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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Exfiltrés
France / 2019
06.03.2019
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HAUTE TENSION
« On l’a localisée. C’est Rakka. »
Exfiltrés se dote de tous les moyens pour être un thriller dans l’air du temps. En surface, d’ailleurs, ça fonctionne bien. C’est rythmé, tendu, ça se veut immersif comme un documentaire « embedded » et réaliste.
Le problème du film est sans doute de flirter avec ce qu’on voit déjà sur des écrans plus petits, les séries d’espionnages, récits paranoïaques et autres jeux de guerre, qui font florès un peu partout en ces temps complotistes où l’on nous cacherait tout. C’est d’ailleurs assez frappant de voir que le film est découpé en chapitres qui auraient pu faire un épisode d’une série éventuelle, où l’on connaît le feuilletonnage tout en souhaitant fuir l’enfer promis.
Inspiré d’une histoire vraie, Exfiltrés peut compter sur un bon scénario. Le réalisateur Emmanuel Hamon, qui vient du documentaire – ceci explique cela – ne réinvente pas le genre, mais sait happer le spectateur et tirer profit de ce récit à la finalité incertaine.
C’est ce qui le rend passionnant et captivant. Le cinéma français s’attaque trop rarement à ces sujets, d’autant plus quand ils sont dans l’actualité. Les comédiens jouent très justement leur partition. Et on sent l’arrière-plan très documenté, même si les enjeux macro-politiques sont gommés par l’intrigue plus personnelle.
La vraie réussite est d’avoir donner vie à ces personnages balancés dans un chaos effroyable. Dans ce décor où tout semble vrai, on croit réellement à chacun d’entre eux, leurs motivations comme leurs décisions, même quand elles sont elliptiques. La force est sans doute d’avoir su tirer une fiction solide à partir du récit d’une femme (Jisca Kalvanda, toujours divine) qui part faire de djihad avec son petit garçon, laissant son mari désemparé (Swann Arlaud, décidément grandiose).
Emmanuel Hamon tisse ainsi sa toile, avec des personnages qui n’auraient jamais du se croiser, pour progressivement construire un film d’évasion classique. Il reste, malgré les défauts, une vision humaniste dans ce monde plongé dans les ténèbres. En privilégiant la fiction, le réalisateur a sans doute voulu raconter ce qui le hante en apportant un peu de lumière, ce que le documentaire n’aurait sans doute pas pu faire.
vincy
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