Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Coming Out


France / 2018

01.05.2019
 



STRAIGHT TO THE POINT

Le livre Bye Bye Bahia



« Je suis si contente que tu me le dises. »

Denis Parrot propose avec Coming Out un documentaire dont la force réside autant dans le témoignage de chacun que dans le montage de l’ensemble. Cet assemblage de vidéos diffusées sur Internet entre 2012 et 2018 couvre un large spectre de jeunes gens LGBT+ dévoilant et expliquant leur sexualité à leurs parents et proches. Avec une webcam ou un smartphone, de l’Australie aux Etats-Unis en passant par l’Afrique du sud, l’Europe et le Japon, ces séquences plus ou moins courtes traduisent une souffrance réelle et les conséquences incertaines de leur révélation.

L’objet est au final passionnant, autant qu’il peut devenir un sujet socio-anthropologique. Car Denis Parrot, s’il ouvre son film avec un coming out idéal, démontre à quel point l’homosexualité reste incomprise, honteuse, porteuse de haine. Des parents rejettent leur progéniture. Invoquent Dieu. Se lamentent du désastre à venir. Des adolescents évoquent leurs tentatives de suicide. Le sentiment d’être anormal ou la déchirure affective que leurs désirs peuvent causer sont ainsi confrontés à des réactions parfois irrationnelles, dictées par des croyances ou des préjugés, capables de produire le pire.

« Quand avez-vous choisi d’être hétéro ? »

Si bien que ces témoignages réels, sans fioritures, bruts, touchent le spectateur, parfois violemment, parfois joyeusement, parfois drôlement. L’épreuve, la prise de risque, la peur du rejet, l’envie d’acceptation, l’explication pédagogique sont autant de variations pour assumer ce qui devrait être naturel, mais semble ne toujours pas l’être.

D’ailleurs, le plus étrange, encore aujourd’hui, est qu’il faille « avouer » son homosexualité, affirmer sa différence par rapport à la majorité. L’hétérosexuel n’a pas besoin de cette catharsis. L’égalité commanderait que personne n’ait besoin de dire quelle est sa ou ses préférence(s) sexuelle(s). Mais Coming Out prouve, hélas, qu’un(e) jeune « non hétérosexuel(le) » ne semble pas bien dans sa peau en cachant sa nature. Sans doute parce qu’il y a encore un gros travail d’assimilation et d’éducation. C’est d’autant plus paradoxal dans des sociétés de plus en plus conformistes, pour ne pas dire conservatrices, d’avoir à parler de sexe (qu’on ne saurait voir). C’est tout aussi paradoxal d’avoir à assumer publiquement une différence à une époque soi-disant progressiste censée valoriser les minorités.

« Les gens sont obsédés par le fait d’être normal. Si tu n’es pas normal, tu es exclu. »

Le stress, la fierté et le besoin de ne plus mentir des uns face à la compassion, l’inquiétude ou la stupéfaction des autres, sont autant d’éléments dramaturgiques pour cette expérimentation cinématographique. Coming Out est bien plus qu’un film sur l’identité. Il s’agit d’un documentaire traitant des contradictions de l’humain. Les confidences comme les réactions à celles-ci peuvent être effrayantes. Entre chemin de croix et calvaire, le destin de certains est surtout un parcours d’obstacles. Mais le prix à payer – dépression, séparations familiales, solitude, exil – peut valoir le coup. Tous sont persuadés qu’en se rendant visibles, ils permettent à d’autres de ne pas se croire « une erreur » de la nature, un partisan du Diable. Ils veulent servir de modèles pour que leurs détresse ne se reproduise plus.

Cette intensité est évidemment liée à la parole libérée, aussi bien à des garçons qu’à des filles, comme à des personnes voulant changer de sexe, à des mères qui « savaient » ou d’autres dans le « déni ». Histoire universelle, le film se termine avec deux coming out spéciaux : le seul où un père écoute son fils, après tous ces coming out aux mères, et celui d’une femme à sa grand-mère, en chanson, bouclant ainsi de manière légère cette série de confessions intimes heureuses ou dévastatrices. Nous ne sommes pas des voyeurs, mais plutôt des écouteurs. Le monteur expert Denis Parrot enchaîne habilement cette sélection, dans un ordre donné, passant par des épisodes variés, sans oublier la musique, la mise en situation, et finalement la mise en scène, qui surgit parfois avec un intermède (toujours lié au corps et à l’art). On sort en se disant que cela aurait pu durer encore une heure. Mais aussi que toute cette peur d’être soi face à ses proches ne devrait plus exister du tout.
 
vincy

 
 
 
 

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