David Lynch, Lion d'or et Palme d'or, n'a pas tourné de long métrage depuis 2006. Une longue absence. Heureusement il nous a offert une suite à Twin peaks pour la télé. Et on peut voir ses photos fétéchistes dans l'exposition de Louboutin au Palais de la Porte dorée. Il vient aussi de terminer un court métrage. Elephant Man ressort cette semaine en salles.



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LE FESTIVAL DE CANE

Le livre Bye Bye Bahia



"Le plus grand acteur muet de tous les temps" (Buster Keaton)

Il partage avec Coppola les mêmes origines créatives : une maladie qui les a cloué au lit et leur permit de défier leur imagination, de stimuler le jeu avec leurs mains ou même inviter leurs parents à écouter leurs histoires... Aujourd'hui encore, de par sa silhouette, comme son statut de star, il fait parti des dix grandes légendes du cinéma...

De son arrivée en Amérique en 1912 jusqu’à ses premiers longs métrages au début des années 20, Charles Chaplin aura construit un personnage : Charlot, et sous le format de ses courts métrages, il aura fait rire le monde entier tout en façonnant son cinéma, et même le cinéma. De l’école Mack Sennett à l’indépendance artistique, l’évolution est flagrante.
Car, aujourd’hui, lorsqu’on parle de Charles Chaplin c’est en réalité Charlot qui vient à l’esprit. Les gens connaissent plus ce petit bonhomme à la démarche si caractéristique que l’homme et l’artiste qui l’a créé. Charlot est pourtant le produit de Chaplin, sa création la plus géniale, son double cinématographique qui lui permet d’exprimer sur pellicules ses visions sur le monde et son art du slapstick (cet humour du cinéma américain muet où le corps est le principal outil comique).

Charlot, pour beaucoup d’entre nous, c’est un chapeau melon, une canne et une démarche sautillante (que tout le monde essaiera d’imiter aux quatre coins du monde). Mais, il ne faut pas s’arrêter aux caractéristiques physiques du personnage : Charlot est un cabotin, un éternel joueur qui aime rire et séduire. Si il pouvait ne jamais travailler et passer son temps à jouer, il le ferait certainement. Il travaille quand il le faut, n’hésitant pas à faire les travaux les plus ragoûtants, mais ce n’est au final que pour se payer du bon temps, du divertissement, ou pour pouvoir offrir un charmant dîner à une demoiselle qu’il convoite. Entre l'utopie de la société de loisirs et l'aliénation du travail, il est logique d'y voir une poésie imprégnée de marxisme, une sorte de bonheur universel et naïf.

Charlot est un personnage qui aspire au bonheur et à la liberté. Une liberté de mouvement et d’action. Dans les premiers temps, dans les premiers courts métrages de Chaplin, le personnage de Charlot n’est pas aussi clairement défini. Il n’est en effet qu’un homme espiègle (sans âge) qui ne pense qu’à une chose : s’amuser ! Autrement dit, Chaplin n’intègre pas encore de véritables thèmes sociaux et se concentre sur le comique, le burlesque pur et dur. Tout son corps est alors au service du burlesque et il n’hésite pas à se mettre dans les pires situations possibles. Et c’est en expérimentant de nombreux métiers connus et populaires que Chaplin séduit tout d’abord. En effet, Charlot aura été pompier, banquier, dentiste, marin, usurier ou encore garçon de café. Des tâches qu’il exerce avec dextérité, ce qui ne l’empêche par pour autant de multiplier les bourdes. En réalité, ces bourdes pourraient largement être évitées si Charlot n’était pas si diable. C’est un enfant qui refuse de rester sage, un esclave qui refuse de se soumettre, un employé qui refuse d’obéir bêtement. Alors, dans son désir de vengeance (mêlé à une certaine gaucherie), Charlot provoque des catastrophes. Et plus il essaye de les réparer, plus elles empirent.
Dans certains courts métrages, Charlot apparaîtra neutre (dénoué de tout sentiment) et sera alors mis en avant son adresse. Dans d’autres, il sera un petit bonhomme fragile qui dans sa volonté de bien faire peut détruire votre magasin. C’est au final ce second personnage que Chaplin gardera.

Charlot n’est donc pas un instrument comique (comme Buster Keaton), c’est un être pensant qui réfléchit énormément aux choses qui l’entourent (peut-être trop d’ailleurs). Là où les gens ne voient dans un chapeau et une canne qu’un simple chapeau et une simple canne. Charlot, lui, voit bien plus que cela. Le chapeau devient un moyen, un outil de séduction pour lui. Il le fait rouler le long de son bras ou le fait se soulever dans les airs comme par magie, tout cela, pour séduire une charmante jeune femme assise sur un banc.
Dans le but de satisfaire ses besoins personnels (ou ceux d’une femme, ce qui revient au même), Charlot peut se mettre dans de périlleuses situations. Pour atteindre « la cerise », rien ne l’effraie.

Dans ses premiers films donc, Charlot se bat, Charlot triche, Charlot détruit tout ce qu’il touche. C’est un incorrigible garnement et un incroyable gaffeur. Si son but est toujours précis, le chemin pour y parvenir est toujours long et chaotique. Charlot en aura fait tomber des passants, en aura frapper des policiers, en aura casser des voitures, des murs et des maisons. Et pourquoi au final ? L'amour souvent, l'idéal parfois.

Charles Chaplin a très bien compris comment séduire le public dans les débuts de sa carrière. Ses courts métrages ont toujours la même « histoire » : Charlot se trouve dans un lieu public et sa curiosité malsaine l’amène à se bagarrer pour la conquête d’une femme. Avec son allure si burlesque, sa petite taille et sa ténacité, il ne pouvait que faire rire. Et puis, une chose très importante (que Chaplin développera considérablement par la suite), Charlot est un homme du peuple. Il appartient aux classes sociales les plus basses. Ses films touchen alors un très large public, assoiffé de nouveaux divertissements.
Sans le sou, ses vêtements troués et ses manières de vauriens font hurler de rire les soldats du front pendant la Première Guerre mondiale ainsi que les petites gens.

Trrès rapidement, le cinéma de Charles Chaplin deviendra un cinéma burlesque ET social. Il finira par êter surtout cérébral et politique, plus mature, moins candide.

On pouvait très largement voir poindre dans les premiers films de Charlot les premiers signes de ses obsessions idéologiques. En effet, les ennemis de Charlot sont toujours les mêmes : l’homme grand et costaud ou le riche bourgeois. Autrement dit, Charlot se bat contre qui ? Et bien, il se bat contre le fort, que sa force soit physique ou « sociale ». Le costaud l’écrase et l’évince grâce à la force de son poing et le riche grâce à la force de son rang. Ainsi, Charlot (et il en sera doublement aimé) se bat contre les différences (qu’elles soient sociales ou non). Il combat sa condition de petit bonhomme errant pour avoir le droit à un confort social : une femme et une maison.
Certes, il ne sait pas s’y prendre mais sa témérité est de fer, et il essaie toujours donc de faire preuve de ruse pour contourner l’obstacle physique ou social qui s’oppose à lui. Dans « Charlot patine » (The Rink - 1916), Charlot se voit en conflit (toujours pour une jeune femme) avec un « riche géant ». Il se trouve que la jeune femme aime patiner et c’est donc dans cet environnement que la conquête aura lieu. Le géant ne sait pas patiner, il ne fait donc que tomber, poussant les autres sur son passage. Charlot, lui, est plus qu’à l’aise. Les différences, les désavantages s’effacent donc. Charlot compense son handicap physique et social grâce à son aisance sur des patins à roulettes. Ainsi, il peut ridiculiser le grand costaud et impressionner la jeune demoiselle.

Mais bien souvent, même si Charlot parvient à effacer sa petite condition sociale, celle-ci finit toujours par le rattraper. Dans beaucoup de ses courts métrages (comme « Charlot et le comte » – The Count datant de 1916), Charlot se fait passer pour un comte pour que le père de la femme qu’il convoite l’accepte. Seulement, sa tromperie est trahie par ses mauvaises manières (sa façon de manger et de se tenir à table par exemple) et au final, il ne devra compter que sur lui-même. Une morale à double tranchant entre l'aspiration collectiviste et le pragmatisme individuel.

Tout est sous-jacent et sr cache derrière le rire. Au début de sa carrière, les films de Chaplin (ou des autres réalisateurs pour qui il travaillait) avaient un rythme fort. Les cascades, les chutes et les bagarres se multipliaient en un temps record. Lorsqu’il a quitté la Keystone et Mack Sennett en 1915 pour la Essanay, il a acquis une certaine indépendance artistique qui l’a éloigné de ce comique « brut » pour le faire glisser vers des intrigues plus « douces » et plus romantiques. Le personnage de Charlot s’affinait alors.
Mais dans les années 1917 et 1918 (où il travaille pour la First National), il lui arrive de revenir au burlesque « d’antan ». En effet, son personnage de Charlot étant clairement défini et accepté par le monde entier, il pouvait se permettre de prendre des libertés. Il lui arrivait alors par exemple de quitter Charlot pour jouer divers personnages. Notamment dans « Charlot fait une cure » (qui vaut mieux avec son titre originel The Cure), où Chaplin incarne un bourgeois accro à la bouteille.
Ce qui charme dans ce court métrage, c’est le cynisme du personnage de Chaplin. Il semble absent au monde étranger. Il n’a que faire des autres, que faire des excuses. Il est riche, égoïste et saoul la plupart du temps. Un homme détestable. Et il est rare de voir Chaplin incarner des hommes fondamentalement antipathiques. Voilà pourquoi c’est un régal de l’observer se glisser dans la peau d’un méchant. Preuve qu’il est aussi un excellent acteur !

Avant de se diriger vers des films à plus longues durées (Le Kid, Charlot soldat), Chaplin affine une dernière fois ses idées. Il inclut désormais une dimension dramatique dans ses films, ce qui en fait véritablement un cinéaste comique à part entière et au dessus de ses « concurrents ». Faire passer du rire aux larmes en un claquement de doigt sera la marque de fabrique, le don de Chaplin, et le sien seulement.

Avec des courts métrages comme « L’émigrant » (1917), Charles Chaplin met donc des thèmes comme la pauvreté et la misère au premier plan et surtout, il va « accompagner » son personnage de Charlot. Il va être accompagné, désormais, : une femme (dans le cas de L’émigrant) mais également un chien ou un enfant. Ainsi, Charlot cesse d’être un égoïste qui sert ses propres intérêts. Il est parfaitement conscient de la dureté de la vie et fera tout pour aider les gens en détresse ; plaçant son propre bonheur derrière celui des autres. Il volera, donnera le peu d’argent et de nourriture qu’il a à l’enfant, à la femme ou au chien pour avoir en échange leur sourire (leur contentement).
Chaplin va introduire la nécessité d’aider son prochain, d’une entre aide entre les hommes dans ses films (il moralise le spectateur). Une idée certainement issue des conséquences de la Première Guerre mondiale. On saura donc que par la suite, le cinéma de Chaplin sera de plus en plus féroce et de plus en plus engagé, le burlesque servant à transmettre au monde des idées sociales très précises. L’aboutissement viendra avec Le dictateur en 1940 et le mythique discours du final.

Charles Chaplin reviendra à la fin de sa carrière à son plus grand amour : le cirque, le clonesque. Cabotin, malicieux, silhouette irréelle, il a incarné un personnage désincarné, comme un mythe, une icône où le remède aux maux de ce monde passe par les zygommatiques. Son génie est d'avoir su le traduire en images, aux débuts du cinéma...

Benjamin


 
 
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