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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Les sentiers de la perdition (Road to Perdition) (Road to Perdition)
USA / 2002
11.09.02
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AMERICAN FAMILY
"- Pourquoi tu souris tout le temps?
- Parce que tout ça est à pisser de rire."
En deux films, Sam Mendès affine sa signature, souligne son style, impose ses thèmes et relie son art de la mise en scène théatrale à son sens de l'image, fortement référencée.
D'un parti pris où la technique tient davantage de la direction artistique, Mendès soigne le cadre, la photo, le son et nous embarque dans un voyage vers les bords du Styx. Car il n'y a pas de pardon sur cette route pour Perdition, Michigan. Juste des âmes égarées dans une sale époque, avec une rasade de rédemption, et surtout une bonne lampée de vengeance. La famille Américaine est toujours aussi laide à voir. Les hommes de Mendès semblent perdus dans leur lente descente aux enfers. L'ombre de Capone plâne et l'avenir de cette Amérique est interrogée. Mais quel espoir existe-t'il quand ce film ne réunit que des assassins : où se situe la morale? le bon? Il n'y a que brutes et méchants.
Dans cet univers noir dans lequel nous plongeons avec un délice suspect, nous revivons ces vieux films américains qui naviguaient dans les eaux troubles du polar. Ici, les hommes trainent une sorte de lassitude; ils sentent qu'ils n'ont pas le choix face à un destin qui se résume à une impasse fatale, un peu plus violente que la moyenne. Les visages sont tirés, tristes et transpirent une morbidité irréelle. On nous raconte une histoire de fantômes. Une sorte de chronique d'un suicide annoncé, une songerie cauchemardesque qui finit en bain de sang.
Mais tout cela est filmé de manière si lyrique... Mendès convoque De Palma, Ferrara, Gray et Hitchcock. De la pluie en torrent, du vent en tempête, des bêtes en furie, de la folie en coup de feu, une mer qui respire... Et tant de pudeur. Le mouvement si fluide accompagne chacun des plans finaux qui nous conduira d'une chambre d'hôtel miteux à une maison vide au bord d'un lac, en passant par les ruelles de Chicago et une suite d'un Palace. La paix est introuvable, le requiem est évident. Dans sa forme, Mendès utilise tous les artifices de sa mise en scène, quitte à exposer le flanc à ses détracteurs qui trouveront tout cela trop factice. Dans le fond, ce n'est qu'une banale tragédie grecque où le patriarche ne sait pas lequel de ses deux fils, l'un de chair, l'autre d'esprit, il doit tuer pour être enfin tranquille. "Les fils sont là pour embêter les pères". Tout est dans cette phrase.
Au milieu de magnifiques plans, le casting joue à la perfection. Bien sûr tout pourrait se résumer à l'épaisseur dense et fatiguée de Hanks, à la vitalité de ce vieux lion qui rugit, ce Newman qui s'exhibe en spectacle, tout en nuances. Et que dire de Jude Law qui nous inquiète avec sa laideur, son allure malsaine, sa démarche de coupable. Les couleurs sont contrastées, chaudes et grises, sombres et surexposées, passant du vieux bois humide qui craque et qui s'enflamme au ciel pâle et trop lumineux.
Cette histoire de filiation dégénérée, d'héritage raté, où les dettes sont d'honneur, et l'argent pas très catholique, illustre une Amérique qui n'a pour héros que des gangsters, des Hors-la-loi. C'est sans doute ce qui a séduit Mendès. Il y a trouvé, comme dans American beauty, une certaine américanité, un constat irréfutable comme quoi le système est toujours gagnant, quelque soit le système.
Dans cette trahison familale, les dialogues sont bien écrits, l'action rythme un road-movie où un enfant se sent paumé entre les livres qu'il lit et les aventures qu'il vit, la musique s'ose quelques audaces contemporaines.
Proche d'Un monde parfait (d'Eastwood), cette route vers Perdition s'éloigne des sentiers battus en refermant le couvercle du cercueil sur une Amérique corrompue, sans lois, en privilégiant la psychologie à la punition. Peu importe le jugement, l'histoire ne retiendra que la généalogie qui aura conduit à tout ce carnage. Les racines du mal sont ailleurs, dans un système, que Mendès continue de contourner comme il se méfie certainement de cet ennemi qui l'entraînerait lui aussi à sa perte. vincy
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