur très convaincant et Gaga se révèle être une bonne actrice.

Ce nouveau A Star is born garde la même structure que les trois précédentes versions de cette « love story » avec un pygmalion et sa muse, l’élève qui dépasse le maître, l’autodestruction et la renaissance. Un chanteur célèbre usé et une chanteuse amateur qui rêve de ce métier : solitaires au début, fusionnels ensuite, avant que l’individualisme et la gloire ne fassent le reste. Un destin très américain : on ne s’en sort que par soi-même, la réussite n’est qu’un mélange de chance et de travail qui nécessite des sacrifices.

Les toutes premières minutes du film nous présentent d'ailleurs les personnages avec simplicité : Bradley Cooper enchaîne les concerts et les bouteilles d'alcool dans un bar, et Lady Gaga qui vivote d'un job dans un restau se prépare pour chanter une chanson dans ce même bar. Il est attiré par son interprétation en français de 'La vie en rose' de Piaf (c’est d’ailleurs quand elle a chanté cette chanson à un concert que Cooper a eu le déclic pour Gaga), elle le reconnaît et elle est séduite. Premières confidences sur un parking de supérette pour se découvrir, et il lui propose de se revoir...

Pretty Woman à La La Land

Toute la première partie de A Star is born est sur les rails classiques de la comédie romantique avec la rencontre entre une jeune femme modeste et un homme riche et célèbre, façon Pretty Woman ou 50 nuances de Grey (pour le rejoindre à un nouveau rendez-vous, il a prévu voiture avec chauffeur et avion). Le sourire de Bradley est irrésistible et les grands yeux de Lady Gaga sont troublants. Il redécouvre une attirance authentique et elle s'émancipe en osant chanter ses textes. Leur séduction en plusieurs étapes charme le spectateur sans réserve. Ensuite leur histoire arrive à une charnière où elle a l'opportunité de faire décoller sa carrière sans lui... Dès lors le personnage de Lady Gaga pend de plus en plus d'importance puisque c'est elle qui devient une star, façon "American Dream" moderne : des milliers de vues sur YouTube puis un contrat pour enregistrer un disque puis un passage à la télévision au Saturday Night Live...

A Star is born montre de manière étonnante que pour devenir une star, il faut perdre beaucoup de son identité, ce qui était déjà le sujet de La La Land. Durant toute la première partie du film on découvre Lady Gaga comme on ne l'a jamais presque jamais vue : au naturel sans lourd maquillage ni coiffures démentes, se moquant de son nez pas beau, appréciant le même genre de musique american-country que joue Bradley Cooper, à des miles de sa pop sophistiquée.
A partir du moment où justement elle peut devenir une star du disque, elle doit suivre les instructions de son manager : une autre couleur de cheveux, des vêtements plus courts et plus sexy, apprendre une chorégraphie avec des danseurs, chanter sur de la musique calibrée commerciale (cette transformation de country authentique vers popstar auto-tunée est d'ailleurs le vrai parcours de Taylor Swift).
Elle devient en quelque sorte une autre (un reflet de la vraie Lady Gaga blonde platine) qu'on a du mal à reconnaître et à continuer d'aimer. Il y a plusieurs séquences musicales où la Gaga est particulièrement mise en valeur. Dorénavant il faut aussi la voir comme une belle actrice, bien plus convaincante que Whitney Houston ou Mariah Carey. Peu importe ses excentricités, on se rend compte que le talent de Lady Gaga provient autant de sa voix que de la flamboyance de son interprétation.

4e version de l'histoire depuis 1937

Dans ce mélodrame romantique, on évite l’égocentrisme de l’industrie de l’entertainment. S’il n’y a rien de neuf sous les spotlights, Bradley Cooper étonne en réalisant un premier film efficace, parfois sirupeux, et qui rempli son contrat. L’esprit de conquête de son personnage féminin (et que l’actrice-chanteuse a réellement connu) pourrait être une métaphore de cette envie de convaincre l’industrie du cinéma.

Le film était dans les tuyaux depuis plus de 5 ans. Clint Eastwood devait filmer DiCaprio puis Cooper aux côtés de Beyoncé pour une nouvelle version. Il s'agit d'un remake moderne de Une étoile est née de William A. Wellman (1937), avec Fredric March et Janet Gaynor : un acteur célèbre sur le déclin rencontre une apprentie actrice qui rêve de devenir une star... L'histoire se répète en 1954 avec George Cukor derrière la caméra et James Mason et Judy Garland dans le rôle des deux artistes, puis, transposé dans le domaine de la musique en 1976 par Frank Pierson, avec Barbra Streisand et Kris Kristofferson. En plus d'avoir été l'une des influences pour le scénario de The Artist de Michel Hazanavicius, avec Jean Dujardin et Bérénice Béjo.

Mais ici, A Star is Born a deux atouts non négligeables. Son charme indéniable et le charisme des deux comédiens. Et si on retient la prestation de Lady Gaga, c’est bien parce que Cooper a compris une chose dans cette histoire, avec un certain flair. Contrairement aux versions avec Garland et Streisand, la Gaga, parfaite dans la métamorphose, aussi célèbre pour ses looks que pour ses tubes, est une novice au cinéma. Aussi le film suit autant son personnage en train de décoller vers les étoiles que l’artiste qui cherche à briller partout, y compris sur grand écran, dans un étrange itinéraire parallèle.
 
Kristofy

 
 
 
 

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