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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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(c) Diaphana Films
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Production : OZ Distribution : Diaphana Réalisation : Hideo Nakata Scénario : Yoshihiro Nakamura, Ken-Ichi Susuki, d'après la nouvelle de Koji Suzuki Montage : Nobuyuki Takahashi Photo : Junichiro Hayashi Son : Masayuki Iwakura Musique : Kenji Kawai Directeur artistique : Katsumi Nakazawa Durée : 97 mn
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Hitomi Kuroki : Yoshimi Matsubara
Rio Kanno : Ikuko Matsubara à l âge de cinq ans
Azami Mizukawa : Ikuko Matsabara à l âge de seize ans
Mirei Oguchi : Mitsuko Kawai
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Dark Water
Japon / 2002
26.02.03
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Désormais, la valse des genres n'est plus l'apanage du cinéma occidental. Il en va de même jusqu'aux noyaux centraux de la culture nipponne. Le fantôme y va et vient, avec ou sans chaînes. Des tréfonds du théâtre No et Kabuki, il a toujours trouvé sa place. Et dans son cinéma aussi. Il s'est a peine évaporé quelques années durant, à l'heure et à l'aune de nouveaux Godzilla et autres tortues nerveuses. Mais il revient et il n'est pas content. Le Kwaidan eiga - film de fantômes japonais - est une donnée ancestrale qui dépasse le genre proprement dit, jusqu'à hanter les auteurs de l'archipel les plus illustres : de Nagisa Oshima (L'empire de la passion) à Kurosawa (Rêves), de Kabayashi (Kwaidan) à Mizogushi (Passion of a Woman Teacher), l'image du spectre n'a cessé de ponctuer le paysage artistique du japon médiéval jusqu'au contemporain. Il n'y est pas forcément le " bad guy " de la narration, mais plus souvent un révélateur de tensions internes, l'image d'un psychanalyste un peu dingue ou stoïque, un kaléidoscope des sens, plutôt qu'un danger véritable.
Plus victime que lauréat, Hidéo Nakata, fort du succès de son dyptique Ring 1 et 2, n'est pas l'un de ces cinéastes fantoches qui fourvoient le genre fantastique pour dorer son blason. Il fait ses classes à la télévision pour laquelle il réalise trois épisodes d'une pseudo Quatrième dimension locale puis un téléfilm, L'actrice fantôme, qui le catégorisent aussitôt dans le fantastique. Lui rêve plutôt à des comédies sentimentales. Il est mal barré…
On lui glisse entre les pattes le best-seller du Stephen King du soleil levant, Koji Suzuki. Ca s'appelle The Ring, phénomène d'abord national au point, qu'outre une séquelle, une préquelle et un remake américain, l'objet est décliné sur des supports tels que séries télé, corn-flakes et autre parc d'attraction. Au finish, à la sortie et au succès phénoménal de la trilogie, une loi vient interdire en classe qu'on évoque ou utilise le prénom de la fillette fantomatique, Sadako, dans les écoles de filles. Ce qui ferait trémousser leurs socquettes blanches et leur jupe courte bleu de nuit au-delà du raisonnable …
Dépassé par son aura, Nakata tente en vain de tourner la page. Il va dès lors chercher à conjuguer la commande à ses pulsions internes. Dark Water en est le fruit. Issu d'un recueil de nouvelles justement intitulé "Dark Water" du même Suzuki, c'est directement l'auteur qui convoque le producteur, Takashige Ichinose, pour imposer l'adaptation de ses quarante pages à Nakata. Deux groupes de scénaristes planchent sur la chose, un seul sera retenu.. Entretemps, Nakata se penche sur un thriller et une comédie dramatique. Mais l'offre rattrape la demande…
Convaincu que sa liberté passe d'abord par l'acceptation, Nakata a l'intelligence de glisser dans une formule proche de Shining, Rosemary's baby ou Répulsion du même Polanski, ses réflexions sur l'indépendance féminine japonaise. Déjà, il avait transformé le protagoniste de Ring en héroïne. Il en sera de même, voire plus, avec Dark Water où la demande de divorce de la part des femmes est une donnée nouvelle au pays des masques et des faux-semblants. Extrêmement directif, Nakata guide ses comédiens comme un chef de camp, fuyant le combo pour être lui-même à quelques centimètres à droite de la caméra. Ses comédiens ne peuvent plus mentir. Il harcèle leur image et la moindre émotion, les poussant parfois jusqu'aux larmes tel un Pialat menteur.
Bien évidemment convoqué par Hollywood, l'homme réfléchit. On lui a proposé une quarantaine de scénarios. A quoi bon, s'ils ne lui ressemblent pas ? Il a entre-temps réalisé Last scène, relatant l'histoire d'un acteur du muet qui, 35 années plus tard, se voit confier le rôle principal d'un téléfilm, et présenté dernièrement au Festival de Berlin.
Il rêve d'un nouveau Psychose que devraient produire les Etats-Unis.
Que Dieu, Bouddha et les autres lui apportent vigilance au point de nous offrir son âme plutôt que les effets tapageurs dont il a su pour l 'heure s'astreindre jusqu'à l'irrémédiable nécessité.…
Grand prix du jury, prix de la critique et prix du jury jeune au Festival de Gerardmer 2003 . arnaud
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