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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Stan et Ollie (Stan & Ollie)
Royaume-Uni / 2018
06.03.2019
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VOYAGE À DEUX
«- Charlie, Buster et Harold gagnent dix fois plus que nous !
- C’est parce qu’ils produisent leurs films. »
On craint toujours un peu les films biographiques. Stan & Ollie, peut-être plus que d’autres, touche à un mythe – le duo burlesque Laurel et Hardy – dont on ne veut pas forcément tout savoir. Pourtant, s’il ne révolutionne rien dans le genre, le film s’avère plaisant et intéressant.
Le fait d’avoir concentrer le récit sur la dernière tournée (britannique) de ce duo culte, cette dernière virée à deux, donne un aspect crépusculaire à l’ensemble. Populaire mais vraiment pas prospère, pas encore retraités, ils ont vieilli, ils sont un peu usés, ils sont même assez fatigués, malgré l’envie de continuer. Les déboires de ces stars, loin de leur grande période de gloire, sont touchants et attachants. Hôtels miteux, théâtres un peu vides, ménages publicitaires, santé fragile, égos blessés : tout est assez cruel derrière le vernis du celluloïd et le piquant de leurs liaison amour-haine.
Si le scénario de Jeff Pope (Philomena) fait quelques raccourcis, accentuant leur passage à vide entre 1937 et 1953 et donc dramatisant leurs bisbilles, il sonne assez juste sur leur déclin tout comme il rend hommage à leur créativité et leur complémentarité.
La complicité de Laurel et Hardy est d’ailleurs perceptible grâce aux deux interprètes, Steve Coogan et John C. Reilly, qui allient parfaitement respect et humanité aux icônes du passé. Le réalisateur Jon S. Baird n’a pas beaucoup d’efforts à faire pour laisser libre cours à leur talent. On comprend rapidement leurs forces et faiblesses. On est davantage séduit par la mise en scène de gags vus dans les films des deux vedettes dans les années 1925-1945 et transposés dans leur quotidien imaginé par le scénariste. De même, l’explication de leurs difficultés à restés au sommet est un joli portrait de la politique des studios de l’époque.
Si ses allers et retours dans le temps, rares heureusement, spolient un peu son récit principal, le film est finalement une belle histoire sur des saltimbanques incapables de raccrocher. Comme un couple qui ne parvient pas à se divorcer, rendant presque jalouses leurs épouses actuelles (formidables Shirley Henderson et Nina Arianda), dont il ne faut pas sous-estimer l’écriture de leurs personnages et l’importance de leurs rôles.
Mais ce qui est le plus passionnant est certainement de voir ces légendes du 7e art en hommes de spectacle, en comiques de la scène. Loin d’Hollywood. Ce duo fusionnel à l’écran comme sur les planches – qui prouve que la comédie est avant tout affaire d’alchimie – nous pousse même à vouloir revoir les films de Stan et Oliver, donnant tout à leur métier, cette déclaration d’amour (à leur art comme à l’amitié) n’est pas seulement une ode à deux grands artistes. Il s’agit ici de passion pour le métier et de ses sacrifices, d’un amour platonique et de ses complications. Mourir sur scène à deux plutôt que de vivre avec ses souvenirs en solitaire.
Stan et Ollie est traversé par une mélancolie et une chaleur bienvenues. S’il ne s’agit pas de rire et s’il s’agit de fidélité, au final, l’histoire nous amène à comprendre la force du comique sur nos vies, grâce à des forçats de l’inventivité et de la blague de situation, prêts à tout pour un public infidèle.
vincy
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