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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Ils
France / 2006
19.07.06
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VOYAGE AU BOUT DE LA NUIT
« - Réveille toi. J’ai entendu du bruit en bas... »
La forêt, l’isolement, et la nuit. C’est à partir de ces peurs primales que les jeunes réalisateurs Xavier Palud et David Moreau décident de bâtir l’atmosphère de leur film. L’histoire est simple, le traitement également. Ils se définit comme une expérience minimaliste : avec peu de moyens, une caméra DV et deux personnages, les réalisateurs font le pari de nous tenir en haleine sur toute la durée de leur film (78 minutes chrono). Ceci dès l’introduction où les ténèbres, la pluie, le silence et le vide sont autant d’ingrédients pour nous inquiéter et faire perdre pied.
Construit en deux parties, Ils raconte l’emménagement d’un jeune couple dans une région boisée et désertique. D’abord propice à la parlotte et à la joie, l’aventure prend rapidement des teintes de silence et de cauchemar lorsque des intrus à l’identité mystérieuse surgissent en pleine nuit. A l’intérieur de cette maison devenue hantée, Palud et Moreau parviennent à créer une tension incroyable: en épousant le point de vue du couple, le spectateur, caché, observe avec lui et se sent encerclé. Les ennemis restent invisibles et d’autant plus redoutables: leur menace fonctionne par le vacarme. L’atmosphère sonore se trouve très travaillée, remplis de bruits divers mélangeants sifflets, bruits étranges et indéfinissables, dans le but de créer une ambiance des plus glaçantes. Une fois la lumière coupée, l’intimité et la sûreté de ce domicile se transforment en un espèce de viol chaotique mêlant à la fois oppression, affolement, et insécurité. Lorsqu’un personnage quitte une pièce barricadée, c’est sa vie qu’il met en jeu.
On glisse alors de l’intérieur de la maison vers l’extérieur pour rejoindre la forêt, le domaine de nos agresseurs. À partir de là, il n’y a plus d’échappatoire possible, les protagonistes courent dans les ténèbres comme aveuglement à leur perte. Mention spéciale à la réalisation : le mystère sur l’identité des tueurs comme de leur motif reste toujours inviolé. Mais leur présence est à chaque fois souligné, il est impossible de se sentir tranquille : on entend leurs pas, on observe la lumière de leurs lampes, on remarque leur silhouette… Le fond épouse merveilleusement la forme : le format DV donne un côté réaliste qui colle parfaitement au sujet (inspiré d’une histoire vraie). La photographie très travaillé et stylisée donne au film une image proche du noir et blanc, renforçant le côté lugubre de son histoire. L’originalité rejoint l’horrifique dans un dernier retour au renfermé, tel un piège, avec la traversée de catacombes / égouts abandonnés : on ne se sentira jamais aussi seuls et vulnérables.
Enfin, le réalisateur ferme son film dans un dernier plan révélateur d’une beauté et d’une cruauté à nous donner des frissons. Toute la dureté de Ils vient de ce que le malheur se déroule dans l’ombre, caché au yeux du jour, à deux pas du monde et d’une aide extérieure.
Ils est un thriller horrifique, angoissant et superbement mené qui vaut le coup d'oeil, même si on les cache avec ses mains. ninteen
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