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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Undercover - une histoire vraie (White Boy Rick)
USA / 2018
02.01.2019
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UNE AFFAIRE DE FAMILLE(S)
«- Les gens sont des agneaux. Pas nous. On est des putains de lions.»
Quatre ans après la sensation ’71, film de guerre « civile » immersif en Irlande du nord, Yann Demange, un temps pressenti pour réaliser un James Bond, revient avec une histoire vraie, assez saisissante, qui plonge, une fois de plus dans le passé. Ici, on passe dans les années 80 et plutôt qu’un Belfast sous tension, il plonge dans un Detroit en perdition, entre précarité, trafic de flingues et dealers.
Undercover a un autre lien avec ’71 : l’innocence de la jeunesse foudroyée par la réalité d’un monde violent, composé de traîtres (y compris du côté des garants de la Loi), où l’espoir d’une vie meilleure se fracasse à la domination des pourris.
Yann Demange confirme qu’il a du style, même si, cette fois-ci, sa mise en scène n’amène rien de nouveau à l’Ouest. Il reste dans les schémas des films américains qui lui servent de référence, entre Scorsese et Lumet. Le réalisateur conforte aussi sa stature de bon directeur d’acteurs. Si le talent de Matthew McConaughey n’est plus à démontrer, y compris dans ce rôle de bon père loser qui ne perd la foi dans le libéralisme qui pourtant le laisse à terre, les performances de Richie Merritt en « p’tit blanc » au milieu des gangs afro-américains ou de Bel Powley en sœur défoncée impressionnent.
« Soit on t'achète, soit on te jette. »
Dans cette épopée anti-drogue, le « héros » est un pion qui se prend pour un roi. Il est manipulé par le FBI et risque gros avec ceux qui l’ont accepté. C’est une histoire de famille : la police lui demande de trahir celle qui rend concret certains de ses rêves au profit de celle qu’il traine comme un boulet.
Il y a de nombreux films sur les infiltrés. Celui-ci n’a finalement de singulier que son final, bien réel : le petit Rick a écopé de la plus longue peine de prison du Michigan, bien plus longue que les dealers qu’il a aidé à coffrer.
Une fois de plus, comme dans ’71, le protagoniste est lâché par sa « hiérarchie », abandonné par l’Etat soi-disant protecteur. Il n’y a finalement ni morale ni happy end. Juste une société qui broie ses intermédiaires. Au passage, Demange filme les profondes inégalités d’une Amérique en déclin et sans pitié.
Pas étonnant que l’Américain bedonnant, incarnée par le père, se retrouve en colère. Il a une certaine rigueur morale, transmise à son fils. C’est sans doute là que résident les plus belles scènes du film : les liens trans-générationnels.
Dommage malgré tout que le réalisateur ne trouve ni le tempo ni les ressorts nécessaires pour que son film ne s’enlise pas dans un drame trop grisâtre, et même assez prévisible. Ce qui aurait dû nous révolter dans l’ensemble de la dernière partie fait à peine l’effet d’une contrariété.
Les perdants et les rêveurs ne font alors plus qu’un. Une sad sad story convenue, qui aurait mérité une approche cinématographique moins déjà vue.
vincy
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