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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Sleepy Hollow
USA / 1999
09.02.00
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LE DORMEUR DU VAL
"- La vérité n'est pas toujours conforme aux apparences..."
Il ne faut pas s'étonner si le lien entre Sleepy Hollow et Dracula est évident ; film d'horreur ultra-esthétique (ne serait-ce que les premières gouttes de cire...), oeuvre inclassable et artistiquement irréprochable, Sleepy Hollow est un suspens sanguignolant, divertissant, macabre, et surnaturel. "Tendance", mais à part.
Tim Burton nous envoute tout au long du film avec une dose de sorcellerie, un brin de magie noire et pas mal de fantastique. Si Dracula avait une certaine profondeur, la superficialité de Sleepy Hollow ne gêne en rien le plaisir que le film nous procure : fluide, rythmé, beau... Burton nous en met plein la vue et n'ennuie jamais.
Il est évident que sa direction artistique (décors, costumes, images, musiques, photo...), au service de son imagination et découlant de ses propres talents, nous subjugue.
Ce qui frappe dans Sleepy Hollow c'est l'équilibre parfait entre la volonté d'effrayer et la beauté picturale de chacun des tableaux. L'alternance entre des instants de poésie, buccolique ou morbide, et des scènes d'horreur totalement maîtrisées (notamment la tuerie de la famille).
Mais Burton ne va jamais trop loin : s'il montre des têtes roulées, il évite le carnage gore. Et d'un film bêtement "épeurant", il en fait une histoire romantique... et même naïve.
Derrière ces armes blanches, ces canaris rouges, et ces arbres noirs, il y a une trame amoureuse entre l'inspecteur Johnny Depp et la suspecte Christina Ricci. Inutile de revenir sur ce qu'on appelle une alchimie prévisible et parfaite entre les deux comédiens. Seul la séquence où le couple se fâche est peu crédible, à cause de dialogues trop creux. Un peu factice, mais le maléfice de cette scène est vite oublié grâce à l'interprétation sans faille du duo.
Depp, qui n'avait pas connu un si beau rôle depuis ... Dead Man?, s'amuse dans les poursuites à travers le brouillard, mais aussi à manipuler ses objets bizarres et scientifiques. Jeune Homme plein de certitude, traumatisé par la religion, se réfugiant dans la rationnalité, il incarne un être fragile, immature, maladroit et presque drôle malgré lui. Incompétent surtout. Burton le sauve avec l'amour, le rêve, l'héroïsme. Le courage d'affronter ses peurs.
Le cinéaste, aidé par des effets spéciaux discrets mais efficaces, filme un univers qui ne trouve ses racines dans aucune des productions américaines actuelles. Ce qui le distingue naturellement. Piochant dans ses précédents films (Edward Scissorhands, L'étrange Noël de Mr Jack, Batman et Beetlejuice) - ce que certains ne manqueront pas de critiquer - il affirme plus qu'un style et un visuel singuliers. Il raconte des histoires à la frontière des morts et des vivants, avec des personnages étranges, marginaux, isolés, et ne cherchant qu'à être aimés. Sleepy Hollow est sans doute le moins barge de ses films, mais c'est aussi le plus accessible depuis Batman.
La fiction mélange légende et réalité. Songe et sorcellerie. Comme si le virtuel pouvait nous évader de nos conditions, aussi horribles, fantastiques soient-elles...
On reprochera peut-être au scénario d'être classique (sans être prévisible, ça reste un polar à la Edgar Allan Poe), utilisant un ouverture spielbergienne (menace fantôme, premier crime).
Mais on remerciera Burton de nous emmener dans des territoires inconnus, incongrus, de nous dépayser avec des contes à dormir debout. Avec une Histoire d'A. exquise. Avec suffisamment de tension pour nous accrocher au siège. Il y a là un désir de spectateur. Bref on le remercie de nous faire aimer encore et toujours le cinéma. "Juste à temps pour le nouveau siècle"... vincy
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