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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |







(c) Ecran Noir 96 - 25 |
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Judy

USA / 2019

26.02.2020
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 UNE ÉTOILE RENAÎT
« On ne m’attend nulle part. »
Il y a des films où la prestation d’une comédienne vire tellement à une sorte de performance qu’elle en écrase tous les défauts formels de l’œuvre. C’est le cas de l’incarnation de Judy Garland par Renée Zellweger, littéralement métamorphosée.
On oublie rapidement la personnification de l’actrice comme le récit très convenu qui coche toutes les cases d'un parcours tragique dans un biopic, et qui ne peut s’empêcher quelques flash-backs pour expliquer le naufrage d’une star.
Judy Garland n’était pas la plus jolie, mais elle avait un don, sa voix exceptionnelle. Depuis Le magicien d’Oz, la star avait pour mission de divertir. Elle a traversé une chienne de vie, entre médocs, divorces, succès et flops. C’est au moment où elle est dans sa pire des galères, une traversée du désert sans fin, que l’histoire débute. Elle est déjà has been, une gloire entre spots la mettant dans une fausse lumière et rideau qui tombe.
Judy au crépuscule. Pas fiable, en faillite, plus personne ne veut d’elle, sauf un gérant de club à Londres. Elle court le cachet, sans savoir qu’elle vit ses derniers mois. Le film survole ainsi le show biz de l’époque, de l’emprise des studios aux vedettes en résidence. Tout est régi selon des codes, et le film montre une femme brisée, fragile, pour ne pas dire vulnérable et ultra-sensible, qui aspire à une véritable liberté.
« - Vous prenez quelque chose contre la dépression ?
- Quatre maris. Inefficace.»
C’est ce qu’il y a de plus beau et touchant dans ce scénario. Cette femme lasse et dépassée, presque perturbée par cette existence chaotique. Le film veut insister sur ce point. D’ailleurs, Renée / Judy ne chante qu’au bout de trois quart d’heures. Et même si ses classiques ne sont pas oubliés (Zellweger fait preuve d’un étonnant charisme scénique), ils ne dominent pas le drame.
Tous les aspects de sa personnalités sont, en revanche, évoqués, de l’icône gay à la mère paumée, de ses choix impulsifs et malheureux côté mecs à ses addictions destructrices. Un parfait personnage de cinéma, névrosée à souhait, entouré de gens attachants ou exaspérants.
C’est pour cela que Judy se laisse agréablement regarder, sans révolutionner quoique ce soit. La diva et l’actrice fusionnent pour être ainsi mises en lumière afin de dévorer l’écran. A travers ses combats intimes, ses conflits extérieurs, son franc parler et son talent, cette femme en lutte permanente, nous séduit immédiatement. Bien sûr, il manque un peu de dramaturgie dans ce supplice. Si la déchéance et l’instabilité sont bien reproduites, l’effondrement paraît parfois un peu tiède et ses sacrifices trop forcés.
C’est finalement la passion de son métier, un amour plus fort qu’elle, et c’est ce que réussit très bien Renée Zellwegger à transmettre. Pas seulement comme actrice, mais comme chanteuse et danseuse. Un bel hommage où elle et son public communient. « Vous ne m’oublierez pas ? Promettez-le moi ! ». Les adieux sont beaux. C’était finalement le seul amour sincère de sa vie. Et, quelque part, on pense à l’actrice Renée Zellwegger, absente si longuement des écrans, qui elle aussi renaît, et veut sans doute continuer d’être aimée pour son métier. Ça méritait bien cet Oscar, qu’elle a dédié à Garland.
vincy
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