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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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The Beach (La plage)
USA / 2000
16.02.00
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EXCLUSIFS
"- C'était un club de vacances pour des gens allergiques aux clubs de vacances..."
Voix Off. Musique techno. Images speed. Discours critique sur la société, le tourisme, la mondialisation. Non ce n'est pas Trainspotting. Mais presque. Danny Boyle nous livre la suite de son film culte, en envoyant un gars occidental, paumé, en quête d'un idéal à des milliers de kilomètres de nos banlieues sordides.
On retrouve donc un personnage qui se marginalise d'une société qu'il ne supporte plus : trop banale, trop aliénante, trop uniformisée. Ce même personnage trouve son paradis - un microcosme sans argent, ce qui rompt radicalement avec les 3 précédents films du cinéaste; ici ce n'est ni la drogue (Trainspotting), ni l'amour (Une vie moins ordinaire), mais bien un mode de vie. Et, comme dans les autres films, tout rentre dans l'ordre, et lui rentre dans le rang.
C'est tendance : les scripts du moment se rebellent contre notre univers impitoyablement matérialiste, de Fight Club à American Beauty.
Seul problème à cette critique, une fois la solution dans une impasse, aucun de ses films n'apportent une autre alternative à ces extrêmes impossibles.
Cependant, ne boudons pas notre plaisir. Film techno-pop esthétique et hédoniste, The Beach est un jeu d'arcade, ponctué d'obstacles (bandits, saut dans le vide...), qui séduira un public encore plein d'illusions sur la vision de Paradis, à la fois kitsch et cliché.
Le Paradis se transforme donc, "softement", en enfer. La tribu devient boat people. La plage turquoise se noie dans le sang, la peur, et pousse la petite communauté à l'exil. Paradis perdu.
Beau portrait d'une communauté et de ses failles, cette régression sociale qui atteint son apogée avec le bonheur de Richard (excellent Di Caprio), amène inévitablement aux erreurs individuelles et collectives, aux irresponsabilités et aux mensonges, au pétage de plomb et à l'ultime psychodrame. Boyle ne fait pas que critiquer le tourisme de masse et plaisanter sur la différence entre l'Europe et les USA; il détruit les rêves d'une génération.
Il ne suffit pas de vivre d'amour et d'eau fraîche, de joints et de fêtes. Il reste une dépendance à la civilisation (du PQ aux capotes), un rapport aux autres (voisins, villes), un retour aux rituels ancestraux.
Lorsque Richard est anéanti, à la limite de l'exclusion, le film plonge dans l'univers d'Apocalypse Now, et transforme Di Caprio en Rambo. Un peu trop?
Avec quelques drames (sanglants), le groupe se retrouve face à ses responsabilités. Quelle place a la souffrance, la douleur, l'horreur, et finalement l'humain dans une atmosphère iréelle de beauté, de désir et de plaisir? Lorsque l'autorité d'une chef anihilie les volontés de chacun, lorsque ces pacifistes idéalistes se retrouvent face à un choix, leur bonheur ou le sacrifice d'un des leurs, on s'aperçoit que The Beach n'est rien d'autre qu'une secte, qui envoûte et détruit le mental des plus lucides.
Et finalement, Richard et Etienne (Canet, parfait) sont les seuls rescapés de ce radeau d'un autre temps, en partance vers le monde qu'ils décriaient tant; ce sont les seuls à avoir gardé leur dignité humaine, et leur propre morale. Les seuls à avoir trouvé ce qu'ils cherchaient : exister en donnant un vague sens à leur vie. Les pieds dans le sable et la tête dans les nuages. vincy
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