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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Wassup rockers
USA / 2005
05.04.06
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24H AVEC LES JEUNES DU GHETTO
T'es pas circoncis !?
- Non, chuis latino.
Ça te parait bizarre ?
- Ça a l'air dangereux !
Le sulfureux Larry Clark revient avec un film presque sage, aux allures de documentaire minimaliste. Si l'on reconnaît sa patte et ses thèmes de prédilection (le quotidien désoeuvré d'adolescents américains), on ne retrouve pas dans Wassup rockers la radicalité sans concession du réalisateur. La première partie du film dresse un tableau contrasté du ghetto de South Central, à Los Angeles. D'un côté des jeunes comme les autres, qui vont au collège, font du skate-board avec leurs copains et draguent les filles après les cours. Tranches de vie légères et cocasses. De l'autre, une violence latente toujours sur le point d'exploser, comme lors du meurtre de l'un de leurs camarades, ou à la moindre friction avec la communauté noire.
Les héros du film, ce sont sept adolescents latino-américains qui, refusant le style vestimentaire de la rue (le baggy), dénotent dans leur quartier et sont confrontés à l'aggressivité des autres. Ces jeunes ne correspondent pas aux clichés en vigueur : ils ne se droguent pas, n'appartiennent à aucun gang, ne sont pas des voyous. Mais Larry clark ne cherche pas à en faire des étendards ou des saints. Son propos est comme toujours de coller au plus près de la réalité, en donnant à comprendre et à voir la vraie nature de ses personnages.
D'où cette force qui lui permet d'éviter les clichés sans jamais tomber dans la miévrerie. Ce n'est pas un truc de scénariste, mais une conséquence de son talent d'observateur, perceptible tout au long du film. Il parvient ainsi à saisir toute l'ambiguïté du statut de ses héros. Cette non�violence, cet aspect tranquille et bon enfant qui les caractérise, les ramène finalement malgré eux vers la brutalité, le danger, l'illégalité. Plus ils tentent d'échapper à leur milieu, plus on essaye de les y enfermer.
On est donc sans cesse sur le fil du rasoir, le film menaçant à chaque incident de basculer dans la violence la plus noire. Jonathan bouscule un rappeur, et l'on est à deux doigts du pugilat. La bande se fait contrôler par la police, et l'ombre d'une bévue policière surgit. Le réalisateur maintient la pression, mais ménage ses effets. A chaque fois, la confrontation tourne à l'avantage des "rockers". Sans violence.
Confrontation entre deux mondes
Mais il ne laisse pas le spectateur s'endormir. Après l'avoir mis en condition avec le quotidien des jeunes et l'ambiance bien particulière qui se dégage de leur quartier, Larry Clark déplace l'action. De South central, on passe à Berverly Hills, jungle tout aussi codifiée, où chacun joue un rôle déterminé à l'avance. Seule différence, c'est qu'ici, Jonathan et ses copains ne connaissent pas les règles. Ils se perdent dans ces larges rues propres et identiques, confondent toutes les villas immenses et sont incapables de retrouver la sortie. Pris au piège dans ce cauchemar doré.
Ils apprendront à leurs dépens que les règles, finalement, sont les mêmes partout : ici aussi, on les juge sur leur simple apparence. Les habitants sont hostiles d'emblée, ou avides de chair fraîche, comme Jade et Nikki, deux adolescentes qui ont envie de s'offrir une aventure "exotique". La confrontation entre les deux mondes est savoureuse et intelligente. Larry Clark met en parallèle deux ghettos pareillement perclus de violence plus ou moins rentrée et de bêtise crasse, qui pourtant ne se rejoignent jamais. Lorsque Nikki interroge Kiko sur sa vie, elle s'intéresse sincèrement à lui, mais n'a pas les clefs pour le comprendre. Elle ne peut qu'ouvrir grands les yeux en répétant les fins de phrases du jeune homme, effarée. Le monde de South central lui est aussi étranger que celui de la planète Mars.
Sans angélisme ni complaisance, Larry Clark remet l'Amérique en perspective. D'un côté les faits divers, la misère sociale et la violence gratuite, de l'autre la volonté de vivre et l'insouciance de la jeunesse. La réalité, montre-t-il, a ces deux visages, indissociables l'un de l'autre. Son film dénonce l'intolérance et les préjugés, mais aussi la ghettoisation grandissante du pays, qui enferme chaque communauté dans une sphère étanche d'où il ne peut et ne doit sortir. Pourtant, l'espoir domine en la personne de Jonathan, Kiko, Milton et les autres. Pour eux, la route continue, coûte que coûte. Une telle rage de vivre impose le respect. MpM
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