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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Vita & Virginia
Royaume-Uni / 2018
10.07.2019
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PRUDES ET PREJUDICES
Adaptation à la fois des correspondances de Virginia Woolf, écrivaine tourmentée et dorénavant culte, et de Vita Sackville-West, aristo pas très conformiste, et de la pièce de théâtre créée par Eileen Atkins il y a 27 ans, Vita & Virginia pouvait avoir l’allure que d’un biopic sur une liaison peu conventionnelle et, pour l’époque, sulfureuse. La réalisatrice Chanya Button a sans doute eu trop d’ambitions autour de ce récit. Jamais facile d’écrire un film avec deux points de vue, qui, en parallèle, donne naissance à un chef d’œuvre de la littérature, Orlando.
On ne retrouve pas grand-chose d’Orlando, hélas, biographie imaginaire dont le héros traverse le temps et change de sexe. Pourtant Vita & Virginia est une étude appliquée sur le genre et les conventions, sur la transgression et ses incidences. Le film est porté par une belle sensualité, un regard aussi précieux que subtil, et deux actrices dont l’alchimie est assez évidente.
Flirtant avec le surjeu, Gemma Arterton se glisse très facilement dans son personnage de mondaine séduisante. Le pari était plus risqué pour Elizabeth Debicki, qui doit lutter contre la comparaison avec Nicole Kidman dans The Hours. Mais le duo parvient à insuffler ce qu’il faut de finesse à la complexité de leur relation, à la fois amoureuse, artistique et intellectuelle. Une fascination mutuelle qui est palpable et qui explique très bien l’intensité de cette liaison hors-normes.
Cependant la réalisatrice dilue la subversion attendue par une mise en scène relativement classique, ponctués par de multiples gros plans sur les visages (dont on cherche la signification ou l’émotion) et des lectures un peu plombantes.
Il a manqué à Chanya Button, paradoxe suprême, l’audace dont faisait preuve les deux femmes, et même les zones d’ombres autour du tumulte de leur passion. En frôlant seulement son objet – la naissance de leur « enfant », Orlando – et en caressant pudiquement ses deux sujets, le film ne parvient pas à satisfaire nos attentes.
Il y a bien quelques séquences captivantes, notamment avec Isabella Rossellini, qui reconstituent l’époque et sa rigidité, et quelques idées inspirées, notamment l’usage de la musique. Mais en voulant une égalité entre les deux rôles, la cinéaste empêche de dramatiser son film. Cette indécision à ne pas choisir l’auteure ou la muse empêche une implication dans leurs sentiments et créé une distance là où on espérait un peu de folie et de fantastique, bref un film plus queer.
vincy
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