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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Born Into Brothels (Camera Kids)
USA / 2005
16.11.05
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VOIS, VIS ET DEVIENS
"Tu fermes un œil, tu ouvres l'autre… Et tu regardes."
La vie, comme elle va, dans les bordels de Calcutta. Là où les destins sont écrits d'avance pour ces enfants de prostitués marginalisés par une société en son sein déjà structurée sur le principe du clivage social. Promiscuité, violences, rejet du système éducatif : contre un avenir tracé, ces enfants - filles et garçons voués à reprendre le flambeau - ont appris à vivre au jour le jour. Le plus simplement du monde, Camera Kids suivra le courant, dénué de sentimentalisme, captant ces regards, sourires et élans d'enfants au vif de l'instant présent. Une aventure humaine à l'origine improvisée sous l'œil de la caméra, au hasard des ruelles, des couloirs de ce bordel, des excursions, témoignages, récits et moments de bonheur coexistant avec l'inconcevable quotidien. Monté à la façon d'un journal filmé, le film souffrira d'un bon manque de structure en sa première moitié. Peu de détails nous seront révélés quant aux conditions de vies, notamment l'histoire familiale de chacun. Si le procédé ralenti quelque peu notre immersion, il présentera l'immense avantage d'un discours exempt de pathos, jamais complaisant, toujours centré sur la sensibilité de chacun. A juste titre, Ross Kaufmann et Zana Briski banalisent le chaotique Sonagachi ne dessinant l'enfer qu'en catimini. Ici, le coup de gueule d'une mère asphyxiée par la présence de son fils ou encore l'écrasant poids des modèles sociaux ; là, le décès d'une d'entre elles dans de suspectes conditions. Un décès de plus classé sans suite parmi tant d'autres. Le quotidien dans les rues de Sonagachi. A quoi bon s'étendre, en effet. Camera Kids nous offre à regarder ce monde avec des yeux neufs. Ceux de ces enfants qui, devant comme derrière l'objectif, malgré toute la confusion dans laquelle ils évoluent et fort de la complicité qui les unit, ont conservé leur enthousiasme naturel. Au fil des témoignages et albums apparaîtront les itinéraires et sentiments de chacun.
Scènes de la vie ordinaire, portraits d'anonymes, architectures, natures mortes : on sera happé par la beauté des travaux photographiques. Du concentré de générosité ! Découvrir, se découvrir, s'éveiller à l'autre, échanger, acquérir confiance bien sur, choisir, reconstruire son environnement via l'esthétique de l'image… Evident vecteur d'épanouissement, la photographie amorcera ici de nouvelles perspectives, révélant toute la volonté de ces enfants pour la première fois portés par des forces constructives. Ici même commencera le vrai combat : celui de Zana Briski pour leur scolarisation. Aller contre les barrières sociales, contre ces pesants modèles culturels et, souvent, contre l'opposition même de ces mères et grands-mères peu résolues à briser le schéma ; porter ces enfants, tant physiquement que moralement, sachant que tous ne se feront pas à cette nouvelle vie, que certains renonceront ; désacraliser la chance qui leur est offerte tout en maintenant le cap… Au-delà du documentaire, Camera Kids est un journal d'apprentissage aux mouvements de la vie. Ainsi même à leurs limites. Mélange d'optimisme, d'espoirs et de réalisme face aux possibles échecs. Ce dernier point restera toutefois bancal, souffrant du point de vue très occidentalisé via lequel le film nous est donné à lire, faisant quelque peu fi des ancrages culturels orientaux. Seule la bande originale, fleurissante de belles musiques traditionnelles, nous rappellera au pays des Maharajas. Certes, il sera ici question de ne pas réduire ce fléau à la seule question indienne. Ross Kaufmann et Nacy Baker ouvrent subtilement le débat nous donnant à partager deux années de leur vie et celles de ces enfants devenus artistes. Quelque uns semblent promis à un bel avenir. Leçons d'éveil au rêve forcement, mais surtout - et puisqu'il faut bien commencer par quelque chose - à cette indispensable volonté. Un singulier voyage en images d'enfants qui ont simplement à nous transmettre.
Sabrina
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