Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Vagues invisibles (Invisible waves)


Thaïlande / 2006

12.07.2006
 



FUITE EN AVANT





"Je fais ce travail pour expier mes pêchés"

C'est l'histoire d'un homme qui vient de commettre un crime. En apparence, il est serein, méthodique, organisé. Il suit à la lettre les instructions de son employeur et se prépare à changer de vie sans grande émotion. Pas le genre d'homme à manifester ses états d'âme... Mais peu à peu, tout se détraque dans son sillage : un lit pliant qui refuse de rester ouvert, une porte qui se coince, un interrupteur qui ne fonctionne plus… Comme si les objets protestaient devant tant de froideur et de monstruosité, bien décidés à le mettre face à ses responsabilités.

La traversée en bateau se transforme ainsi en plongée cauchemardesque dans un univers froid et grisâtre où les couloirs labyrinthiques et déserts ne semblent guère plus rassurants que la minuscule cabine envahie par un bruit infernal. Les rares personnes que Kyoji rencontrent semblent tout droit sorti d'un roman kafkaïen : stewart buté et procédurier, barman mystique et ambigu, ancien camarade d'école envahissant… Même Noi, la jeune femme avec laquelle il sympathise, a quelque chose d'irréel. "On dirait que vous avez vu un fantôme", lui dit-elle la première fois qu'ils se croisent.

En guise de psychologie, Pen-ek Ratanaruang se contente de projeter les sentiments intimes de son personnage sur les objets et les gens qui l'entourent, montrant ainsi comment la culpabilité peut ronger un homme jusqu'à modifier sa perception de toutes choses et transformer lentement sa vie en fuite en avant dénuée du moindre sens. Le bateau devient alors une métaphore transparente de l'intériorité émotionnelle du héros, divisé entre un remords insondable et l'horreur du châtiment. Tout ce qui arrive à Kyoji par la suite traduit son évolution intérieure : d'abord le déni de toute responsabilité, puis la soif de vengeance et enfin le renoncement et l'acceptation de son destin.

C'est là, malheureusement, que péche le film. Car si la séquence du bateau concentre absurdité hilarante et claustrophobie paranoïaque et nauséeuse, la suite du film, elle, s'enlise dans une débauche de bons sentiments. Refus de toute immoralité, sacrifice gratuit, nécessité du châtiment… On a du mal à suivre le revirement soudain de Kyoji qui passe en quelques secondes de revenant assoifé de vengeance à sage illuminé par la perspective de trouver la paix intérieure. Sorti du cocon protecteur du huis clos, Pen-ek Ratanaruang peine à rester cohérent. Il laisse son récit s'emballer et partir dans tous les sens (l'agression commanditée, le revirement soudain du contact, les retrouvailles avec Noi, les divers retournements de situation…) sans que ces scènes apportent la moindre pierre à l'édifice. Sur le sujet de la culpabilité, la démonstration brillante de la croisière suffisait. En voulant absolument finir sur une note morale, le réalisateur abandonne toute la subtilité de sa première partie au profit d'un ton grotesque et caricatural dont la conversation finale entre Kyoji et son bourreau est l'apogée. Comme disait l'autre… tout ça pour ça ?!
 
MpM

 
 
 
 

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