Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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 (c) Ecran Noir 96 - 24


  

Production : Miramax, Initial Entertainment Group
Distribution : SND
Réalisation : Martin Scorsese
Scénario : Jay Coks, Steven Zaillan, Kenneth Lonergan
Montage : Thelma Schoonmaker
Photo : Michael Ballhaus
Décors : Dante Ferretti
Musique : U2 (chanson)
Durée : 170 mn
 

Leonardo di Caprio : Amsterdam, Vallon Jr
Daniel Day-Lewis : William Cutting, Bill le Boucher
Cameron Diaz : Jenny
Brendan Gleeson : Monk McGinn
Jim Broadbent : Boss Tweed
Henry Thomas : Johnny
Liam Neeson : Vallon
 

site officiel
cannes 2002
 
 
Gangs of New York


USA / 2002

08.01.03
 

Le film a accouché dans la douleur. D'abord, sans doute, parce que Scorsese y a mis beaucoup de lui, travaillant depuis 20 ans sur ce projet. Ensuite, et l'ultime image du film le confirme, la fin n'a pas été facile à trouver. Enfin, après les attentats du 11 septembre 2001 contre New York, il était peut-être inopportun de sortir un tel film, sur un tel sujet dans les salles.





Reste que le studio Miramax n'en sort pas grandit. Il est clair que les Frères Weinstein ont retardé la sortie, tenté d'imposer leur point de vue au réalisateur, et se retrouve aujourd'hui avec un énorme pari financier. Budgété à un peu moins de 100 millions de $ (mais officieusement, le film aurait coûté 50% de plus), le film se doit d'être un succès critique et a posteriori public. Dans un premier temps, il était envisagé de le sortir durant l'été, face à Road to Perdition, qui visait un public similaire. Puis en optant pour le 25 décémbre (USA) et début janvier (Europe), Miramax espérait répéter le coup marketing de Titanic. Seul souci : un autre film avec Di Caprio, une comédie policière réalisée par Spielberg (Catch me if you can) serait en salles ce jour de Noël 2002. Miramax vise les Oscars, un public de cinéphiles et les fans des stars. Le studio investit davantage dans la sortie internationale, avec comme atout les stars et la réputation de Scorsese. Mais derrière ces compromis il y eut une guerre entre le studio et le cinéaste : la durée du film. Miramax souhaitait un film de 2h30 maximum, pour une question de nombre de séances. Scorsese a imposé une version "salles" de 2h50.

Ce dernier avait imaginé le film en 78. Il n'avait pas pu le réaliser, suite au flop monumental de Heaven's Gate qui avait refroidit les studios. A l'origine, il y a les événements réels de l'histoire locale new yorkaise, des personnages comme Boss Tweed qui avaient une emprise perpétuelle sur des quartiers entiers, des encadrés dans les livres d'histoires, des légendes dans le quartier d'enfance de Scorsese et encore l'essai historique de Herbert Asbury (1928). Le réalisateur de Taxi Driver découvre ce livre en 1970. Il retrace l'histoire des gangs de rue entre le début du XIXème siècle et 1928. Le cinéma a peu traité des guerrillas entre protestants et catholiques, entre immigrants du XVIIIème siècle et nouveaux arrivants. Le coût élevé du film a bloqué sa mise en production. Exemple typique de sa vision précise, Scorsese a voulu reconstituer les décors de la New York d'alors dans les légendaires studios de Cinecitta. George Lucas, en tournage en Italie pour Star Wars II à cette époque (deuxième semestre 2000), fut étonné qu'on reproduise des décors si gigantesques alors que l'ordinateur peut les concevoir!

Le sujet ne pouvait qu'intéresser Scorsese : la rédemption, l'association de malfaiteurs, les malfrats, sa ville de New York, les batailles de religion, l'identité américaine... Il se concentra sur les années 60, décennie de guerre entre le Nord et le Sud, mais aussi summum de l'immigration étrangère avec 15 000 nouveaux Américains hebdomadaires. L'immigration mal canalisée, la ville qui ne contrôle plus son développement urbain - on passe de 60 000 habitants en 1800 à 800 000 en 1855 - et la Guerre de Sécession conduisent New York à ses premières émeutes dans les quartiers malfamés de Five Points (aujourd'hui les très chics Soho et Greenwich Village), en 1857. Soit un siècle avant d'autres émeutes raciales : celles de Los Angeles (idem : urbanisme incontrôlable, guerre au Vietnam, immigration massive). Mais les émeutes new yorkaises de 1863 demeurent les pires de l'histoire américaine.

Il fallait créer certains personnages, réinventer des icônes du folklore local. Bill le Boucher en est une. Bill Poole était boucher, devenu boxer, avant de mourir en 55. Il inspira le rôle de Day-Lewis, qui marque le retour de l'acteur après 5 ans d'absence du grand écran. De Niro et Dafoe furent pressentis avant lui. Di Caprio, alors héros titanesque d'Hollywood, et Diaz, l'une des actrices les plus populaires du moment, garantissaient le studio d'un réel intérêt médiatique pour le film. Mais le réalisateur a surtout rassemblé la fine fleur du cinéma britannique et irlandais : Liam Neeson (La liste de Schindler), Jim Broadbent (Moulin Rouge), Brendan Gleeson (Le Général), sans oubliers quelques américains comme John C.Reilly (Magnolia) ou Henry Thomas (E.T.)...

La fiche technique n'est pas moins impressionnante. Le scénario fut écrit par Jay Cocks (Le temps de l'innocence), Steven Zaillan (Le Liste de Schindler) et Kenneth Lonnergan (You can count on me). Un cocktail insolite pour un film en trois dimensions : l'histoire new yorkaise, la vie de persécutés et les relations humaines. Collaborateur régulier de Scorsese, le directeur de la photographie, Michael Ballhaus a éclairé les films de Fassbinder, Susie et les Baker Boys, Quiz Show, Primary Colors, La légende de Bagger Vance. Dante Ferretti, chef décorateur a imaginé les folies baroques de Pasolini, Scola, Ferreri, Fellini, Annaud, Jordan et Gilliam. Il avait travaillé avec Scorsese pour Le temps de l'innocence, Casino, Kundun et A Tombeau ouvert.

Cela devrait assurer une moisson de nominations dans ces catégories aux Oscars. Le film a eu le droit aux éloges de Variety, Rolling Stone, du National Board of Review et de l'American Film Institute. Dans le contexte actuel, il est évidemment au dessus du lot.
Il n'aurait pas faillit en étant présenté au dernier Festival de Cannes, en version longue, plutôt qu'en format teaser.
 
vincy
 
 
 
 

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