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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Petit pays
France / 2020
28.08.2020
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CARNAGE
«- Laisse le racisme à Jacques et aux anciens colons.»
Peu importe que vous ayez lu le best-seller Petit pays de Gaël Faye. L’adaptation qu’en fait Eric Barbier est fidèle au récit autobiographique du rappeur, sur ses souvenirs d’enfance au Burundi, mais s’en affranchi pour pouvoir raconter une autre histoire, toute aussi intime de ce « petit pays » africain.
Le réalisateur n’est tendre avec personne : ni les colons, esclavagistes refoulés, ni les ethnies, qui vont s’entretuer. Son empathie se dirige vers cette famille « entre deux ». Un homme d’affaires belge, blanc, sa femme, tutsi du Rwanda, et leurs enfants constituent le cœur du film. Petit pays est une chronique familiale, avec ses heurts et ses bonheurs, où la séparation des parents fait écho au divorce entre Hutus et Tutsis. Tout va imploser, s’éparpiller, sauvagement, brutalement, mettant fin à l’enfance et à l’innocence des deux métis.
« Vous allez me le payer, bande de prépuces ! »
Dans cette Afrique filmée de manière authentique (la scène de récupération du vélo est à cet égard un condensé où tout se mélange, citadins et ruraux, femmes et hommes, adultes et enfants), Gabriel n’est finalement qu’un témoin, attachant (car il a ses failles), des disruptions de son existence. Si la première partie aurait pu être le conte de ses 400 coups, il bascule vite dans l’incompréhension et l’effarement quand la haine raciale et ancestrale, irrationnelle, embrase le pays et menace les siens. Il est chassé de son Eden, où les mères palabrent, les copains s’amusent, sa petite-sœur dort paisiblement – notons que Barbier a réécrit leur relation avec justesse - et les domestiques sont des amis.
Le cinéaste bascule alors dans un autre camp : un pays en guerre, une terre qui brûle, des victimes de coups de machette ou de lynchage absurde. Il n’y a rien de politique. Juste des successions de menaces et de terreurs, des Tutsis « génocidés » et des occidentaux indésirables. On est sous haute-tension. Les flammes et l’horreur n’assouvissent aucune soif de vengeance. Gabriel s’évade dans les livres de Jack London. Fuir l’atrocité par tous les moyens.
L'effondrement
Pendant que les morts s’entassent et que l’inquiétude montre, le film se libère doucement de ses attaches romanesques et vient se focaliser sur le personnage de la mère (Isabelle Kabano, qui happe chacune de ses séquences). Elle est la cible, la victime, le symbole de ce paradis perdu. Elle est le sang de Gabriel, du Burundi et du Rwanda. Le sang qui envahit les rues. Avec elle, tout vacille dans un état second. La tragédie est là, incarnée par cette femme qui, spectrale, hante la mémoire du pays et de son petit « gaby ».
Si Petit pays débutait sous le mode d’une chronique familiale, presque sans passion, mais pas sans charme, il s’endurcit et se renforce avec les événements dramatiques jusqu’à devenir le tableau sombre de communautés, d’une époque et d’une région devenues folles. Eric Barbier a eu raison de décentrer son film de Gabriel et d’élargir le point de vue. Ainsi, il développe de manière équilibrée et sans pathos les effets d’un massacre sur un peuple. Il nous laisse alors avec des absents, autant de fantômes qui vivent dans des maisons abandonnées ou dans les souvenirs des survivants.
Poignant, le film n’est pas seulement un beau conte cruel qui empêcherait de dormir avec le son des mitraillettes au loin. C’est également une jolie fable sur la résilience dans un monde qui s’écroule. vincy
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