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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Colour me Kubrick (Appelez-moi Kubrick)
/ 2005
04.01.06
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JE EST UN GENIE
« - Un nouveau film en chantier ? Qui joue dedans ?
- John Malkovich.
- John qui ? »
Bien que bancal à bien des égards, le premier film de celui qui fut longtemps le premier assistant de Kubrick peut titiller les esprits curieux. Non pas qu’il soit particulièrement drôle (la poire se fend ici avec parcimonie), non pas non plus qu’il soit assez fin ou ingénieux (le film) pour faire passer la grossière mise en abîme de Malkovich parlant de Malkovich, ni enfin même qu’il soit simplement beau à regarder (le film toujours). Non. Si on est en droit d’aimer, du moins de trouver un certain charme à Appelez-moi Kubrick, c’est que toute la bizarrerie de son personnage, son excentricité écervelée, trouve un écho dans la facture même du film. Pas à proprement parler dans sa forme (le filmage plutôt sage assume que le film n’a pas grand chose à dire) mais dans ce je-m’en-foutisme, cette totale inconséquence généralisée. Le réalisateur vadrouille, papillonne d’une anecdote à une autre, avec pour seul fil conducteur l’irascible égoïsme de l’insupportable Alan Conway.
Intrinsèquement, indiscutablement, résolument grotesque, cet usurpateur professionnel contamine donc de son irresponsabilité, de son insouciance, l’ensemble du film et de ses choix « moraux ».
Parfois franchement moche à voir, souvent maladroite, la comédie de Brian Cook s’effacerait presque derrière la personnalité poisseuse de Conway. Le réalisateur a manifestement voulu parler de cet homme, voire rendre hommage à sa singularité : fut-il montré dans toute son escroquerie minable, ce serait par respect et sans l’espoir d’en faire des choux gras comique.
Et ce faisant, Cook réussi avec Appelez-moi Kubrick, un film tout à fait digne. En l’occurrence, proche de son personnage et fier de ses contresens : comme Madame Bovary était Flaubert, Appelez-moi Kubrick est Alan Conway. Mais alors qui est Brian Cook ? Et comment doit-on l’appeler ? A-t-il (ex second couteau et membre du clan Kubrick), résolu ses problèmes d’identité ? Lui-même, ne s’est-il jamais fait passer pour Kubrick ?
Amoral le film de Cook ? Sans doute. Il est ironique que sa sortie, en cette semaine de nouvel an, coïncide avec celle de deux pamphlets politiques hautement engagés : Lord of War et Good Night and Good Luck. Malkovich que l’on voit désormais promener son air de Raskolnikov sur les plateaux de la télévision française est effrayant dans le rôle du plagiaire de vie. Par sa voix, plus agaçante que jamais, percluse de chuchotement affectés, de miel et de faux accent, par ses tortillements hystériques, ces agitations d’une impudeur rare, il parvient à créer un suspense étrange dans la crainte, l’attente toujours repoussée d’un inévitable démasquage.
Le réalisateur a le talent de nous épargner une quelconque justification, le début d’une explication (il tourne même en ridicule la psy qui tente de le faire), la moindre remise en question du personnage et se contente de faire foncer son film vers son effritement final, vers l’oubli attendu d’un fait divers amusant, écumé par la masse des informations suivantes. Axel
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