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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Aardman
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Production : Aardman Animations, DreamWorks Animation Distribution : UIP Réalisation : Steve Box, Nick Park Scénario : Steve Box, Nick Park, Bob Baker, Mark Burton Montage : Gregory Perler, David McCormick Photo : Dave Alex roddett, Tristan Oliver Son : James Mather, Ed Colyer Musique : Julian Nott, production Hans Zimmer Effets spéciaux : Patty Eason, MPC Durée : 85 mn
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Peter Sallis : voix de Wallace
et bien non : Gromit n'a pas de voix
Ralph Fiennes : Lord Victor Quatermaine
Helena Bonham Carter : Lady Tottington
Peter Kay : PC McIntosh
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Wallace & Gromit: The Curse of the Were-Rabbit (Wallace et Gromit : Le mystère du Lapin-Garou)
/ 2005
12.10.05
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Aardman, easy...
Un peu moins cher que Chicken Run, énorme hit de l'an 2000 (225 millions de $ dans le monde, dont la moitié en Amérique du nord), Wallace et Gromit - le mystère du Lapin-Garou, risque de rapporter autant. Pour ne pas dire plus. Car Chicken Run avait reçu les honneurs des prestigieux critiques de New York et Los Angeles au titre de meilleur film d'animation. mais point d'Oscars, de Golden Globes ou de British Awards. Wallace et Gromit (donc W&G en clair) part avec un meilleur capital. Un budget plus modeste (30 millions de $ tout de même), deux Oscars et une nomination pour chacune de leurs trois aventures en format court (Une grand excursion en 90, Un mauvais pantalon en 94 et Rasé de près en 96), une publicité pour Renault (un kangoo qui ne remplacera pas ici le traditionnel van d'Austin), une notoriété mondiale chez les petits, moyens et grands. D'autant qu'en 2002, les créatifs d'Aardman - le studio à l'origine de la saga - décident de lancer une série pour Internet (à l'époque la fiction avait la vedette sur le web). Wallace et Gromit : Cracking Contraceptions fait un carton sur le portail américain Atom Films, avec un épisode gratuit et les neuf autres en accès payant, avant que l'ensemble ne soit diffusé sur un DVD. De même, pour supporter le coût et la production longue durée des longs métrages, le studio britannique s'est allié au géant indépendant, DreamWorks SKG. De quoi lui aussurer une vaste distribution américaine, surtout après ses succès dans le domaine de l'animation 3D.
Même si il y a des effets numériques (environ 700 plans dopés à la technologie, dont un logiciel gommant les empreintes des doigts), la spécificité des productions Aardman réside dans l'artisanat. Les fonds d'écran sont peints à la main. Et donc des tonnes de colle et de pâte à modeler... Pour faire 85 minutes de film, cela a pris 5 ans. Avec un long temps de démarrage et plusieurs décalages.
Les carottes sont cuites
Dès le triomphe de Chicken Run, Aardman ambitionne de transposer la fable de La Fontaine "Le Lièvre et la Tortue". La sortie est repoussée mois après mois. Divers différents artistiques - scénario, réalisation - coulent l'adaptation. Il en restera des essais de lapin... Fin 2003, le tournage du nouvel opus démarre. On apprend juste que les héros sont les mondialement célèbres Wallace & Gromit. Le deal avec DreamWorks se base sur cinq films, à ce rythme Aardman ne finira pas son contrat avant 2020... De réécriture (Victor Quatermaine était le fils de Lady Tottington avant de devenir son prétendant) en petits retards, le tout dans un secret mieux protégé que l'identité du méchant, la sortie est décalée d'un an pour coïncider avec Halloween, parfaite date pour une histoire d'horreur légumière, où les citrouilles ont la mort aux trousses.
Et le clin d'oeil à Hitchcock n'est pas innocent. Car les aventures de W&G ont toujours fait référence à des genres cinématographiques. Celui-ci n'y échappe pas. "Nous avons mis du temps à trouver un concept qui tienne la route. Nous étions ravis d'adresser ce clin d'oeil aux films d'horreur Universal des années 30 et 40," raconte Nick Park, créateur, auteur, réalisateur. Un film d'horreur végétarien... D'ailleurs le premier titre était "The Great Vegetable Plot". Le titre varie toujours, selon les pays. Sortilège chez les anglo-saxons, mystère chez les Français, parfois Wallace & Gromit est intégré dans le titre, parfois il n'est qu'un chapeau au dessus du nom du film. Et finalement tout le monde s'en fout puisque c'est LE film avec Wallace et Gromit. "Les gens vous diront que Gromit est le cerveau du tandem..." explique Peter Sallis, la voix de Wallace, l'inventeur farfelu. Autres voix vedettes du film : Helena Bonham-Carter (qui vocalise aussi chez Tim Burton en mariée d'outre tombe) et Ralph Fiennes (en colonialiste cupide).
Colosse aux pieds d'argile
Car la différence entre le film et les courts précédents se situe bien dans le nombre de personnages croisés par nos héros. Une créatrice de figurines (Jan Sanger) a du peupler le village, tout en devenant leur costumière, coiffeuse. Chaque protagoniste est moulé avant d'être peints à la main. Il faut après cela "d'innombrables heures pour donner vie à ces figurines, manipulées à une échelle millimétrique." Une quarantaine de citadins, avec une garde robe complète pour l'extravagante Lady Tottington. En plusieurs étapes : une armature métallique qui sert de squelette, la fabrication d'une pâte à modeler spéciale et très résistante et moins lisse que celle de Chicken Run, ... "Cela montre que nos personnages sont réels et tangibles," justifie Peter Lord, l'autre créateur du duo. "Ces petites imperfections contribuent à un look artisanal que le public apprécie. On voit qu'ils sont faits main, avec soin et amour" renchérit le producteur Sproxton. Après on duplique les personnages dans des poses variées, avec différents costumes. Wallace a 35 clones (Houellebecq serait heureux), par exemple. A cela s'ajoutent les accessoires - oreilles, yeux, mains... - en cas de dégradation, ou des bouches pour la synchronisation des dialogues.
C'est seulement là que durant deux ans les animateurs ont pu s'amuser à jouer avec les miniatures. Un seul déplacement d'un seul personnage peut impliquer jusqu'à 24 postures différentes par seconde. La pâte doit être pétrie, remise en forme. Au total une journée de travail peut s'achever avec une dizaine de secondes en boîte. Peter Lord précise : "C'est un travail au ralenti, mais avec tous les risques du live. Un animateur consacrera peut-être une journée entière à une réplique de deux seconde, mais il faudra lui réussir du premier coup. Un plan d'ensemble nécessitera couramment une semaine d'efforts, et lorsque celle-ci touche à sa fin, la tension est au summum, car la moindre erreur flanquerait par terre huit jours de travail." Ici refaire une prise c'est impossible.
Être bonne pâte ne suffit pas
Le Lapin-garou donnera du fil à retordre avec sa fourrure qui empêchait le contact tactile. Le monstre bouge grâce à une machinerie interne. C'est la véritable révolution d'Aardman : ils ont fait appel à d'autres techniques, incluant l'imagerie numérique. Nick Park se justifie : "La pâte à modeler est un matériau limité, qui vous interdit, par exemple, de simuler l'eau, la fumée, le brouillard." Mais aussi le Mind-O-Matic et le Bun-Vac 6000, machines inventées par Wallace et qui nécessitent l'usage du virtuel. Faire voler trente lapins sans qu'ils se cognent n'est pas possible manuellement. Mais Jason Wen, animateur de la séquence, ajoute : "J'ai animé à la main tous ces tente lapins en leur imprimant de jolis mouvements des pattes ou des oreilles qui rendent le plan plus drôle". de même, Steve Box, co-réalisateur du film, se rappelle : "L'infographie a énormément enrichi le visuel. Observez seulement cette légère traînée de brume que laisse dans son sillage le vicaire en se rendant à l'église. Il est loin le temps héroïque où nous nous efforcions de créer ce genre d'effet en agitant des petites boules de coton au bout d'un fil."
700 légumes modelés, une centaine de plantes reproduite, des tapisseries peintes, une voiture modèle réduit, deux réalisateurs, deux directeurs photo maniant les projecteurs de scène plus malléables que ceux de cinéma... A côté Cléopâtre c'était un film indépendant! Sans omettre la musique. Obligés de conserver l'air entraînant et reconnaissable entre tous de Julian Nott, les studios ont fait appel au compositeur hollywoodien Hans Zimmer pour produire une partition plus symphonique, plus ample. Nott a ainsi travaillé avec 90 musiciens pour fournir près de 85 minutes de musique en 19 morceaux, dont certains dépassent les quatre minutes.
Et, c'est l'époque qui veut ça, le film sort en couple avec le jeu vidéo (Play Station, X-Box), où vous pouvez vous incarner en Wallace, en Gromit ou en Hutch le lapin, pour contrer quelques ennemis redoutables (un gnome de jardin, un épouvantail mécanique).BOF, Jeu vidéo, livres, DVD... Il faudra bien cela pour compenser la destruction des studios qui ont vu naître les personnages. Un incendie a ravagé un entrepôt d'Aardman Animations enter la sortie américaine et la sortie française du film. Matériels, figurines, décors, accessoires : tout est partie en fumée. Point de musée possible. Il ne restera donc que les films... Numéro 1 au B.O., en cendres dans les studios. Nick Park relativise : "Même si c'est une collection précieuse, nostalgique et qui présente de la valeur pour la compagnie, au regard d'autres tragédies, ce qui s'est passé aujourd'hui n'est pas très grave." Car la richesse est ailleurs : W&G est devenu un produit bien rentabilisé à l'export pour le Royaume Uni. Il reste à la France de faire aussi bien avec son Kirikou...
vincy
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