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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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In her Shoes
USA / 2005
16.11.05
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WONDER GIRLS
"Même si c'est embarrassant à dire, là, actuellement, je bande."
In Her Shoes commencerait presque comme n'importe quelle comédie romantique américaine. Une rivalité (trop) contrastée entre deux soeurs que tout oppose, l'une analphabète cherchant à ne pas être une simple bombe sexuelle, l'autre bûcheuse et rêvant de devenir bête et amoureuse. Relations conflictuelles, jalouses, et pourtant assez plates. Trop engoncé dans une apparence "classiquement" hollywoodienne. Ses filles à côté de leurs pompes n'ont rien qui les relient - hormis ces fameuses chaussures, mais c'est finalement assez accessoire - et rien tout qui nous ennuie. Comment se tirer de ce mauvais pas?
Il faut tout le talent de Curtis Hanson, cinéaste autrement plus doué et passionnant qu'un Cameron Crowe, pour tirer le film vers le haut et dans d'autres registres, malgré les épreuves imposées. En les séparant violemment, il obtient ce qu'il veut : un drame psychologique teinté d'humour et de relativisme; le film dépasse le clivage "fraternel" pour fouiller dans les racines du mal. Celles qui font germer nos angoisses, nos blocages. Le manuel pour apprendre à les surpasser s'avère plus intéressant que l'idée de finir par un happy end de retrouvailles. Car cela ne se fait pas tout seul, cela demande même l'aide des autres. Et donc un (des) dialogue(s). Le film se scinde alors à suivre les deux personnages, interprétés avec charme et talent par Collette et Diaz. Nous observons cette reconstruction d'identités, objet des meilleures séquences du film (soit à peu près la moitié centrale du long métrage). Les caractères sont bien croqués et, surtout, le portrait des deux générations (les trentenaires et les retraités) bien dessiné. Notamment ces petits vieux de Floride. Le cinéaste est inspiré, n'hésite pas à leur donner la vedette et trouve ici une manière de prolonger son tableau d'une Amérique "personnifiée" à travers ses castes, après celle des flics ou des jeunes de banlieues. Ce sera d'ailleurs l'occasion pour Diaz d'étoffer un peu son jeu, sans doute mise au défi par une Shirley MacLaine qui sait encore séduire et voler la vedette.
L'expérience! C'est aussi le message du film : donner sa chance à l'action, aux rencontres, à ce qui peut nous transformer. Collette aura, elle, le droit à un avocat bon vivant et aguicheur. L'acteur, Mark Feuerstein, apporte un air vivifiant dans le film, et permet de ne pas faire baisser la tension lorsqu'on déménage à Philadelphie.
En insérant une touche personnelle plus sensible qu'émouvante, Hanson permet de gratter le vernis de la production des studios.
Même si on y retrouve un schéma (seconds rôles forts, narration sans surprise), ce qu'il amène est une critique, en creux, d'une césure dans les relations humaines entre les parents et les enfants voire les petits-enfants. "Lisez les magazines de mode, surfez sur internet, regardez les films porno sur le câble" conseille-t-on à une mamie. En remettant le partage d'expérience et l'apprentissage de l'histoire (personnelle) au coeur de son processus de maturité (et donc de sagesse), le réalisateur n'utilise aucun autre effet que la parole humaine pour que l'on puisse grandir.
Car un héritage génétique et éducatif peut mener à deux voies distinctes (l'une responsable et s'investissant trop dans le travail, l'autre inconsciente et pariant sur la futilité et l'apparence) à Hollywood, il faut arriver finalement, fatalement à un juste milieu. Thèse, antithèse, et donc synthèse, entre romance et réalité. Léger sans être punchy, intense sans verser dans la guimauve, In her Shoes finit pieds nus dans un bar jamaïcain. Déraciné. Mais au soleil. De quoi faire pousser de belles plantes, blondes ou brunes, peu importe.
vincy
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