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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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The Cell (La cellule)
USA / 2000
18.10.00
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CHEVAL DE TROIE
The Cell est typiquement le film qui satisfait nos apétits morbides, nous surcharge d'images enrichies et nous laisse sur notre faim, avec le sentiment d'avoir déjà consommé cela quelque part.
On se sent partagé, schyzophréniquement, entre critiquer un film policier de bonne facture, mais sans intérêt particulier, et admirer un des plus beaux films de ces dernières années...
Si l'on s'en tient au scénario, le film est un mélange de Silence des Agneaux (le rapport psychologique, l'invasion du FBI dans la maison) et de Seven (le désert, les crimes horribles). Le suspens en moins. A aucun moment, ce polar ne nous implique dans une intrigue suffisamment pour s'interroger sur la suite des événements. On suit l'action, sans sourciller sur tel raccourci ou telle invraisemblance, avec de temps en temps le coeur qui palpite ou l'oeil qui s'égare. Le rythme du film est un peu déséquilibré et donne l'impression d'un film qui s'alanguit au gré des scènes, ou au contraire nous précipite dans une course à l'image...
Un film sur un serial killer, rien de plus, a priori. Le serial killer étant très vite capturé, on est plongé dans deux univers : le réel (et la recherche de la dernière victime) et le subconscient (et la compréhension du tueur). C'est là le principal objet du désir de ce film : l'immersion dans le mental du tueur.
Le film en fait assume des détails étonnant. On y fume des joints, voire on fume tout court (grand crime en Amérique ces derniers temps). On cherche à comprendre un serial killer malade. Très freudien comme comportement. Et loin de Rousseau surtout, puisqu'il est clairement annoncé que tous les abusés sexuels ne deviennent pas des monstres. Enfin, il critique ouvertement un système judiciaire inapte à donner une réponse viable à ces crimes... et va jusqu'à prôner l'euthanasie.
Avant de garder le meilleur pour la fin, et pour la faim, notons la très belle interprétation du flic du FBI par Vince Vaughn, toute en profondeur et en subtilité, jusque dans la démarche... Vincent D'Onofrio offre un portrait classique d'un tueur malsain aux tendances SM, ressemblant trop à Philip Seymour Hoffman dans Happiness pour nous accrocher. Jennifer Lopez aurait pu se faire remplacer tellement son jeu se résume à sa beauté plastique, qui sert très bien le projet artistique du film. Trop inexpressive face à peu de dialogues et un personnage trop linéaire, elle manque d'envergure pour voler des scènes qui lui étaient offertes...
Heureusement, la réalisation et la direction artistique de The Cell le placent un cran au dessus de la plupart des produits hollywoodiens du même genre. Sans être originale, la réalisation est fluide, efficace, et se permet quelques scènes très réussies dans l'onirisme. Comparé à la lourdeur des récents OVNIS du 7ème Art qui mélangeaient tableaux esthétiques à effets spéciaux et histoires dramatiques ou policières, The Cell ne s'embarasse pas de prétention et reste un film policier. Evidemment, c'est son aspect esthétique (l'univers mental et subconscient est proche du surréalisme ultra-coloré) qui le rend si fascinant et si attrayant, embellissant même le démon, la terreur et le meurtre. Cette atmosphère effrayante nous entraîne dans une impression répulsive et claustrophobique. Hélas la plasticité l'emporte sur l'instinct, et on ne se sent jamais menacé...
S'inspirant de peintres (Bacon, Bosch, Dali, Magritte...), d'illustrateurs (Pierre et Gilles), de photographes contemporains ou encore d'influences diverses (Ghost in the Shell, les mangas en général, ...), on baigne davantage dans les films de Cronenberg (femmes-machines, expériences chirugicales, cauchemars malsains...). Certaines scènes sont "proprement" sado maso et insoutenables pour les âmes sensibles (les adeptes du piercing et du plaisir par la douleur prendront leur pieds). Superbe, voire somptueux, The Cell restera dans les annales comme un must en terme de cinégénie, obsolétant les plans imaginés par Dali dans le tout aussi freudien Spellbound d'Hitchcock.
On ajoutera la très belle composition musicale d'Howard Shore, métissant les sonorités arabes aux mélodies dramatiques et symphoniques. Au final, The Cell ne marque pas le spectateur en tant que polar gore, mais restera imprimer dans nos mémoires pour l'univers fantastique qu'il nous a permis d'explorer. vincy
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