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ELECTRIC DREAMS
Ce film cumule plusieurs difficultés, et l'on peut en sortir bluffé, comme perplexe, tellement il nous "interpelle quelque part". Thomas est amoureux est une histoire de demain et finalement d'humain. Le cinéaste d'ailleurs s'en sort fort bien lorsqu'il s'agit de filmer les gens. Etrangement, dans ce monde totalement froid, cybernétique, informatique, où le seul lien entre Thomas et les autres est un écran d'ordinateur qui ne quitte pas l'écran de la salle, le film rend hommage aux visages, aux gestes, aux sentiments. Ce sont de très beaux portraits de personnes (personnages) qui nous sont offerts par écrans interposés. Les femmes, en particulier, sont magnifiquement humaines, émouvantes, naturelles : la mère, la petite amie, la pute, la maquerelle. Les hommes ici ont une fonction utilitariste : mécanicien, assureur, psy... ils sont à l'écoute mais se moulent dans le système. Tandis que les femmes résistent, en quête d'absolu, de liberté, de légèreté. La psychologie des personnages, un peu facile, demeure juste.
Au-delà du fond, il faut s'attarder avant tout sur la forme. Cette caméra subjective posée sur l'écran de Thomas nous oppresse et nous fascine. L'univers de Thomas n'est bien sûr pas limité à cet écran. Il y a un appartement autour, qu'on devine, qu'on ne voit jamais. L'intimité de Thomas est parfois sexuelle, souvent psychologique, jamais elle ne franchit d'autres cadres, contrairement aux appartements des protagonistes qu'on visite virtuellement.
Donc le réalisateur s'est attaché à imaginer un futur proche, un quotidien qui n'existe pas encore, mais qui n'a rien de fantaisiste. Décors, costumes, effets visuels, le film est une véritable prouesse artistique, pas très loin des environnements surréalistes de Ma Vie en Rose, des parisiens futuristes de Peut-être, et des films expérimentaux vus à Imagina.
La séquence créée par les studios Sparx avec cette cartoon girl en 3D, sorte de Jessica Rabbit pulpeuse et sexuelle, est une merveille de séquence animée.
Evidemment, la société de demain n'a rien de sexy. Surtout à travers les yeux d'un agoraphobe cybernophile.
C'est aussi toute la limite du film. S'il pose de nombreuses questions sur l'impact de cette société virtuelle sur notre vie, sur la condition d'être humain dans un monde où on n'a plus besoin de sortir, sur les relations humaines à travers un outil dit de communication (dopé à l'internet), Thomas est amoureux est un scénario qui étonne, ennuie et émerveille. Il étonne au début, nous emprisonnant dans ce réseau des réseaux, nous guidant de untel à unetelle, de problème domotique en poésie clip. Puis il nous ennuie, à force de répéter son histoire. Thomas ne cesse de justifier, d'expliquer, avec un agacement partagé par lui comme par nous, son état, son handicap, la cause aux problèmes qu'il se crée. Sa phobie est démultiplier, comme un contenu redistribué à travers tous les liens hypertextes qu'il a pu trouver.
Enfin, il nous émerveille grâce à cette envie d'en sortir, de sortir. Cette accélération, cette pulsation, ce désir vers une autre vie, réelle, extérieure.
La fin est très habilement montée. Et surtout Pierre Paul Renders garde son parti-pris jusqu'au bout, ne trahissant ni son concept (la caméra subjective posée sur l'écran) ni Thomas (qu'on ne verra donc jamais). Finalement, le réseau était un peu clos, malgré les ouvertures promises. L'envie d'éveiller ses cinq sens aura été plus forte.
Si le script pêche par une certaine superficialité qui ne prend de l'intérêt qu'avec la détresse, l'amour, la pitié des gens, le film s'impose comme un exercice de style réussi, amenant autant de débats que d'incertitude sur ce Big Brother permanent. Bref typiquement un bon film d'anticipation où le seul OVNI est la voix perpétuellement off de Thomas. vincy
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