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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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La colline a des yeux (The Hills Have Eyes)
USA / 2006
21.06.06
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ATOMIC CIRCUS
Personne ne pourra voir cette putain de fumée dans ce putain de désert..."
De la récente vague immigrante de jeunes réalisateurs français passés à l’Ouest – Emilio-Siri, Kassowitz, Gans - on retiendra vraisemblablement Alexandre Aja comme le plus à même de poursuivre l’aventure. On saluera dans un premier temps la grande humilité avec laquelle il a abordé sa matière première, polissant le scénario original de 1977 plus qu’il ne le réécrit, à l’inverse des récents remakes de « Massacre à la Tronçonneuse » ou de « Zombie ». A la mise en scène clinquante et revendicative de ces derniers, il oppose une réalisation, certes organique, mais jamais gratuite, économisant l’effet pour mieux le rendre efficace au moment opportun. Faire surgir l’angoisse en pleine lumière est un contre-pied au genre, un défit hitchockien qu’ Aja emporte honorablement. Non satisfait de corriger les erreurs de goût du film original, Aja en prolonge le discours, définitivement plus acide, avec un final inédit et sans nul doute la partie la plus réussie du film. Résolument politiques, parfois d’un anti-américanisme naïf mais touchant, Aja et Levasseur abordent de front l’origine de la famille cannibale par le biais des essais nucléaires ayant secoués le désert du Nouveau-Mexique et l’abandon des Etats-Unis de la chair qui ne lui est plus – voire pas du tout – utile. Ils y projettent tout un pan des laissés pour compte de l’histoire américaine, celui des ghettos de Los Angeles comme des vétérans de guerre, des homeless ou des corps perdus des revirements économiques. A la recherche de son nourrisson capturé en guise de Thanksgiving, le personnage du gendre découvre un village test dans lequel l’armée a reconstitué « l’American Way of Life » pour y mesurer les retombées radioactives. Des mannequins semblant surgir directement de publicités pour Coca-Cola et autre beurre de cacahouètes font office de populace quasi aryenne, là même où la mutation a déjà commencé, s’octroyant ce décor comme s’il lui était légitime. En affrontant ses démons, l’homme, se revendiquant démocrate, va devoir, à l’inverse d’un chemin de croix, outrepasser unes à unes les valeurs qu’il s’est fondé, qui l’ont fondé, pour rejoindre son stade primitif. Le prix à payer pour sa survie dépend de la part d’humanité qu’il est prêt à perdre, jusqu’à devenir pire que ce qu’il considère comme inhumain. Ou lorsque la proie doit devenir chasseur, à l’instar de Schwarzennegger dans « Predator »…
Au demeurant, reste à se convaincre que le film fasse vraiment peur. Oui et non. Si le métrage contient son lot de moments chocs, que son ambiance est résolument tendue et que le gore y coule à flot, le spectacle tient plus du cirque des horreurs et de ses dégoûts que de la peur instinctive. C’est ici que le problème de ces relectures d’œuvres fauchées et sans complexe à travers le prisme de la néo-technologie se pose à nouveau. La quête éperdue du viscéral présente dans la note d’intention a tendance à s’émousser dès lors que la pellicule 16 mm des années 70 laisse place au 35 et les exceptionnelles sensibilités argentiques aujourd’hui proposées par Kodack et Fuji. Le voile de crasse des survivals de Hooper, Craven ou Romero et leur picturalité poisseuse propre au genre participait à l’aspect « pris sur le vif » et en multipliait le malaise. Désormais, le clean et le clinique l’emportent au détriment de la crasse, et le spectateur, installé dans son fauteuil, n’a plus de doute quant à sa position confortable.
Le puriste n’aura dés lors plus qu’à s’en consoler, ou saisir sa super 8 pour filmer une chute de bébé dans la coutellerie pour l’envoyer à vidéo-gag… Arnaud
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