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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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La Veuve de Saint-Pierre (La veuve de st-pierre - the widow of saint pierre)
France / 2000
19.04.00
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MADAME DONNE LE LA
"Tranchez vous-même si vous en êtes capable !"
La Veuve de St Pierre est un drame passionnel. Il déplaira à ceux que le cinéma "qualité française" répulse. Il séduira les inconditionnels des histoires d'amour tragiques. Il réconciliera enfin ceux qui vont au cinéma pour les grandioses paysages (inédits) et les stars "bigger than life".
Au-delà de ses indéniables qualités artistiques (photo, cadre, musique, costumes, décors...), le film repose sur un scénario plein de sous entendus et de non dits, d'enjeux et de discours invisibles - toute l'intelligence du script est là. Le poids des images compte bien plus que le choc des mots. Certes il y a de l'esprit dans le verbe, et on retrouve même cette fuite vers l'Angleterre (symbolisant une fois de plus la liberté) chère à Ridicule. Car étrangement, La Veuve (double sens ici : la Guillotine et le Capitaine) est comme une suite au film triomphal de Leconte. De ses détails (cheval fougueux pour l'homme, usage des fleurs pour la femme) à sa généralité (les idéaux républicains remplacent l'utopie démocratique), ce film n'est qu'une conséquence aux inconséquences des révolutionnaires, à 70 ans près.
Les propos humanistes, et cette condamnation à mort sur la conscience, font de ce film une oeuvre louable sur la tolérance et le pardon, le droit de vie (plus que le droit de mort). Ici, les vrais assassins ne sont pas jugés. L'erreur ne serait pas humaine. Malgré les travaux d'utilité publique, l'héroïsme du condamné, et l'oeil de Cahin omniprésent, la sentence ne bougera pas d'une lame; jusqu'à l'obstination bête, jusqu'à l'effet pervers de punir ceux qui ont défendu le prisonnier.
Bien qu'il y ait un coeur qui bat chez la geôlière, un élan républicain et solidaire dans la population, bien que le meurtre soit stupide (la nuance entre gros et gras donnant lieu à découper le lard), rien ne sauvera l'étranger...
Il est incarné par un brut de brut Kusturica, charismatique et énigmatique, le regard absent et implorant les cieux de lui expliquer le sens de son acte. Autour de lui, un couple idéaliste, amoureux, unit jusque dans la séparation, à jamais fusionnel ; Auteuil et Binoche habitent ce duo avec un naturel désenchanté qui émeut. Leurs regards sont lourds de signification.
Il y a donc peu de défauts dans ce scénario fouillé et lyrique, sensible et précis ; si ce n'est le classicisme même de l'oeuvre et une histoire trop prévisible. L'adhésion au sujet est assez difficile; surtout, on ne ressent pas réellement les émotions. En prenant son temps et en insistant sur les espaces et les visages, Leconte appuie trop fortement l'image et l'alourdit.
Ces effets "à la Besson", composés de longs travellings (mer, sol neigeux, vues du ciel) donnent de l'ampleur mais ne parviennent pas à nous transporter. On reconnaît sa maîtrise à des scènes plus qu'inspirées (notamment celle de la fuite et celle de l'adieu).
Mais on reste partagé sur la sensation laissée. La fin donne un goût des autres plutôt amer et triste. En rien, ces passions ne touchent à l'amour universel. Alors, a-t-on vu un film spectaculaire et magnifique ? Ou un drame trop convenu et pas assez audacieux ? Le mystère se situe peut-être dans l'époque... ces enfants du siècle collent au romantisme du moment. Il y a un côté démodé qui nous laisse sans doute un peu froid. vincy
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