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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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The Cider House Rules (L'oeuvre de Dieu, la part du Diable)
USA / 1999
08.03.00
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MANGEZ DES POMMES!
"- Bonne nuit Monarques du Maine, Princes de Nouvelle Angleterre!"
Aucun film ne rendra donc jamais la richesse linguistique, l'humour amer et le dépayement humain d'un livre de John Irving. Pas même un film adapté de l'un de ses romans, et scénarisé par l'auteur lui-même.
Cela est dû sans doute au traitement cinématographique trop conventionnel, à cette absence d'audace visuelle. Seules les pommes - qu'on apprend à cueillir - sont crues. Les avortements - dont on n'apprend pas grand chose - sont plus pudiques. Or, Irving, c'est grand, provocateur, choquant, direct, parfois vulgaire, osé, immoral, humaniste, poétique, sexuello-scatologique... Bref, ça devrait inspirer des films fous, des épopées humaines...
The Cider House Rules est pourtant le meilleur film basé sur un livre écrit par le Maître (qui fait un caméo en chef de gare). L'histoire se laisse suivre. Les personnages sont attachants. Cependant, il est massacré tout autant (la partie détaillée sur la seconde guerre mondiale est inexistante). La télévision serait peut-être plus fidèle, avec son format séries à épisodes, que le cinéma. On comprend que le cinéaste ait été attiré par ces familles bancales, ces malades, ces traumatisés, ces orphelins, ces noirs (nous sommes en 43-45, la discrémination existait encore), et même cet handicapé de guerre... Il y a du Gilbert Grape. Un zest de folie a trop anesthésié à l'éther ce film, hélas.
Heureusement les interprètes ne déçoivent pas. Maguire trimballe sa naïveté virginale, comme Caine transpire une paternité involontaire lourde à porter. L'un ne veut pas de responsabilités quand l'autre supporte tous les malheurs du monde. Banale tranche de vie, l'histoire du film est sans grands événements lyriques : juste des des drames du temps et des tragédies personnelles. Mais le script, grâce à des personnages intéressants, nous happe dans ce conte de faits.
On est en plein dans le dessin animé "Candy" avec son orphelinat, sa découverte du monde, et son retour au bercail. L'Oeuvre de Dieu, la part du Diable n'a pourtant rien de manichéen si ce n'est sa dualité. Le véritable intérêt de ce film, ou du livre (à lire absolument), c'est d'accepter le dieu et le diable qui sont en nous.
Avortement, meurtre, inceste, abandon d'enfants, adultère, ... tout y passe. Pourtant l'Oeuvre de Dieu c'est aussi mentir pour le bien de la communauté, assumer ses responsabilités, travailler et vivre avec des noirs, c'est la force de l'apprentissage (supérieure à un diplôme-bout de papier) ou encore l'amour avec un grand A sans s'attacher aux liens du sang... Clairement, toute morale a ses doutes, toutes valeurs fait écho à un vécu. Aucune règle finalement n'a de sens si elles ne sont pas rédigées par ceux qui les vivront. Si les films ont moins de goût que les livres, le message profondément humaniste est à méditer. Que ce soit exister parce que la vie est belle ou avoir le choix parce que nous sommes libres, The Cider House Rules apporte surtout une seule réponse : il faut aimer la famille qu'on se créé. En acceptant les erreurs de chacun.
Un peu comme un film trop sage, trahissant son matériau de base, mais humainement beau. vincy
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