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Le retour d'une légende planétaire
Après Batman et les X-Men, c'est au tour de Superman de faire son grand retour. Absent du grand écran depuis 1987 (Superman IV, le face à face de Sidney J. Furie), le Superhéros venu de la lointaine planète Krypton pour éclairer les Hommes et sauver le monde s'offre un come-back tonitruant alimenté par les polémiques autour du choix de son nouvel interprète et la promesse d'effets spéciaux renvoyant ceux des précédents opus au stade de trucages grossiers.
Depuis sa création dans les années 30 par Jerry Siegel et Joe Shuster et la publication des premiers comics le mettant en scène dans DC comics, Superman est devenu une légende planétaire : séries télévisées, bandes dessinées, figurines, longs-métrages� le Superhéros au sigle rouge et jaune se décline depuis près de soixante-dix ans sur tous les supports, pour tous les publics et sous toutes les latitudes. Pourquoi un tel engouement ? Pour le producteur Chris Lee, Superman incarne tout simplement un idéal moral transcendant. "Il est le premier être venu d'une autre planète à possèder les qualités et les pouvoirs dont rêvent les humains", explique-t-il. "Il y a, bien sûr, sa capacité à voler, mais aussi sa puissance physique et sa bonté."
Bryan Singer insiste lui aussi sur les trois caractéristiques principales du héros : "Faire le bien, affronter tous les défis, pouvoir voler dans les airs� nous en avons tous rêvé à un moment de notre vie." Rêvant de lui ressembler, les fans de Superman l'admirent donc envers et contre tout. Ils sont même prêts à lui pardonner ses pires défauts : son aspect mièvre de boy-scout toujours prêt à aider son prochain, sa psychologie rudimentaire et surtout sa dissimulation sous l'apparence de Clark Kent, globalement le personnage le plus ridicule et le plus ingrat du monde. Il faut une sacré dose d'admiration pour accepter de voir l'Homme d'acier travesti en pauvre type maladroit, piteux et si transparent que personne ne remarque jamais son absence. Parmi les spectateurs récalcitrants, certains ne se sont d'ailleurs toujours pas remis du fait qu'une simple paire de lunettes et un sourire un peu niais suffisent à tromper le monde entier sur l'identité du Grand homme�
Superman revu et corrigé par Bryan Singer
Mais passons. Amateur absolu ou spectateur occasionnel dubitatif, il faut compter avec le retour de Superman devant la caméra du généralement talentueux Bryan Singer, à qui l'on doit l'excellent Usual Suspects et les deux premiers X-Men, eux-aussi plutôt réussis. La particularité de Singer est d'aborder les films qu'il réalise, même les plus formatés, avec un ton très personnel. "Superman et moi avons un point commun : nous sommes des enfants adoptés et des fils uniques", explique-t-il. "C'est pour cette raison , très élémentaire, que je me suis senti si proche de lui et en ai fait mon Superhéros favori. C'est aussi pourquoi je trouvais important de raconter cette histoire à ma façon."
Bryan Singer avait ainsi une idée précise de l'itinéraire qu'il voulait faire suivre au héros, notamment en le confrontant à de rudes changements. C'est lui également qui a imposé l'idée de choisir un acteur non connu du grand public. "Il fallait quelqu'un qui reflète notre mémoire collective de Superman et devienne la vivante image du personnage", précise-t-il. En 1978, lorsque Richard Donner entreprit de réaliser son premier Superman, il fut confronté exactement au même problème et opta finalement pour un jeune débutant du nom de Christopher Reeve� qui incarna quatre fois l'Homme de fer sur grand écran et demeure jusqu'à aujourd'hui le Superman idéal. On peut souhaiter pire avenir à Brandon Routh, acteur inconnu de 26 ans qui a finalement décroché l'infime honneur d'enfiler à son tour le costume bleu et rouge.
Le rendu des scènes de vol préoccupait également beaucoup le réalisateur. "Brandon [Routh] et moi avons élaboré nos propres lois physiques dont découlerait la mise en scène des séquences de vol. Il fallait, par exemple, répondre à des questions très précises, du type: quelle force Superman doit-il déployer pour stopper un avion en plein vol ? Dans quelles circonstances flotte�t-il ? Quels gestes fait-il avec ses mains pour naviguer dans les airs?"
Une fois tous ces paramètres fixés, il restait à déterminer sur quel format de pellicule le film serait le plus à son avantage. Bryan Singer réalisa des essais à la fois en 35 et en 70 mm avant de découvrir, par l'intermédiaire de son chef opérateur Newton Thomas Sigel, l'existence d'une nouvelle caméra numérique (la Genesis) mise au point par Sony et Panavision. Cette technologie de pointe, qui n'existait pas deux ans avant le tournage, a été un atout clef dans la conception des séquences de vol, conférant une homogénéité parfaite aux images "live" et à la capture et à l'animation des images infographiques, pour un réalisme assez impressionnant. "Brandon vole dans ce film comme aucun autre Superman avant lui", conclut Singer.
Actualiser le monde de Superman
Le chef opérateur Guy Hendrix Dyas explique comment ont été conçu les décors de Superman returns : "Bryan et moi nous sommes toujours référés à l'univers Superman tel que le représentent les comics, les séries télé et les films antérieurs. J'ai veillé à en respecter l'imagerie. Notre but était d'actualiser le monde de Superman, pas de le réinventer". Cette optique est notamment flagrante lors des scènes situées à la ferme des Kent, tournées près de Tamworth, en Nouvelle Galles du Sud (Australie). La maison des Grant avec son porche et son fauteuil à bascule, la vieille grange peinte en rouge, les champs de blé� rien que de très familier.
Le reste des séquences a été tourné sur l'ensemble des sept plateaux des studios Fox Australia de Sydney. En tout, le film a mobilisé près de 80 décors, allant du yacht Gertrude aux divers bassin ou avions. Deux, notamment, ont occupé toute l'attention de l'équipe déco : l'immeuble du Daily Planet et le vaisseau spatial Forteresse de la solitude. Pour ce dernier, Guy Hendrix Dyas s'est inspiré d'une création de John Barry pour le Superman de 1978 et bâtit un "vaisseau de cristal" de 50 mètres de large et de quarante-cinq mètres de profondeur, haut comme trois étages. Une pure merveille visuelle qui rappelle la capsule de cristal dans laquelle le petit Kal-El est arrivé sur Terre.
Superhéros mythique, scénario ambitieux, décors somptueux et effets spéciaux inédits� il ne manquait plus, pour parfaire l'ensemble, qu'un "méchant" de marque. Mission réussie avec un Kevin Spacey soliloquant et givré, incarnation moderne du mal absolu : un capitaliste effréné prêt à tout pour faire un maximum de profit. Le rôle a été écrit spécialement pour l'acteur, avec qui Bryan Singer avait envie de travailler à nouveau depuis l'expérience d'Usual suspects. "[Lex Luthor] est beaucoup plus sombre, amer et revanchard que celui que nous connaissions jusqu'alors. Tout ce qu'il veut, c'est sa part du gâteau.", explique Kevin Spacey. Mais aussi se venger de Superman, qu'il tient pour responsable de tous ses échecs. Tous ces ingrédients réunis, il n'y a plus qu'à se laisser porter : welcome back, Superman. MpM
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