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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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My Beautiful Boy (Beautiful Boy)
USA / 2018
06.02.2019
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REQUIEM FOR AN OSCAR
- Je t’aime plus que tout.
- Plus que tout ?
- Plus que tout !
Deux ans après Belgica, le réalisateur belge Felix Van Greningen est de retour en salle avec My Beautiful Boy, drame très attendu dans la course aux Oscars 2019.
Drame familial
Pour David Sheff, la vie de son fils Nicolas était déjà toute tracée : jeune homme brillant, sportif et cultivé, Nic était promis à une grande carrière universitaire. Mais le monde de David s’effondre lorsqu’il réalise que Nic a commencé à toucher à la drogue en secret dès ses 12 ans. De consommateur occasionnel, Nic est devenu accro à la métamphétamine. David décide alors tout faire pour le sauver.
Basé sur les mémoires de David Sheff (Beautiful Boy: A Father’s Journey Through His Son’s Addiction) et Nic Sheff (Tweak: Growing Up on Metamphetamines), My Beautiful Boy aurait pu être un énième film sur un père dépassé. Mais la force de ces mémoires et du film de Felix Van Groeningen réside dans le lien unique que partage David (Steve Carell) et Nic (Timothée Chalamet). Très proche de son père depuis le divorce de ses parents, Nic partage ses passions avec l’homme qui l’a élevé. Musique, sport, fumette, ils font tout ensemble et se disent beaucoup de choses. Mais comme c’est souvent le cas à l’adolescence, Nic ne dit pas tout à son père. Ce dernier, à’instar du spectateur, se retrouve alors accablé pas les mauvaises surprises, les appels nocturnes, les rechutes et les révélations.
Pendant plus de deux heures, c’est donc à la descente aux enfers de David que My Beautiful Boy tente de s’intéresser. Partagé entre son désir de sauver son premier enfant et celui de protéger sa famille (son ex-femme Vicki, sa femme Karen et leurs deux enfants Jasper et Daisy), David se retrouve sans cesse dans des situations qui lui semblent folles et anormales. Entre ses recherches sur les effets de la drogue sur les neurones et ses recherches incessantes en ville pour retrouver Nic, David n’en mène pas large.
Narration saccadée
D’abord attendu pour le Festival de Cannes 2018, My Beautiful Boy a finalement été projeté en avant-première mondiale lors du Toronto International Film Festival. Une décision logique tant My Beautiful Boy a de quoi agacer. Car si le sujet touche (tout le monde peut s’identifier au combat de cette famille), la structure même du film le dessert. Bien qu’utile, le mélange des mémoires de David et Nic Sheff donne l’impression d’être inabouti. Le scénario de Felix Van Groeningen et Luke Davies (Lion) est dense et loin d’être avare en scènes fortes mais les incessants assauts dans le temps frustrent le spectateur.
Incapable d’admettre que le rythme est long, celui-ci achève My Beautiful Boyy avec l’horrible impression qu’un film avec une narration classique aurait eu plus d’impact. Plus encore, à force de tenter de remettre dans l’ordre (chronologique) les séquences, le spectateur se perd, usé par les différentes temporalités. David et Nic sont tour à tour proches ou distants, réconciliés ou en conflit. Par chance, certaines idées de mises en scène (les montages parallèles) raviront les plus cinéphiles.
Grands acteurs pour petit film ?
Pour porter sur grand écran son cinquième long métrage, Felix Van Groeningen s’est entouré des meilleurs. Dans le rôle du père aimant mais impuissant, Steve Carell impressionne. Trop souvent associé à ses rôles comiques, l’acteur vu dans Foxatcher, The Big Short ou encore Battle of the Sexes prouve une fois de plus qu’il mérite une pluie de récompenses. Car c’est bien lui qui guide le spectateur à travers le dédale qu’est l’addiction de son fils. Et c’est bien de lui dont on finir par davantage se soucier.
Le fils, Nic, est campé par le désormais incontournable Timothée Chalamet. Après les succès de Call Me By Your Name et Lady Bird, le franco-américain de 22 ans s’offre une transformation digne de Christian Bale pour ce rôle complexe. Son jeu d’acteur est prodigieux tant le surjeu est absent. Et cela, même lorsqu’il faut prétendre être high durant une conversation ou un rapport sexuel.
Duo absolument impeccable, Steve Carell et Timothée Chalamet font ici taire ceux qui doutaient de leur capacité à jouer un père et son fils. A l’écran comme en interview, le duo fonctionne à merveille et l’on finit rapidement par regretter que le sujet soit si grave. A leurs côtés, Maura Tierney s’en sort haut la main en belle-mère accablée.
Sans aller jusqu’à dire que la course aux Oscars sera compliquée, force est de reconnaître que le récit discontinu a de quoi rebuter. Cela étant dit, My Beautiful Boy est largement sauvé par le talent indéniable de ses interprètes principaux, une photographie solaire est une bande son qui marque. Enfin, pour montrer « le trou noir » que Nic tente si bien que mal de combler avec la drogue, Felix Van Groeningen a choisi d’utiliser des ralentis et des gros plans. Un choix judicieux.
Sans être le grand testament anti-drogues attendu et comme peuvent l’être Requiem for a Dream et Climax, My Beautiful Boy s’en sort avec les honneurs. L’omission de certains détails par Felix Van Groeningen permet à celui-ci de signer un film nécessaire, audacieux mais non moins répétitif.
wyzman
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