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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Chanson douce
France / 2019
27.11.2019
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PARASITE
« Vous n’aimez pas les imprévus, Louise ? C’est joyeux les imprévus ! »
Pour une adaptation sur grand écran, Chanson douce cochait toutes les cases du bon roman respectable (Goncourt), populaire (900000 exemplaires en France, des traductions partout) et passionnant (un infanticide sur fond de luttes de classes qui ne dit pas son nom). Même la narration de Lëila Slimani permettait d’imaginer un découpage idéal pour un film entre étude de mœurs et fantastique.
Malheureusement, Lucie Borleteau gâche tout : la forme comme le fond. Cette Mary Poppins idéale qui se mue en nounou d’enfer nous laisse en plan. Ce n’est pas tant la faute à Karin Viard, qui flirte parfois avec le surjeu pour faire combler les problèmes de scénario et de réalisation) et nous faire comprendre l’évolution de l’histoire. Le beau couple Lëila Bekht i- Antoine Reinartz n’est pas plus coupable : ils ont si peu à donner avec des personnages qui ne dépassent jamais celui qui leur a été assigné. Regardable comme un téléfilm écrit à la va-vite, Chanson douce, doit compter sur ses comédiens et la musique pour combler les ellipses et les manques, pour appuyer lourdement sur ce que veut signifier l’image, impuissante à traduire une émotion par elle-même.
La solitude extrême du personnage sociopathe de Viard ne justifie pas son crime ultime. Pire, ce glissement vers la folie (seule séquence de cinéma : l’invasion des poulpes dans son studio) n’est jamais réellement palpable. Ainsi, le spectateur ne voit qu’une bonne fée parfois ogresse au comportement lunatique, décidée à transformer son CDD en CDI par tous les moyens.
Hormis la délégation de la parentalité à une femme d’un autre temps, rigoureuse, attentive, mais très seule, on ne ressentira jamais le mépris de classe qu’il y avait dans le livre. Le film se contente d’une emprise psychologique – manipulatrice (in)consciente, la nounou sait se rendre indispensable, où les parents sont dépossédés de leur autorité.
Mère poulpe
La mise en scène ne parvient jamais à créer un sentiment d’angoisse ou de tension. Même le parti-pris de ne pas dévoiler le crime au début (à l’instar du roman) n’apporte rien. En débutant par un discours (lucide ?) sur la maternité et en clôturant par l’indicible et l’inmontrable meurtre, la cinéaste s’imposait une forme de progression, de crescendo dramatique. Or, le film n’est qu’une succession de scènes qui forment le portrait d’une cinglée, addict au talc et aux jeux d’enfants.
Chanson douce souffre de cette absence de maîtrise, mais aussi de perversité (que le scénario confond avec les humeurs et la méchanceté d’une nounou perfectionniste). On oublie la critique du roman sur l’individualisme, l’égoïsme, l’insatisfaction des parents, et leur manière de « recréer » une forme d’esclavagisme moderne (avec les cotisations sociales et les déductions d’impôts). Ici, ce n’est qu’un conte à dormir debout où les parents se laissent dévorer par leurs progénitures, les livrant à celle qui va les dévorer.
Cette mystification, qui se retrouve bien dans le jeu sans filtre et sans retenue de Viard, ne suffit pas à nous donner le vertige attendu. Trop maladroit, Chanson douce n’est qu’une illustration plate d’un roman qui en devient d’autant plus subtil et brillant. Un film qui n’ose pas s’affranchir de son matériau d’origine et qui cherche, en même temps, à être accessible. En ne se confrontant pas à l’horreur (économique comme criminelle), Lucie Borleteau offre un petit pot sans saveur.
vincy
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