David Lynch, Lion d'or et Palme d'or, n'a pas tourné de long métrage depuis 2006. Une longue absence. Heureusement il nous a offert une suite à Twin peaks pour la télé. Et on peut voir ses photos fétéchistes dans l'exposition de Louboutin au Palais de la Porte dorée. Il vient aussi de terminer un court métrage. Elephant Man ressort cette semaine en salles.



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LA COMBATTANTE





Des deux Adèle du cinéma français contemporain - Exarchopoulos (qui a surtout eu la chance de tourner pour Kechiche, meilleur raccourci vers le devant de la scène quand on est une jeune comédienne) et elle -, Adèle Haenel a un physique plus atypique que la plupart de ses jeunes consœurs, ce qui lui permet de marquer immédiatement les esprits.

Depuis ses tout débuts au cinéma à l’âge de 13 ans (dans Les diables de Christophe Ruggia, où elle est saisissante d'intensité), elle tourne avec parcimonie (se ménageant notamment de longues pauses pour passer son bac, puis enchaîner prépa HEC et école de commerce), rendant chacune de ses apparitions plus précieuses. Cet apprentissage de la patience et de cette exigence se retrouvera dans ses choix. En 9 ans, la comédienne aura tourné 21 longs métrages.

Le premier choc a lieu en 2007, lorsqu’elle crève l’écran en adolescente découvrant sa sexualité dans le premier film de Céline Sciamma, Naissance des pieuvres. Elle apparaît immédiatement comme l’un des espoirs du cinéma français et obtient d’ailleurs une nomination aux César. Pas de chance, elle tombe face à Hafsia Herzi qui remporte haut la main la récompense (toujours grâce à Kechiche).

Ce n’est que partie remise pour Adèle Haenel qui fait son grand retour à Cannes, après quatre ans d’absence sur les écrans, en 2011, avec pas moins de trois films sélectionnés dans les différentes sections. Brelan d’as qu’elle répète en 2019.
Elle est la meilleure amie de Lola Créton dans En ville de Valérie Mrejen et tient l’un des rôles principaux d’Après le sud de Jean-Jacques Jauffret. Mais c’est dans L’apollonide, souvenirs de la maison close de Bertrand Bonello, en compétition, que toute la variété de son jeu se révèle. Bonello et Haenel se recroiseront dans Nocturama en 2016. Pour l’instant, dans sa maison close, elle y est charnelle et envoûtante, étrangement à son aise dans cette atmosphère confinée d’une époque moribonde. Le film lui vaut une nouvelle nomination aux Cesar (cette fois, ce sont Naidra Ayadi et Clotilde Hesme qui l’emportent) et le Prix Lumière du Meilleur espoir féminin (décerné par la presse étrangère à des films français ou francophones).

La fille connue

Gloire montante, La jeune actrice est lancée, et désormais plus rien ne peut l’arrêter. Elle ne fait peut-être pas (encore) la couverture des magazines, mais elle multiplie les projets, si possible dans des univers variés et singuliers, comme ceux de Sylvie Verheyde (Confession d’un enfant du siècle avec Pete Doherty et Charlotte Gainsbourg), Catherine Corsini (Trois mondes avec Clotidle Hesme et Raphaël Personnaz), Elie Wajeman (Alyah avec Pio Marmaï) ou encore Anton Tchekhov dont elle joue La mouette à Avignon. Elle participe également au projet un peu fou du cinéaste canadien Guy Maddin (La chambre interdite) consistant à tourner à sa manière des films perdus de l’époque du muet. Elle s’inscrit aux génériques de films pas forcément populaires, mais critiques et cinéphiles remarquent son allure caméléon, sa voix grave et son regard hypnotique.

En 2013, c’est Katell Quillévéré qui lui offre un très beau rôle dans Suzanne, où elle est la sœur loyale et aimante du personnage interprété par Sara Forestier, déchirée par son absence, mais jamais démissionnaire. On l’imagine comme un roc inébranlable auprès duquel sa sœur vient se ressourcer de manière inconditionnelle. Une composition impeccable, tout en retenue, qui fait d’elle (sans qu’elle ne vole jamais la vedette à personne) le personnage pivot du film. Car elle est humble, discrète. Même dans les interviews, elle reste pudique et sait marquer son territoire. Elle obtient le César du meilleur second-rôle féminin. Profite de la tribune pour déclarer sa flamme à Céline Sciamma, faisant ainsi un coming-out public. « "J'ai pas envie d'entrer dans l'intime, ça me saoule" répète-t-elle souvent. Apôtre de la sincérité, la jeune femme affirme : « J'ai pas envie d'être un porte-drapeau, moi, j'ai envie de faire des films et du cinéma plus que de faire de la politique, mais c'est quand même mélangé. »

Une fille en liberté

Après une telle démonstration de sa force intérieure, à la fois subtile et un peu bravache, on la retrouve en 2014 dans Les combattants de Thomas Cailley où elle y est une fois de plus un bloc de volonté, femme indépendante et égale des mâles, tout entière tendue vers le but qu’elle s’est fixée. Cette fois, elle est couronnée du César de la meilleure actrice, en plus d’être distinguée par le Prix Romy-Schneider. Autant dire qu’en quelques années, Adèle Haenel est devenue incontournable. Et, de fait, certains choix son politiques. Pour l’instant, elle a la classe de celle qui, recevant un César pour un film, rend hommage à un cinéaste pour un autre film.

Le tournage de L’homme qu’on aimait trop avec André Téchiné, en bon explorateur de la nature humaine, a dévoilé d’autres facettes de son talent encore brut. Elle sait amener les émotions même les plus intérieures à l’image. Son nom commence à rassurer les producteurs, pour des œuvres audacieuses (Les ogres de Léa Fehner, en saltimbanque) comme pour des grands noms du cinéma mondial (La fille inconnue des Frères Dardenne, en docteur culpabilisante).

Elle marque davantage les esprits dans Orpheline d’Arnaud des Pallières, où, ironie, elle partage l’affiche avec Adèle Exarchopoulos. Mais, en 2017, c’est en activiste d’Act Up dans 120 battements par minute de Robin Campillo (Grand prix à Cannes, césar du meilleur film) qu’elle démontre sa capacité à être entière, passionnée, engagée, intègre, à l’écran comme en promo.

Désormais, elle est dans la catégorie A. Pour la fresque coûteuse de Pierre Schoeller, Un peuple et son roi, elle devient le symbole des citoyennes de la Révolution. Cette même année, elle épate davantage en flic et veuve de flic, mère célibataire, embrigadée dans une spirale infernale et loufoque : En liberté de Pierre Salvadori, avec Pio Marmai et Audrey Tautou, lui permet de couvrir un spectre large allant de la comédie au romantisme en passant par le drame.

La fille en feu

Tout le monde se l’arrache : de Quentin Dupieux pour donner la réplique à Jean Dujardin (Le daim, Quinzaine des réalisateurs) à la jeune Aude-Léa Rapin pour son premier long (Les héros ne meurent jamais, Semaine de la Critique). Mais c’est bien sa collaboration (fusionnelle ?) avec Céline Sciama, dans Portrait de la jeune fille en feu dont on attend d’être brûlé par son incandescence.

Cette sportive, qui assume sa force tout en prenant plaisir à exposer ses fragilités, rejette le stéréotype et amène toujours ses personnages dans une zone floue entre le masculin et le féminin. Femme « virile », elle avoue dans une interview : « On a le droit d’inventer ce qu’on est. Il y a en ce moment un discours très réactionnaire qui circule, sur ce qu’est un homme, une femme. » C’est sans doute là le secret du jeu d’Adèle Haenel : dans sa manière moderne de ne pas sexuer ses personnages.

MpM, EN


 
 
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