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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Spider-Man: New Generation (Spider-Man: Into the Spider-Verse)
USA / 2018
12.12.2018
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MILES DEVIE
« On apprend toujours mieux quand on court un danger mortel ».
Spider-Man : New Generation est un spin-off animé à l’univers Spider-Man qui a déjà eu le droit à une trilogie, un reboot en deux volets et un autre reboot rajeuni. Autant dire que l’Homme-araignée n’a plus beaucoup de secrets à nous révéler.
C’est là que ce nouvel opus bouscule nos certitudes. Peter Parker n’est ici qu’un second-rôle. Le film est centré sur un ado métis (afro-américain et latino), artiste de street art à ses heures. On est donc mis sur une voie parallèle, entre Brooklyn « tendance » et un collège/lycée élitiste. Mais l’intrigue va se complexifier et nous envoyer dans un autre « univers », où se croiseront un Peter Parker divorcé, un peu vieilli et bedonnant, un Spider-Gwen, un Spider-Black et un Spider-Pig très cartoon. Bref le scénario, pluridimensionnel, délire assez vite vers une sorte de construction surréaliste et même absurde où le super-héros a différentes facettes, pour ne pas dire « look ». Un Miles Morales aka le nouveau Spider-Man qui n’hésite pas à lire les aventures de Peter « Spider-Man » Parker pour savoir comment tisser sa toile …
« Les ados, y a pas pire »
De surprises en surprises, le script pratique aussi bien l’autodérision que les variations de styles, jouant sur un gag de répétition ou des références souvent drôles (on ne peut pas s’empêcher de penser à Deadpool en voyant le 2e Peter Parker) et parfois touchantes (ce Stan Lee en gérant de magasins de produits dérivés). Ce « roman » d’apprentissage, loin de l’Amérique Wasp, donne lieu à un récit barré, avec des personnages attachants, sans oublier une psychologie assez fine dans ce micmac métaphysique et quantique délirant. Le plus étonnant est finalement d’y croire et de trouver cet enjeu tarabiscoté intéressant.
« - Combien y a de Spider-héros ? – Demande au Comic-con ! »
De ce « multivers » (l’opposé de l’uni-vers), on ressort évidemment les mêmes ressorts dramatiques : un Oncle Scar, une tragédie familiale, un trauma mal soigné, etc… Tout ça n’est qu’histoire de réconciliation et de transmission.
Les séquences d’action et celles plus posées s’alternent harmonieusement, au point, finalement, d’en faire le meilleur blockbuster de l’année, et peut-être l’un des meilleurs Marvel.
Et pas seulement grâce à cette histoire à côté de laquelle Interstellar est une leçon de sciences physiques pour collégien. Spider-Man : New Generation est avant tout brillant par son esthétique, à la beauté incontestable.
« Tu le fais sur commande ?»
L’originalité de son graphisme, entre univers urbain et jeu vidéo, ancré dans une Amérique moins Wasp et un dessin moins lisse, est en fait très fidèle aux bandes dessinées d’origine. C’est même un festival d’hommages au comics, avec des bulles, des onomatopées et des digressions visuelles (qui là encore fait penser à l’humour de Deadpool). En maniant ainsi le second-degré par le visuel davantage que par les mots, le film provoque une rupture par rapport aux productions animées habituelles des studios, collant à son propos plutôt que de vouloir diluer sa singularité. Il y a une mise en abime des albums en les montrant à l’écran et en réutilisant leur « style ». Mais loin d’être un pastiche, le film décolle vers une grande fresque animée où coexistent un personnage de cartoon, un autre sans couleurs, une héroïne de manga et des mélanges stylisés inattendus (comme ce final psychédélique abstrait).
On se laisse ainsi emmener dans le parcours du jeune Miles Morales qui découvre qu’il y a un héros qui sommeille en lui. C’est d’ailleurs quand il s’apprête à faire son grand saut dans le vide (et se balancer ensuite de « toile en toile » à travers les rues de New York (sur fond de hip hop tripant) qu’on constate la fluidité de la mise en scène, la beauté de son image et la rigueur de l’écriture (la séquence est entrecoupée avec une autre sans que cela ne fasse factice ou pesant).
Cela contribue à en faire le meilleur film d’animation américain de ces dernières années, ciblant enfants, ados et adulescents sans jouer les opportunistes. Un vrai plaisir naît de ce divertissement qui ne réinvente rien, certes, mais digère toutes ses influences pour en faire une œuvre dingue tout en étant parfaitement formatée. Un peu comme le rubik’s cube qu’emporte l’un des personnages dans sa dimension. Un truc « qu’on ne comprend pas » mais qui nous rend accro.
« - That’s all Folks !
- Il peut dire ça ? Il n’y a pas de droits d’auteur ? »
vincy
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