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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Production : Jerry Weintraub, NPV Entertainment, Section Eight, Village Roadshow Pictures Distribution : Warner Bros. Réalisation : Steven Soderbergh Scénario : Ted Griffin, remake du film homonyme de 1960 Montage : Stephen Mirrione Photo : Steven Soderbergh Décors : Kristen Toscano Messina Musique : David Holmes Directeur artistique : Keith P. Cunnigham Durée : 116 mn
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Ocean's 11 (Ocean s eleven)
USA / 2001
02.02.02
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Un casse? On a déjà vu ça avec The Score et Swordfish plus tôt dans l'année et dans d'inombrables autres films d'action.
Vegas? Pas très orginal. Julia Roberts y faisait déjà une virée dans The Mexican, sorti l'hiver dernier. Dans America's Sweethearts, elle passait les deux tiers du film dans les environs, en plein désert. A croire qu'elle ne tourne qu'au Névada. Damon y a aussi fait quelques tours de roulettes dans Rounders. Et puis difficile de repasser derrière le symphonique Casino de Scorsese.
Pourtant, Ocean's Eleven est un des films les plus attendus de l'année. Un brelan d'as dans la manche. Le réalisateur. Le casting. Le marketing.
As de trèfle.
Il y a plus de 40 ans, Jerry Weintraub était le producteur de Sinatra. Il avait souhaité réunir le "Rat Pack" musical au cinéma soit son poulain, Dean Martin, Sammy Davis Jr., Peter Lawford et Joey Bishop. Ocean's 11 sera leur premier film, pas le meilleur, réalisé par une légende, Lewis Milestone (All quiet on the western front). Le film est surtout connu pour son casting. Weintraub, conscient que Ocean's 11 est davantage une bonne histoire qu'un film médiocre avec des gars ultra-cools, demande au scénariste Ted Griffin d'écrire une version contemporaine : les casinos de Vegas sont devenus démesurés et mégalos, et les technologies de cambriolages ont radicalement évolué. Les casinos ont ceci d'intéressant qu'ils restent les derniers coffre-forts munis de tonnes de cash à une époque où la monnaie devient électronique.
Pour le scénariste, le défi est immense : faire cohabiter 11 gars (dont 3 mega-stars), le propriétaire et l'ex-femme. Les 12 salopards, La grande évasion, Les 7 mercenaires servent de référence. Le tout en évitant la caricature. Il y a aussi de smodifications à faire : les onze ne peuvent plus être des vétérans de la seconde guerre mondiale, le nouvel an se transforme en match de boxe historique, ... Une fois écrit, le producteur envoie l'un des meilleurs scripts d'Hollywood (sur le papier) à Steven Soderbergh qui y voit un divertissement ambitieux et de grande ampleur. Le cinéaste est hot, fort de deux hits consécutifs, d'une double nomination à l'Oscar.
As de carreau.
Le défi était multiple pour Soderbergh. Il fallait renouer avec le divertissement pur, genre qui l'avait remis en scelle avec le polar Out of Sight. Aucun mort, aucune humiliation, juste du suspens. Il y voyait surtout une opportunité d'explorer de nouvelles voies dans sa réalisation. De la même façon, il sait déjà qu'il va vouloir un casting de stars, en bon directeur d'acteurs qu'il est. Chef opérateur de ses propres films, il va aussi devoir affronter les légendes qui ont contribué à la réputation cinégénique de Vegas; on a cité Scorsese, mais il y eut aussi Gilliam, Coppola, Levinson, Lyne, Verhoeven...
Car Ocean's 11 est, de l'aveu même du cinéaste de Sexe Mensonges et Vidéo, l'exact opposé de Traffic. Glamour, construit comme une mécanique parfaite, film chorale là où Traffic était puzzle, il devait respecter une certiane forme de dramatisation, presque théâtrale. De plus, il voulait juste faire un film pour donner du plaisir; cette générosité est là encore à opposer à sa filmographie du début des années 90, où il réalisait des films expérimentaux, introvertis, intimes. Mais son boulot le plus dur sera certainement d'avoir les bons acteurs...
As de coeur.
Le casting fonctionne par duos. Il y a ceux qui ont déjà tourné avec le maître. Il y a ceux qui ont déjà tourné ensemble. Il y a ceux enfin qui n'étaient pas prévus au départ.
Clooney, Pitt et Roberts ont tout de suite signé. Au centre de l'intrigue, George Clooney prouve sa fidélité à celui qui l'avait sorti de la série "ER" avec Out of Sight. De même Julia ne pouvait que dire OUI à celui qui lui donna le rôle d'Erin Brockovich, et son Oscar. Qui plus est, Pitt et Roberts venaient de tourner ensemble dans The Mexican.
Après il y eut tous les fantasmes de la rumeur. On cita pêle mêle Bruce Willis, Bill Murray, Owen et Luke Wilson, Mark Wahlberg (qui refusa pour ne pas être trop dépendant de l'image de Clooney), Ewan McGregor, Ralph Fiennes, Hugh Grant, ... Mais dans un contexte où l'on anticipait une grève des acteurs, les stars avaient du mal à cumuler les projets et on assista à quelques revirements. Matt Damon entra dans la danse; Don Cheadle ne jouerait pas le rôle de Sammy Davis Jr.; et on assisterait au grand come back de l'immense Andy Garcia. Une affiche de rêve, à laquelle on ajoute le fils de James Caan et le frère de Ben Affleck.
Il fallait quand même qu'un casting de ce type (genre cotation AAA chez Moody's) rentre dans le budget de 90 millions de $. Rien que Julia, Matt, Brad et George valent plus de 60 millions de $, en cachets habituels. En fait Clooney donna le ton. Co-partenaire de Soderbergh dans Section 8 production, il sait qu'il est le parfait Danny Ocean. Il décide donc de créduire fortement son salaire, et incite les acteurs à faire de même. Ainsi Clooney fera le leader du groupe, Pitt son bras droit. les deux sont amis et régis par leur propres codes de conduite. Excellent joueur, il est avant tout le complice d'Ocean. On y ajoute le nouveau venu, celui qui veut prouver de quoi il est capable, un champion du pickpocket- Damon. On a ainsi un trio d'acteur de belle facture, populaires, séducteurs, et reconnus pour leur talent. Pour leur faire face, il fallait un acteur capable d'exprimer la mégalomanie, le pouvoir, un comédien tout aussi séduisant, de l'âge de Clooney pour accentuer la rivalité romantique. Andy Garcia a remplacé Ralph Fiennes et Bruce Willis. Incarner un vilain pour ce prince du Parrain III s'avère le bon choix. Il devient le rat face au pack. Celui que tout le monde doit détester, tout en étant crédible avec une Julia Roberts dans ses bras. Car l'enjeu central est bien là : pour quelle coeur va-t'-elle s'abandonner, la Roberts? 20 millions de $ par film au compteur, l'actrice la plus puissante d'Hollywood reçoit un mot de Clooney et Soderbergh, avec le script : "nous avons entendu que tu te faisais 20 par film maintenant..." Un billet de 20 dollars était joint. Preuve qu'elle est capable de tout pour Soderbergh : elle a accepté d'être la star de son prochain film, Full frontal, où elle apparaitrait nue.
A ce quintet, ajoutons Don Cheadle. L'acteur était déjà dans Out of Sight. Flic dans Swordfish, il devient chargé de la panne d'électricité. Ironie du sort, Cheadle est celui qui incarna Sammy Davis Jr dans le film-biographique de la HBO.
Le casting est infiniment célèbre, d'Eliott Gould à Carl Reiner en passant par les boxeurs du match vedette (Lennox Lewis et Wladimir Klitschko) et deux apparations du casting du film original : Angie Dickinson et Henry Silva.
Joker.
Le production du film n'eut pas trop de difficultés, hormis la sécurité, l'agenda et la discrétion des stars. Jerry Weintraub, habitué à monter des spectacles et des tournées musicales, négocia avec les Casinos. Les patrons sont soucieux de leur image, imposent souvent des restrictions horaires... Le Bellagio , le plus luxueux et l'un des plus beaux, devint le QG de la troupe et accepta les inconvénients (fermetures de zone, interruption de service...). Après tout il se payait une campagne de pub mondiale. Les trois flash backs reprennent des symboles de l'époque (vestiges encore debout) : le Barbary coast (60s), le Flamingo Hilton (70s) et le Caesar's palace (80s). Pour le match de boxe, Soderbergh filma au MGM Grand.
Le tournage débute en février 2001, tandis que Soderbergh reçoit les louanges de ses pairs, pendant que Roberts tourne America's Sweethearts et fait la promo du Mexican. Mi-juin, les bobines sont remballées.
Restait à mettre sur le marché un tel film. D'autant que la Warner sort d'un A.I. mal vendu, de quelques flops estivaux. La même Warner ne veut surtout pas gacher les chances de son bébé Harry Potter. Au départ prévu le 25 décembre, puis le 14, finalement le film sort le 7 décembre aux USA et en janvier/février en Europe, dans un jeu de chaise musicale avec Ali et Vanilla Sky.
Le studio vante le film à travers une affiche graphique, ne montrant aucun des acteurs, à la Reservoir Dogs. Le buzz est instantané. La bande annonce, elle, met en valeur le casting. Le site officiel est inauguré en septembre. Le tout est de faire exister le film entre Harry Potter et Lord of the Rings. Warner lance la bande annonce au cinéma devant Training Day, qui sera le numéro 1 de ce week end là. Le DVD de la version 1960 est prévu le 8 janvier 2002. Le National Board of Review le place dans sa Top list de l'année dès le 5 décembre. Clooney et Roberts font un marathon médiatique.
Tout est bon pour un carton. "Introducing Julia Roberts" comme le mentionne le générique.
vincy
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