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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Nicki Larson et le parfum de Cupidon
France / 2018
06.02.2019
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SEX AND THE CITY HUNTER
« - Si ça marche, je change de sexe.
- Pour un plus grand ? »
Adapté du Shônen manga City Hunter destiné aux adolescents et pré-adolescents, Nicki Larson (Ryo Saeba en version originale) a fait l’objet à la fin des années 80 d’une adaptation sous forme de série animée qui fut diffusée en France dans une version très édulcorée. La forte connotation sexuelle a notamment été gommée pour ne laisser place qu’à un humour gentillet et des scènes d’action elles-aussi débarrassées de toute scorie trop violente.
L’idée d’une nouvelle adaptation, en prise de vues réelles, et par l’acteur-réalisateur Philippe Lacheau connu pour ses comédies comme Babysitting ou Alibi.com, a d’abord laissé perplexe, d’autant qu’une version animée japonaise est également attendue dans le courant de l’année. Pourtant, force est de reconnaître que le mélange des genres entre l’humour franchouillard de Lacheau et la franchise originelle ne fonctionne pas si mal.
Le personnage de Nicki Larson a retrouvé ses vieilles tendances à la misogyne, c’est toujours un obsédé sexuel complètement premier degré, et en même temps un enquêteur hors pair qui maîtrise parfaitement l’art du combat. Bien sûr, l’intrigue n’est que timidement graveleuse et les scènes d’action d’une violence tout à fait relative. On n’est pas ici dans une version radicale et sans concession du manga qui mériterait une interdiction aux moins de 16 ans, et réveillerait un peu le cinéma français grand public.
Malgré tout, le ton ultra parodique du récit et les tonnes d’auto-dérision que Philippe Lacheau met dans son personnage produisent quelques excellents gags et pas mal de scènes d’action tellement folles qu’elles en sont hilarantes. On pense forcément à OSS 117, avec lequel la parenté est évidente. Cela permet notamment d’évacuer les pires travers du personnage, et de s’en moquer : il est prétentieux, misogyne et un poil mal à l’aise avec l’idée de sa propre homosexualité, sans que le film reprenne à son compte ses opinions. Au contraire, puisqu’on assiste à un dynamitage en règle des personnages (tous ouvertement niais, voire totalement crétins), des situations (la course poursuite finale, avec un protagoniste attaché sur un lit, ou les combats en vue objective) et même des enjeux de l’intrigue (qui se résument globalement à savoir si Nicki Larson, grand coureur de jupons devant l’éternel, va définitivement rester amoureux de son client incarné par Didier Bourdon…. sans parler de cette histoire de « parfum de Cupidon » qui est ouvertement une blague), destinés plutôt à provoquer une complicité avec le spectateur à grand renfort de surenchères qu’à véhiculer la moindre opinion sociétale.
Évidemment, de nombreux gags sont franchement en dessous de la ceinture : le bon goût n’a jamais réellement fait partie du concept de départ. Encore nous a-t-on épargné les érections fréquentes qui émaillent le manga original. Reste la question épineuse du traitement de l’homosexualité, franchement désolante dans l’épilogue du film, et assez ambivalente le reste du temps. On comprend que l’idée de rendre Nicki Larson follement amoureux d’un homme puisse paraître savoureuse, vu le passif du personnage. Tout dépend ensuite comment on l’analyse : s’il s’agit juste de prendre le contre-pied absolu de qui est Nicki Larson, évidemment c’est réussi, mais s’il faut y voir une forme de « punition », c’est idiot, et insultant.
Dans tous les cas, on avait bien compris que l’on n’avait pas affaire au film le plus subtil de la semaine, et de ce côté-là on n’est pas déçu. Les spectateurs les plus hostiles à ce type d’humour, ou réfractaires à toute parodie en roue libre, passeront leur chemin. Les autres iront juger sur pièce, et il n’est pas exclu qu’ils y prennent un certain plaisir coupable. MpM
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