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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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L'art du mensonge (The Good Liar)
/ 2019
01.01.2020
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MENSONGES ET SÉDUCTION
«Je ne sais pas combien de temps je tiendrai dans cet endroit. J’ai l’impression de me noyer dans le beige. »
Bill Condon n’a pas cherché à faire des prouesses avec sa mise en scène. Il calque sa caméra sur un récit bien ficelé, hypnotisé par deux comédiens qui dévorent l’écran, et s’amuse avec un montage qui, habile, maintient le suspens.
L’art du mensonge, cependant, ne trompe personne. Si dans les trois quarts du film, Ian McKellen semble un menteur hors-pair, et Helen Mirren, une veuve retraitée un brin naïve, on se doute qu’elle cache bien son jeu autant qu’il excelle dans le sien (l’arnaque).
Aussi on attend impatiemment qu’elle dévoile ses cartes et tombe le masque. Ce qui peut donner un coup de mou à l’ensemble du film, qui tergiverse en nous révélant toutes les facettes de l’un (violent, manipulateur, sournois, et pire encore), tout en donnant peu d’indices sur l’autre (professeure bourgeoise affublée d’un petit-fils fouineur).
Mais, « c’est plus profond qu’on ne le croit ». Ce qu’on pense être une banale arnaque à la veuve généreuse et candide est en fait une vengeance qui se mange glacée. Là où on nous montre un couple senior s’attachant l’un à l’autre (par intérêt ?) n’est que la surface d’un plan machiavélique mûri depuis plus de soixante ans et qui trouve ses racines dans un acte odieux. La référence à #MeToo donne un aspect contemporain à la situation.
Sans être brillant, le film est divertissant et malin, mais trop didactique pour transcender son sujet. On sait, dès le départ, qu’ils mentent. Qu’il s’agit d’un jeu de faux-semblants. Mais le scénario se perd un peu dans un canevas trop classique, pour ne pas dire convenu. La tension monte évidemment : le prédateur impitoyable et la proie trop tendre semblent parfaitement compatibles pour qu’elle perde.
Il faut alors toute la force du découpage, avec quelques flashbacks et personnages intrigants, pour donner du relief à ce duel entre Ian McKellen, fabuleusement cruel et arrogant, et Helen Mirren, maestria de toutes les nuances de son visage et dominatrice passive.
L’art de jouer supplante alors l’art de mentir. De ces deux survivants pleins de secrets, négociant leur part avec Dieu et l’autre avec le Diable, on ne retiendra que la cupidité stupide et fatale de l’embrouilleur et la dignité classe de celle qui aura le dernier mot.
vincy
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