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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Mille bornes
France / 1999
21.04.99
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ROAD MA VIE
Au cinéma, les morts cachés dans les coffres des voitures sont généralement abandonnés à un triste sort : d’abord, les responsables de la mort sont généralement ceux là même qui conduisent la voiture - aucun respect n’est témoigné au défunt. Ensuite, et pour la même raison que celle qui vient d’être énoncée, l’impératif est de se débarasser du corps au plus vite, peu importe où et dans quelles conditions.
Mille bornes est à mille lieux de ce triste constat. Le corps de Romain se retrouve effectivement dans le coffre d’une voiture, mais ce sont ses meilleurs amis qui conduisent et c’est là que réside toute la différence : l’intégrité physique de Romain est préservée grâce au blocs de glace que Pascal et Jean récupèrent sur un marché, et la destination est celle voulue par Romain.
A partir de là, les cinq amis ont donc mille bornes pour se relever du coup de massue que représente la mort de Romain. Et autant pour accepter de partager leur peine. Et partager, cela signifie écouter l’autre, l’accepter dans sa différence et faire ces deux choses là peut-être encore mieux que d’habitude parce qu’un ami commun n’est plus là. Mais cela ne se fait pas sans mal, sans heurts. Admirablement, Beigel a choisi des personnages suffisamment singuliers pour que les confrontations fassent des étincelles. C’est d’ailleurs cela le plus intéressant. Si le film montrait uniquement la mort comme prise de conscience de la vie (et de sa valeur), ce serait bien sans être franchement original. Or, s’ajoute à cela dans Mille Bornes, un partage du deuil à plusieurs. Et ce partage là induit obligatoirement une redistribution des cartes au sein du référentiel de chacun. Au bout du compte, c’est l’amitié "et sa « capacité à défaire le tragique»" qui sort victorieuse.
A noter qu’à côté du voyage des cinq amis, il s’en déroule un autre : celui du père de Romain qui rejoint l’Italie en train. Grâce à la compagnie d’une jeune japonaise rencontrée dans son compartiment, pour lui aussi le deuil sera différent. Il plane sur les moments d’échange entre les deux personnages beaucoup de douceur et un côté mystérieux, insolite.
L’équipe des comédiens est formidable, aucune mention particulière à attribuer, ils sont tous à l'aise dans leurs baskets. Et Emma De Caunes confirme dans un rôle qui l’a met sur un pied d’égalité avec ses partenaires masculins - elle n’est pas La star du film - tous les espoirs que l’on place en elle. anne sophie
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