|
Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
|
|
|
|
|
Nagaya shinshiroku (Récit d'un propriétaire)
Japon / 1947
|
|
|
|
|
|
LA VIEILLE FEMME ET L'ENFANT
Dans un quasi huis-clos (quelques maisons ouvertes les unes sur les autres) hormis deux échappées à l'air libre, Yasujiro Ozu met en scène les thèmes qu'il affectionne dans cette période de son cinéma : les rapports entre les générations, l'illustration d'un Japon qui se reconstruit après la guerre, la peur de la perte.
L'enfant, quasiment muet, symbole d'un futur énigmatique, permet de révéler à des vieux égoïstes, le propriétaire comme sa voisine d'en face, leur désespoir, leur manque d'affection. Ils en sont devenus immatures et irresponsables comme de grands gamins, attachés à leur routine. Forcément blessés. Craintifs, pour ne pas dire rejetant les nouvelles perspectives.
Et il est bien question de perspective avec Ozu. Posant sa caméra au ras du sol, ou presque, enrichissant ses plans d'arrières plans (bénéficiant ainsi de l'architecture traditionnelle de son pays qui ouvre les espaces les uns sur les autres grâce à des portes coulissantes), le cinéaste met en relief le vide qui se dégage de chacune des vies décrites. L'enfant égaré va évidemment tout bouleverser. Remplissant une maison, accomplissant involontairement sa mission. Le gamin n'a aucune de leurs réticences. Il a envie d'être aimé. Le minimalisme des dialogues n'affecte pas la richesse psychologique des personnages. Grâce au talent très expressif de Choko Iida, cette "grand mère" acariâtre va lentement se muer en femme lumineuse, chaleureuse. C'est elle qui va le plus apprendre au contact de l'autre. Se rappelant ses propres fautes, pardonnant plus facilement, regrettant ses propres ires.
Entre ses grimaces burlesques et ses larmes retenues (de joie, pas de tristesse, elle insiste), cette femme de mauvaise foi s'humanise et achève son auto-critique en guise de happy end. Chronique douce amère et touchante, pas forcément émouvante, légèrement drôlatique, ce Récit d'un propriétaire fait écho à ces films italiens réalisés après la guerre où le contexte social, la détresse morale croisent les chemins escarpés de la reconstruction de l'identité, de la redécouverte du lien humain.
Les personnages semblent un peu bizarres, vous avez dit bizarre?. Emportés par leur folie ordinaire, celle de gens solitaires et meurtris. Il n'en faut pas plus pour nous transporter.
vincy
|
|
|