Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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La femme de Gilles


Belgique / 2004

15.09.04
 



MON MEC A MOI





"- Et bien ma chère, si tu savais, t'aurais pu garder ton mari chez toi."

La femme de Gilles est d'abord un très joli film. L'image est somptueuse. Colorée avec justesse, lumineux et obscur, l'oeuvre s'imprègne d'un esthétisme qui permet de magnifier ce destin tragique. Jamais sordide, la sérénité intérieure trouve son écho dans une lumière éclatante et suave.
Frédéric Fonteyne ne voulait pas verser dans le portrait à la Zola d'une Belgique prolétaire et précaire. On ne sent jamais la pauvreté. Ni le faste. Les personnages ne sont ni beaux ni laids. Certains sont plus sexy de nature (Laura Smet), d'autres font avec leur physique (Emmanuelle Devos). Comme dans la vie. Tous les rôles sont ingrats, puisque Cornillac, en rustre, jaloux, éjaculateur précoce n'est pas à la fête entre sa passion et sa raison. La femme de Gilles c'est avant tout une belle histoire.
Fonteyne a pris le parti de tout filmer à travers les yeux de cette épouse, Elisa. Ainsi, la caméra regarde ce qu'elle observe. La musculature de son mari. Ou, plus durement, son mari souffrant de voir sa belle-soeur dans les bras d'un jeune danseur. Nous parvenons, avec un peu de miracle cinématographique, à comprendre ce que ressent Elisa. Grâce aux saisons si marquées. Le bonheur familial croise ainsi le printemps ou l'été. Et puis comment ne pas comprendre cette femme, amoureuse de son homme, et forcément envieuse de la beauté de sa soeur?
Cependant, là est l'écueil du film, Devos n'est pas à son aise. Il lui manque une forme de candeur, de beauté intérieure pour incarner totalement Elisa, à la fois manipulatrice romantique et sainte pardonnant tous les pêchés. A trop jouer avec sa bouche, cela limite un peu les expressions et aggrave son peu de pouvoir de séduction. On l'a connue plus intéressante (notamment dans Sur mes lèvres). Ici, elle ne parvient pas à insuffler ce soupir invisible qui exprime tant l'abnégation, la souffrance cachée. Elle sait atteindre l'extase, les nuances de la méfiance, le drame pur. Mais jamais elle ne fait d'Elisa une folle convaincante. Une paumée entre son Dieu, sans réponse (excellente scène), et ses obligations familiales (quitte à laisser les enfants se débrouiller).
Heureusement, les décors et les paysages accentuent l'aspect romanesque du film. Et si on ne voit jamais la relation entre le mari et la soeur, cela ne manque pas. Car Fonteyne sait parfaitement esquisser, laisser deviner, ou nous faire croire à ce que nous ne voyons pas. Un vrai cinéaste du suggestif.
Il manque une petite dose de tension. Car à force de nous faire croire au regard d'Elisa, pourquoi ne pas sentir les émotions et les pulsions de ses tourments? A force de ne jamais exhiber les désastres de la passion, Elisa ne les voyant pas, le spectateur se laisse flotter dans cette histoire sans preuves d'amour, sans clash apparent. Nous fantasmons sur un meurtre et c'est d'une simple dépression qu'il s'agit. Nous comprenons le piège mental d'Elisa mais ne nous en rendons compte qu'à la fin (sublime). Comme Elisa, on attend que ça passe. Nous jouons les spectateurs modèles. Ce film, cruel, complice, pervers ne construit jamais totalement les passerelles nécessaires pour nous mener vers une émotion qui aurait dû nous étreindre. Trop en demi-teinte? Si les silences en disent longs, cette intériorité permanente pourra parfois lasser car Fonteyne aurait du, davantage, explorer la voie du fantasmagorique, à l'instar de cette séquence de poursuite dans la neige.
Ici, nous sentons le temps passé. Et ce rythme tue parfois notre captation. On regrettera ainsi de n'avoir pas plus de sympathie pour Elisa. Femme foetale. Il manquait peut-être une confrontation intense avec sa soeur, femme fatale. Tout ça pour un mec, qui ne valait presque rien... Les temps changent.
 
vincy

 
 
 
 

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