Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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 (c) Ecran Noir 96 - 24


  

Production : Agat films & Cie
Distribution : Diaphana
Réalisation : Robert Guédiguian
Scénario : Ariane Ascaride, Marie Desplechin, Robert Guédiguian
Montage : Bernard Sasia
Photo : Pierre Milon
Format : 35mm
Décors : Karim Hamzaoui
Son : Laurent Lafran
Musique : Arto Tunçboyaciyan
Costumes : Anne-Marie Giacalone
Maquillage : Mayté Alonso-Pedron
Durée : 125 mn
 

Ariane Ascaride : Anna
Gérard Meylan : Yervanth
Chorik Grigorian : Schaké
Romen Avinian : Manouk
Simon Abkarian : Vanig
Jalil Lespert : Simon
Marcel Bluwal : Barsam
 

Site Officiel
Armenie au cinéma
 
 
Le Voyage en Arménie


France / 2006

28.06.06
 

Robert Guédigian, un cinéaste public





Robert Guédiguian qui fut si longtemps attaché à l’Estaque – le quartier de Marseille qui l’a vu grandir et principal acteur de l’essentiel de ses films – a finalement eu une subite envie de partir loin des frontières françaises. Pour retrouver ses racines arméniennes ? Pas seulement. « Je n’ai jamais nié mes origines ni mon nom. Mais ce n’était ni une préoccupation ni une revendication ». Il n’a jamais oublié d’où il vient et ses films recèlent toujours quelques clins d’œil à la patrie de ses ancêtres. Mais l’idée du Voyage en Arménie vient de plus loin. En 2000, il s’est rendu avec son épouse, Ariane Ascaride, à une rétrospective de ses films à Erevan (capitale de l’Arménie). L’accueil fut si chaleureux, le pays si troublant qu’ils en sont tombés amoureux, l’un comme l’autre. « Par endroit, Erevan, c’est l’Estaque de mon adolescence. J’avais parfois l’impression de me promener dans le décor de Dernier été, où se mélangent ville et campagne, friches et autoroutes, habitants et animaux, comme dans beaucoup de pays en voie de développement du reste ». Fort de la puissance que peut occuper l’engagement dans le cinéma, il répond volontiers à la demande des Arméniens de faire ce long métrage. Il n’y a pas un endroit qu’on ait visité sans qu’on nous dise : faites un film ici parce qu’on a besoin d’être visibles, parce qu’on a besoin d’exister, parce que ça ne va pas… ». L’idée a fait son chemin et se concrétise lorsque Ariane Ascaride joue le rôle d’une Arménienne dans Brodeuses d’Elenore Faucher et qu’elle rencontre cette figure paternelle dans un cordonnier arménien. L’histoire prend forme et le voyage peut donc commencer…
Après de nombreux allers-retours pour se nourrir de choses vues et ressenties, Ariane Ascaride fait la connaissance de Marie Despleshin (auteur de « La Vie sauve » en 2005) lors d’un festival. Cette dernière n’avait jamais écrit pour le cinéma mais elle n’était pas contre une nouvelle aventure, sorte de challenge. « Elle travaille beaucoup et très bien avec les autres », souligne le réalisateur, « Elle a eu un rôle essentiel pour tisser la toile, pour synthétiser les envies d’Ariane et les miennes, pour faire cohabiter nos intérêts de récits », conclut-il.
Fidèle à son habitude, Robert Guédiguian réunit une incroyable galerie de portraits incarnés par des acteurs français et d’origine arménienne (Simon Abkarian, Serge Avédikian), des professionnels ou non embauchés sur place. « Quitte à tourner en Arménie, autant faire travailler de vrais acteurs, même pour de tous petits rôles, par obligation déontologique et pour leur faire gagner un peu d’argent ». Attaché à « sa famille cinématographique », on retrouve sans surprise son épouse, Gérard Maylan, Jean-Pierre Darroussin (qui ne fait qu’une apparition) sans oublier le nouveau de la bande, le jeune et talentueux Jalil Lespert. Tous ont une carrière atypique et une filmographie éclectique, souvent guidées par l’engagement et la prise de position.
Ariane Ascaride n’est autre que la muse de ce Marseillais militant depuis 30 ans. Elle apparaît pour la première fois à l’écran en 1977 dans La Communion Solennelle de René Féret, puis enchaîne avec les longs-métrages de son mari comme Dernier été en 1980, puis Rouge Midi et Ki Lo Sa. Mais il faudra attendra la sortie de Marius et Jeannette en 1997 pour que le public soit au rendez-vous et que la célébrité l’accompagne. Elle obtiendra d’ailleurs le César de la meilleure actrice pour ce rôle en 1998. Sollicitée par de nombreux metteurs en scène, elle travaille volontiers avec des cinéastes engagés tels que Gérard Mordillat (Paddy), Dominique Cabréra (Nadia et les hippopotames) et le tandem Ducastel-Martineau (Drôle de Felix, Ma vraie vie à Rouen). Ayant elle-même vécue des relations difficiles avec son père, c’est tout naturellement que l’égérie guédiguienne incarne Anna, une femme accomplie à la recherche tant de son créateur (une figure paternelle jouée par Marcel Bluwal qui n’est autre que son professeur de théâtre lorsqu’elle était au Conservatoire) que d’une identité. Une femme de tempérament qui cache une autre corde à son arc, celle de l’écriture, puisqu’elle co-signe le scénario de Voyage en Arménie avec Marie Desplechin.
Dans sa distribution, Guédiguian ne pouvait oublier son ami de toujours, Gérard Meylan. Infirmier de nuit quand il n’endosse pas un rôle, il se fait rare sur le grand écran. Il devient au fil des années un peu l’alter ego du réalisateur marseillais, qui lui confie des rôles d’observateur un rien désabusé, comme dans le sombre La Vie est tranquille. Une de ses prestations les plus mémorables reste celle de Marie-Jo et ses deux amours dans lequel il est l’amant passionné d’Ariane Ascaride. Fidèle mais exigeant, il se permet quelques incursions en dehors de la « famille » Guédiguian pour être sous la direction de réalisateurs à l’engagement marqué comme René Alliot ou Jean-Henri Roger, ou dans des univers aussi personnels que ceux de Claire Denis ou Frédéric Videau. Mais c’est dans Mon père est ingénieur qu’il retrouve son auteur fétiche, dans lequel il campe un personnage antipathique, raciste et violent.
Mais Robert Guédiguian n’oublie pas la jeune génération d’acteurs montant. Jalil Lespert, est entré dans le cercle fermé du Marseillais par la grande porte, en incarnant un journaliste (inspiré par George-Marc Benamou) dans Le Promeneur du Champ de Mars. Il vient confirmer son talent et sa sensibilité de comédien en jouant un médecin humanitaire dans Voyage en Arménie. Nommé aux Césars 2001 comme meilleur espoir masculin pour le rôle d’un étudiant en école de commerce dans Ressources Humaines, il a depuis enchaîné les tournages en affichant une prédilection pour les rôles de composition. Tour à tour un sensuel jardinier dans Sade de Benoit Jacquot, un paumé obsédé par le culturisme dans Vivre me tue de Sinapi, puis un émigré italien fuyant le régime fasciste dans Bella Ciao, et enfin un gigolo dans Pas sur la bouche d’Alain Resnais. Caméléon, il est devenu un des acteurs les plus en vue de sa génération.
Un autre personnage se fait une part belle dans ce voyage initiatique. Muet mais omniprésent, c’est le Mont Ararat, avec ses deux montagnes dans le creux duquel, selon la légende, l’Arche de Noé se serait arrêtée. « C’est le vrai drapeau de l’Arménie ou de l’arménité », souligne le réalisateur. Mais le mont fait figure de rêve inaccessible car en Turquie, un territoire impossible à traverser. « Bizarrement, je crois que c’est bien qu’on ne puisse pas l’atteindre et c’est aussi pour cela que j’insiste sur ce paysage mythique (…) Ca stimule l’imagination de ne pas pouvoir réaliser tous ses rêves ». Atom Egoyan en avait fait le titre de son film en 2002 (Ararat) pour parler du génocide perpétré par les Turcs en 1915. Au cours de sa carrière, le réalisateur égyptien a mis en scène des personnages en quête de souvenir, d’identité, de passé, de racine dans des films qui ne sont pas structurés de manière linéaire. Ses origines arméniennes, sa naissance en Egypte, et sa vie passée au Canada y sont sans doute pour quelque chose. Comme Guédiguian, il a multiplié les voyages dans sa terre d’origine afin de puiser les ressources historiques et humaines qu’il finira par inclure dans ses films, jusqu’à réaliser son rêve de tourner en Arménie avec Calendar. Mais Guédigian a pris le contre-pied de son prédécesseur en voulant montrer l’Arménie d’aujourd’hui, est bien vivante malgré les difficultés de la transition économique, de la guerre avec son voisin azéri pour le contrôle du territoire du Haut-Karabakh (soumis à un blocus par la Turquie) et les stigmates du génocide.
 
Marie
 
 
 
 

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