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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Tournage dans un jardin anglais (A Cock and Bull Story) (La vie invraisemblable de Tristram Shandy)
Royaume Uni / 2006
05.07.06
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HISTORICAL HYSTERICAL
"- Il voulait que ce soit réaliste avec un mec parlant à une caméra dans un utérus."
Le film débute avec un premier rôle (Steve Coogan aussi exaspérant qu'excellent dans le registre de la star imbue d'elle-même) qui met un faux nez (double sens évident) discutant avec un second rôle qui se croit plutôt un deuxième premier rôle. Ils discutent des vraies mauvaises dents du second, jaunâtres, entre le coquille d'oeuf et la couleur du plafond d'un pub. Cette "tchatche" dans les loges où les comédiens se préparent comme un sportif se chauffe va lancer un film qui n'a ni queue ni tête. Dans cette adaptation d'un roman culte du XVIIIe siècle, on y cite Groucho Marx et on y analyse le Lancelot de Bresson. Il y a quelque chose d'Allenien dans ces digressions et apartés sur cette culture "pop" (mix de classique et de moderne) qui nourrit notre cerveau. Mélange de musique à la Barry Lindon et de farce à la Fellini. L'ensemble paraît burlesque.
Car ce Tristam n'a pas la triste âme. "J'ai signé pour une comédie pas pour le grand guignol!" De fait Winterbottom, une fois n'est pas coutume, signe une comédie et surtout un film pas inintéressant. Dans le genre adaptation impossible, il a préfère suivre les traces de la distanciation par rapport à l'oeuvre (Pourquoi (pas) le Brésil? en est une autre illustration). Il démontre ainsi que les choses n'ont pas tant changé puisque les gens sont de la même trempe siècles après siècles. Rien ne diffère le noble Tristam de l'acteur qui l'incarne. Les femmes accouchent et les hommes parlent de guerre et de couilles. On est toujours jugé par son degré de pouvoir, sa fortune ou son talent. Ou sa virilité (entre impuissance chronique et stérilité rejetée). Et même si nous planifions tout, tout nous échappe. Le sujet fusionne le fond et la forme, parfois maladroitement, notamment quand l'exercice ne devient qu'un style.
Ces anecdotiques choix de la vie et leurs redoutable s conséquences nous conduisent au coeur de l'oeuvre littéraire comme de celle-là, cinématographique : la vie est un chaos désordonné, comme le tournage d'un film. Nous essayons en vain d'articuler les éléments avec cohérence. Au mieux il s'agit de flamboyants instants... Mise en abîme de son métier comme de l'existence, Winterbottom réalise un simulacre de cinéma, cruel et spirituel, caustique et cynique.
Parfois il se plante (en souhaitant rendre sympathique sa star qui admire Roger Moore et n'a même pas lu le roman pour comprendre son personnage). Inutile et raté lorsqu'on voit Coogan se transformer soudainement en papa idéal, alors que l'être est presque méprisable.
Les allers retours entre le fictif et le réel sont bien mieux maîtrisés, à la manière d'un bon Blier. Il sait nous faire voyager avec rythme et habileté entre les coulisses d'un pseudo film et le réel qui n'en est pas un. En travestissant ainsi le monde d'aujourd'hui sous les allures d'un documentaire inventé et en essayant de transposer un imaginaire (dé)passé, le cinéaste tient son credo : la fidélité à l'Histoire et aux histoires n'a aucune importance. Peu importe l'offense tant que tout sonne juste, universel, atemporel.
Tournage dans un jardin anglais n'est jamais que le regard amusé que l'on porte sur nos vies (avec ce secret espoir que les personnages fictifs et les stars sont éternels). Une dérision qui pourrait être ridicule mais comme on le sait, le ridicule et le cinéma, ça ne tue pas.
vincy
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