Toutes les guerres ont eu leur film. Cette première guerre mondiale est née lorsque le premier long métrage en couleur (" The world the flesh and the devil ") apparu. Il n'est pas étonnant que la Grande guerre inspira très vite des réalisateurs comme DW Griffith. " Hearts of the World ", une propagande assez germanophobe avec Lilian Gish, fut tournée entre Hollywood et une Europe en plein conflit. Les allemands y sont brutaux et cyniques, presque cariacturaux. Il s'agit du premier grand film hollywoodien sur cette guerre. La star Lilian Gish y pleure sa maman, erre au milieu d'un champ de bataille. Commandé par le British War Office Cinematographic Committee pour sensibiliser les américains et les documenter sur leur propre participation au conflit, on peut dire déjà que les images sont utilisées pour manipuler l'opinion dans un but politique, à travers une fiction.
La même année, Abel Gance, pas des moindres donc, réalise " J'accuse ". Une version sonore suivra d'ailleurs en 38. Le film prend place dans les tranchées avec deux amis qui se font un serment. Le film a un propos pacifiste. Les morts reviennent à la vie pour empêcher la guerre... Déjà, on constate que cette guerre aura produit tant de pertes, tant de traumatismes, que les auteurs se sentent obligés de la critiquer. Choisir la première guerre mondiale en décor, c'est bien appuyer sur un discours à la fois héroïque et humaniste, pacifiste et horrible.
En tant que décor, elle fut utilisée maintes fois. " The Big Parade ", de King Vidor (1927), comporte quelques unes des scènes les plus impressionnantes sur cette guerre.
En 1930, environs 5 films majeurs sortent avec cette guerre en toile de fonds. " Hell's Angels ", de Howard Hughes, avec Jean Harlow, est une histoire classique de deux amis séparés par la guerre (idée reprise dans le divertissant " As des As " de Gérard Oury). Hughes, passionné d'aviation au point de se lancer dans cette industrie, filme avec réalisme les exploits aériens. Le tournage durera deux ans et usera 100 cascadeurs et 35 cameramen. Hughes se blessera grièvement à ce moment là. Il utilise des avions de l'époque et des vétérans pour les piloter. Avec un coût à l'époque de près de 4 millions de $, il en perdra près d'un million et demi, à cause d'un scénario trop pauvre.
Hughes ne sera pas le seul à être tenté par cette première guerre avec des avions. Car la guerre est spectaculaire : mondiale (de la Turquie à la Normandie), terrestre et aérienne, ... Ces pionniers volants, héros pilotant de nouvelles machines, firent le bonheur des scénaristes.
Howard Hawks (avec Douglas Fairbanks Jr.) s'y intéressera en 1930 dans " The Dawn Patrol ", Oscar du meilleur scénario. C'est dans un autre " The Dawn patrol " (1938) qu'Errol Flynn et David Niven deviennent des as du ciel... On reste dans le divertissement. Dans " The Eagle and the Hawk " (1933), on découvre un jeune Cary Grant en pilote (encore!) tombant amoureux de Carole Lombard. Seul le casting est attirant.
La Première Guerre Mondiale est aussi un sujet de suspens et de polar. La version de 1931 de " Mata-Hari " avec Greta Garbo par exemple. L'espionne sera aussi incarnée par Marlene Dietrich et Jeanne Moreau. Et surtout, " The secret agent " d'Alfred Hitchcock (avec John Gielguld et Madeleine Carroll), qui mélange habilement politique, espionnage et contexte historique dans un pays neutre, la Suisse. On est à peu d'années de la seconde guerre mondiale. déjà le cinéma se sert de la Grande Guerre pour ne plus divertir mais bien alerter les populations ou faire de la propagande. Sombres prémonitions.
Cependant, il faudra attendre 1951, pour que le summum soit atteint dans le style "spectacle divertissant".
John Huston réunit Humphrey Bogart et Katharine Hepburn, deux des plus grandes stars du siècle, dans " The African Queen ". Ce film, devenu un classique, donnera un Oscar à Bogie. Il y est un alcolo devant aider à passer une missionnaire chrétienne. Les obstacles sont nombreux : rapides, soldats allemands, leurs antagonismes mutuels. Un must dans le genre aventureux. Quelques autres films suivront : " The Blue Max " (avec George Peppard, James Mason et Ursula Andress), l'un des premiers films américains sur les Allemands pas forcément traités comme de simples ennemis barbares. Le film accentue davantage le rapport de classes que la différence de nationalités.
On retrouvera un officier allemand et as des as dans " The Red Baron ", réalisé par le célèbre producteur Roger Corman. Une série B de 71 par le pape de la série Z.
Le rire est présent dans " La Grande Guerra ", de Mario Monicelli, avec Alberto Sordi et Vottorio Gassman. Ce film obtient le Lion d'Or à Venise en 59, en plein âge d'or du cinéma italien. . L'Italie dans la guerre donne aussi " E la nave va ", de Federico Fellini, en 83. L'histoire d'un paquebot de luxe rempli de gens insouciants et folkloriques, devant sauver des réfugiés serbes victimes de la guerre qui vient de s'annoncer. belle métaphore pleine d'excentricités…
En 96, Richard Attenborough réalisera une guimauve sans goût avec Sandra Bullock et Chris O' Donnell, " In love and war ", le remake d'un des plus beaux films sur cette guerre, " A farewell to arms ".

Vincy