Coeurs transis ou coeurs brisés, en un clic fixez sa cote.
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SUR LE PODIUM
Comment exister lorsque l'essentiel de sa notoriété s'est fabriquée à partir du succès collectif d'une troupe? Le Splendid a su y répondre individuellement en une vingtaine d'années d'itinéraires distincts. Les Robin des bois sont encore en formation post-séparation. Le nordiste Jean-Paul Rouve a pris de l'avance en se plaçant, avec Marina Foïs, sur la première marche. Il aligne trois succès au Box office (Monsieur Batignole, Un long dimanche de fiançailles et surtout Podium), un César et une nomination.
Voie classique. La province, celle de Karnaval, entre bières et belgitude. Cours de théâtre dans le coin, cours Florent pour profiter de Paris. Un prof nommée Isabelle Nanty. En 1989, 22 ans déjà, il croise ses comparses des Robin. Sans "s", comme pour les César. La farce prend bien : "Robin des bois d'à peu près Alexandre Dumas" fait le bonheur des spectateurs. Et l'ex-Nul, autant dire Dieu, Dominique Farrugia, précurseur de l'humour à l'américaine dans le cathodique, premier groupuscule terroriste du rire du petit écran à avoir cartonner au cinéma, les repère. ils deviennent des vedettes du câble puis de canal. Etape obligée dans les années 90 pour n'importe quel comique avant de plonger dans le grand bain.
Rouve se fait dont connaître en présentateur de "Foun de", "CinécinécinéMa", "Face à la France", ou en Vercingétorix, drôle d'inventeur, baba cool, tatoueur, veilleur de nuit, traducteur espagnol, Cartouche (le bandit), René Bousquet, top model, Juge, Merlin l'enchanteur, candidat politique, voisin de Merdocul, cuistot, Bee Gees, Alain Prost, Pierre Palmade ... Transformiste, il aime se déguiser. Mais il excelle en présentateur TV, à la fois neutre et pas trop beau, lisse mais justement bien décalé en profondeur. Pas très loin de Chabat, jusque dans la variété des rôles et des cinéastes qui vont l'employer.
Chabat justement le choisit pour quelques passages dans Astérix et Obélix : mission Cléopâtre. Mais en 1999, à 32 ans, dix ans après sa rencontre avec les Robin, il fait ses premiers pas au cinéma, dans Karnaval. Retour à la case départ : Dunkerque, sa ville natale. Si la comédie lui semble naturelle (en meilleur ami bourge chez Chatiliez, chez Kad et O, entre potes), il a la chance de tomber dans une période où le cinéma français ne veut plus prendre de risques : en investissant sur des comédies, son genre de prédilection, en exigeant des castings cathodiques.
Mais la chance de Rouve aura été d'être choisi dans le rôle de gendre collabo dans le drame de Gérard Jugnot, Monsieur Batignole. César. Son physique, pour ne pas dire sa gueule, peuvent lui permettre d'être le paysan sympa du Temps des Porte-Plumes comme le séducteur manipulateur d'Un petit jeu sans conséquences. Le comédien parvient parfois à sauver une oeuvre de sa médiocrité, à voler des scènes, à imposer une émotion souvent bienvenue. Evidemment, tous ses choix ne sont pas des réussites. Mais pour lui il s'agit aussi d'expériences inestimables, comme de jouer avec Gérard Depardieu. De fait c'est autre chose que jouer un brigadier dans Julie Lescaut.
Rouve aime les tournages, déteste la synchro, court les jupons. En fait l'homme manque de confiance en lui, essaie de ne pas vieillir trop vite (il décolle à peine qu'il a déjà 40 berges), reste honnête. Car paradoxalement il n'est pas prêt à tout pour un tôle. Pas assez excentrique pour cela. Il préfère s'amuser. Scolairement. Apprenant bien ses textes. Lui qui admirent les parcours longue durée, ne cherche pas les coups. Bien sûr Corneau ou Scorsese, tentations de film noir?, l'appelleraient, il accepterai sans réfléchir. Fasciné par la F1, on le voit plutôt dans un road movie qui prend son temps. Ou en postier à vélo chez Jeunet. Clin d'oeil à Tati.
Alors non ce n'est pas celui qui réussit le mieux au sein des Robin. Certains préfèrent la réalisation, d'autres le théâtre ou encore faire des bébés. Mais, passe-partout et talentueux, il parvient à se fondre dans des univers très différents. Blond ultime (et frère de Foïs, ce qui n'a rien d'innocent) d'une tribu de l'âge de Pierre dans RRRrrrr!!!, il est surtout sosie incroyable de Michel Polnareff (le cul à l'air en moins, il a l'air pudique) dans le hit Podium. Ami fidèle, homme fou, aliéné par ses délires et souvent pragmatique au nom de l'amour, Rouve, ex emmerdeur des sketches télévisuels, fait ce qu'il veut. On a du mal à le croire quand il clame : "ma vie c'est de la merde, je l'échangerai bien contre celle du roi du Maroc..." Ou celle du père d'Edith Piaf (chez Dahan), de pseudo nanti nocturne et mondain dans un film décalé belge. Peu importe, Rouve veut juste être un autre. Pour se fuir lui-même?
vincy
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