Coeurs transis ou coeurs brisés, en un clic fixez sa cote.
|
Votes : 22Cote : 36 %
|
|
|
|
|
|
FOUGUES ET RÔLES
Hélène de Fougerolles, trop facilement résumée en Belle Hélène, n'est pas une poire. Alors Hélène devenue proie existe-t-elle entre cette image de pétasse que veut lui coller Ardisson et ce caractère pétillant qui fait son charme? Force est de constater qu'en dix ans elle a un décalage entre son image télévisuelle et sa carrière cinématographique. Bonne cliente des médias, elle pourrait être vitre étiquetée aristocrate. Avec sa mouche au coin de la bouche, on l'imagine facilement en crinoline, poudrée, perruquée, courtisane d'un autre siècle. Qui contredirait cela? Combien de films populaires en ont fait la vedette tant promise depuis des années?
Les journalistes encartés remarquent qu'elle s'est fait couper les cheveux. Mais qui note son passage du drame à la comédie, la liste des cinéastes qui l'ont filmée : Klapisch, Beineix, Deville, Rivette, Boyle, Kassovitz, Kormakur... Parce qu'elle est très jolie, très blonde, doit-elle être une simple potiche pour combler l'absence de vedettes trentenaires sexy dans le paysage cinématographique français?
Cette femme qui ne sait pas vraiment ce qu'elle veut, maigrir ou grossir, être comédienne ou croire qu'elle ne l'est pas, est en fait une complexée. Du coup, elle compense en étant très studieuse. Limite perfectionniste. Elle refuse aussi cette image bourgeoise qu'on veut lui coller à la peau. Jean's baskets plutôt que tailleur et talons aiguilles. Objet de fantasme (au point de s'être retrouvée face à des producteurs de films pornos qui la voulaient absolument), Hélène de Fougerolles fait tourner la tête de ses fans. Mais ne les fait pas venir en salles pour autant. Cette femme sincère aura donc ramer 8 ans avant de profiter de ce désir frémissant pour devenir un plaisir concret. 8 ans de galère, de petits rôles, d'espoir placé en elle. De crise de confiance. Avec son BEPC et ses goûts de midinettes assez classiques, l'actrice n'a en effet pas les meilleures bases pour affronter les requins de la presse snob de Paris.
Pourtant sa beauté, regard de biche et bouche tordue, joli minois et silhouette de poupée, en font rapidement l'une des présences les plus aimées de la profession. Elle avoue encore apprendre son métier.
Elle a débuté dans une sitcom AB? genre Hélène et les garçons. Mais Hélène ce n'était pas elle. Mocky, Rivette, Berbérian la prennent pour des premiers petits rôles. Elle côtoie Bonnaire et Les Nuls, le cinéma de Philippe Harrel et joue les figurante chez Patrice Chéreau. Elle croise Marion Cotillard, une première fois dans Le garçon qui voulait qu'on l'embrasse, dix ans avant Innocence. Entre temps, les deux comédiennes auront prit leur envol.
Cédric Klapisch l'invite dans son Péril Jeune puis l'habille en mannequin dans Chacun cherche son chat. Elle commence à ponctuer son métier de rôles à la TV, de peur de ne plus travailler. Michel Deville fait alors appel à elle, au milieu d'un casting déluré. Le film est un échec. Mais elle confirme son goût pour la comédie et le décalé. Elle fait ses preuves, doucement. En 1998, elle obtient son premier premier rôle. Entre Karyo, Holgado et Arditi, Joffé la place au coeur de Que la lumière soit. Flop assourdissant. Mais les voies de Dieu sont impénétrables et elle obtient sa première nomination aux César, quelques années après un premier Prix d'interprétation en Belgique.
Cela lui donne des ailes. Elle voyage et tourne en Hongrie, en Thaïlande, en Islande. Se paye le luxe de jouer avec Claudia Cardinale (dans un court) et Leonardo DiCaprio (dans La Plage, son plus gros succès à date). De Fougerolles incarne la française chic, mais aussi l'unique objet de nos désirs. Encore et encore. La Plage, en 2000, amorce un tournant : elle devient maman, et commence à être connue des téléspectateurs. Son problème est ailleurs : le choix des cinéastes et de certains scénarii. Pour un ou deux projets bien sentis, elle est capable de se planter "grave". Ce fut le cas avec Le Prof (Alexandre Jardin) ou les gens honnêtes vivent en France (Bob Decout). Et si elle obtient des succès populaires, c'est à chaque fois grâce à des films médiocres, dans des rôles caricaturaux (Fanfan la Tulipe, Le Raid). La télévision est presque plus généreuse avec elle que le cinéma (notamment le téléfilm de Stéphane Clavier, "Si j'étais elle", où elle incarne un homme et une femme).
Polar, comédie, romance ou productions costumées, de Fougerolles se glisse dans tous les genres. Même un drame islandais où elle a enfin un rôle à sa mesure. Disons révélant son potentiel, au delà de son charme.
On l'avait bien remarqué, ce talent, chez Beineix, dans Mortel Transfert, où elle retrouvait Anglade. En prostituée de cuir et femme fouettarde, son personnage d'Olga avait réveillé les instincts cinéphiles. Si bien qu'en 2001, lorsque Rivette la choisit pour devenir la femme fatale de Va Savoir, comédie sur la fuite et les coeurs qui battent, en rivale de Balibar, elle trouve là son plus beau personnage dans son meilleur film. Au jour d'aujourd'hui. Pic de carrière, entre actrice aventureuse et comédienne romantique, elle conquiert un plus large public et savoure les bonnes critiques. Il faut attendre le début de l'année 2005 pour qu'elle retrouve un tel niveau de notoriété. Elle le doit à une paire féminine, deux premiers films. Dans Le plus beau jour de ma vie, Julie Lipinski lui sert sur un plateau le rôle de Lola, jeune femme moderne en quête de mariage. Chieuse, drôle, contradictoire, elle excelle dans le comique et insuffle son énergie. A contrario, lorsqu'elle retrouve Cotillard dans le film de Lucile Hadzihalilovic, elle est calme, froide, un peu dure. Boiteuse. Une canne à la main, Mademoiselle Edith nimbe de mystère les origines de son handicap. Le film, légèrement malsain, rejoint le Beinex dans la filmographie de Fougerolles. On la sent frémir, vouloir aborder des personnages plus complexes et plus sombres. Si la comédie lui a plutôt réussi, elle est dans l'attente d'un rôle qui la sortira de cette carapace qui fait saliver les mâles pour mettre tout le monde à ses pieds. Elle a loupé un petit rôle dans Les invasions barbares. Mais depuis qu'elle n'a plus peur de porter un film sur ses épaules ou d'incarner des femmes inquiétantes ou ambivalentes, elle passe à l'offensive. Comme Cotillard, elle s'est débarrassée de ses freins et croit plus que jamais en son avenir dans ce métier. Elle disait, invitée chez Fogiel (pour pas faire de jaloux) : "A présent, j'attaque. Je ne suis plus attaquée, c'est moi qui attaque. A 30 ans, je me sens enfin la force de faire ce que j'ai envie". Va savoir, elle pourrait un jour avoir un César...
vincy
haut |
|
|
|