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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Le monde selon Bush
France / 2004
23.06.04
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BANANA REPUBLIC
George W. Bush : "- Aux étudiants médiocres : vous pouvez devenir Président des Etats Unis."
Sujet passionnel par exellence : un homme puissant et plus que controversé attirant autant la haine de ses adversaires que l'admiration de ses fans. Un bon documentaire permet de mieux comprendre une personnalité, des faits ou encore un phénomène. Ici les trois se mélangent à travers un puzzle de propos recueillis sous formes d'interviews. Le travail est rigoureux. Ici, aucun motif de divertissement. Il n'y a rien de ludique. Nous sommes à l'opposé des documentaires grand public de Michael Moore. Et, si nous devions les comparer, celui de Karel l'emporte sur deux points essentiels : l'efficacité du message et l'authenticité du propos. Bien sûr, cinématographiquement, Moore explore davantage l'écriture hollywoodienne pour mettre en scène sa vision de l'histoire.
Ici Karel se cache derrière la parole des autres. Pour tout démocrate, pour tout citoyen libre, certaines feront froid dans le dos. Tant de cynisme, d'arrogance, de stupidité, de corruption, démontre à quel point notre civilisation est en décadence, part en déliquescence. Tous ces témoignages irriguent notre cerveau et nous font réfléchir à l'attitude récente de nos chefs d'état (il serait intéressant de faire la même chose sur la machine RPR ou sur Blair).
Bush, à l'instar du portrait de Moore, est clairement vu comme un crétin, une marionnette, un ignorant, un être peu curieux et inattentif. Il a pour lui quelques atouts : Dieu, les dollars, l'absence de scrupules. Menteurs, illuminés, ces nouveaux croisés ont des convictions primaires : Mahomet est vu comme un terroriste, et Israël est traité comme le cinquante et unième état des USA.
Nous ne sommes pas surpris. Le documentaire agit plutôt comme une piqure de rappel pour ceux qui sont bien informés. Ce mélange de croyances religieuses et d'ignorance historique, cette méconnaissance du monde (Bush n'avait jamais eu de passeport avant d'être président : seulement 7 millions d'Américains en ont un!) et ces manigances pour détourner la vérité, toutes ces combinaisons expliquent, justifient, nourrissent notre refus d'accepter cette "gouvernance".
Car, bizarrement, Karel tient le même discours que Moore : avant le 11 septembre, c'était une présidence en déshérence. Cadeau inespéré, les attentats ont servi de déclic à l'action d'un Bush, formaté pour faire du fric ("Ils achètent le pétrole pour un euro et le revendaient pour trois."). Outre le pétrole (et les amitiés louches avec les Saoudiens) il alimente aussi le complexe militaro-industriel, dont certains de ses amis font partie. Tout n'est qu'une histoire d'enrichissement personnel. Point d'éthique. On y met les moyens : une communication hollywodienne, avec slogans et méchants de service. L'ambition de redessiner la carte du Moyen Orient est d'inspiration messianique, mais les objectifs de chacun est de s'en foutre plein les poches.
C'est là que le documentaire prend son élan : avec la personnalité de Robert Carlucci, président du groupe Carlyle, dont Bush senior et un membre de la famille Ben Laden sont membres. Ici, tout un système se révèle : un ancien de l'équipe Reagan, qui a embauché le père Bush et qui font des affaires avec des entreprises d'armement...Le monsieur a l'air d'un vieux parrain de la Mafia, faux cul et macchiavélique. A l'opposé du doyen du congrès, grandiloquent et presque grotesque. Et pourtant! Quelle éloquence! Quelle dureté quand il attaque l'exécutif avec des mots simples et une analyse précise. Nous voici parmi un régime digne de l'URSS ou des Talibans. Avec quelques Etats qui pratiquent la désobéissance civile face à un Patriot Act proche des méthodes staliniennes.
Tout cela croise évidemment les autres ouvrages littéraires ou audiovisuels sur ce Bush Junior. Comme Moore, il s'attaque à une élection volée en 2000, à cette loi patriotique incohérente et absurde, à ces liens consanguins entre les religieux, les militaires, les conservateurs et les gens du pétrole. Rien de nouveau si ce n'est une mise en perspective sans concessions décrivant un aveugle au milieu des sourds. Tout cela a une origine : Bush, le grand père, qui gérait l'argent des Nazis et des Thyssen. Un paradoxe quand on sait que le petit fils a l'appui de la communauté juive américaine. Mais qui le sait tout ça aujourd'hui?
Face aux mains sales de Bush, tout est entre les mains du peuple. Car le pessimisme pointe derrière ces mines déconfites, graves, angoissés, enragées : "Si l'information est l'oxygène des Etats Unis, alors nous venons d'être gazés." Rien ne dit que Bush ne sera pas réélu... "Les USA ont créé leurs propres ennemis." vincy
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