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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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La chevauchée fantastique (Stagecoach)
USA / 1939
02.03.1939 (USA)
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ROSSERIES DANS LE CAROSSE
"- S'il y a bien une chose que je n'aime pas, c'est escorté une diligence à travers le pays Apache!"
John Ford, enfanté tout comme Raoul Walsh par David Wark Griffith (l’un des pionniers du 7ème art à qui l’on doit Naissance d’une nation et Intolérance, entre autres), est considéré par beaucoup comme le père du cinéma américain. Un réalisateur qui, à l’inverse d Raoul Walsh, a parfaitement su s’intégrer au système d’hollywoodien et garder une grande maîtrise dans ses œuvres. Il faut dire que Ford n’avait pas un caractère facile et son exigence en faisant pâlir plus d’un. Il a forgé sa réputation grâce au genre le plus américain qui soit : le western. Et, avec La Chevauchée fantastique (réalisé en 1939), John Ford va redonner ses lettres de noblesse au genre, en déclin durant les années 30, pourtant réputé âge d'ôr.
Avec La Chevauchée fantastique, John Ford pose véritablement ses thèmes qu’il développera par la suite tout au long de sa carrière : le romantisme, l’épique, les grands espaces (Monument valley est un personnage en soi). Mais surtout, comme ultérieurement un Eastwood, il dessine le portrait de l’Amérique. Ce patriotisme, cette intimité avec les valeurs qui forgent cette nation se mélangent à travers des personnages au caractère trempé, typique, qu'ils soeint égarés dans le désert (comme ici) ou à l'étranger (7 Women, Mogambo, The Quiet Man).
Le film commence de la plus habile des façons, par une séquence qui mériterait d’être étudiée dans toutes les écoles du cinéma tant elle est maîtrisée. Grâce à sa parfaite maîtrise du temps cinématographique et des techniques de montage, Ford va présenter tous ses personnages principaux de façon déguisée et anodine. Une diligence arrive en ville et y dépose une femme mariée à un officier de l’armée. Elle doit le rejoindre dans une bourgade. La jeune femme est accueillie par des amis qui l’emmènent dans un salon de thé. Elle y croise un odieux personnage campé par le grand John Carradine. La caméra de Ford suit un personnage qui rentre dans un lieux précis : bar, banque, bureau du shérif, etc… et qui rencontre un autre personnage. A ce moment là, le spectateur s’accroche à l’autre personnage. A travers ce procédé, Ford dépeint sobrement une ville typique de l’Ouest américain au XIXème siècle tout en présentant également les personnages principaux, qui seront tous réunis dans la fameuse diligence, au beau milieu des grandes plaines, poursuivis par de farouches indiens. On aimerait voir des démarrages tout aussi palpitants et efficaces.
Bien entendu, ces personnages forment à eux tous les différentes facettes de la société américaine, plus ou moins grossièrement. Le docteur alcoolique (symbole d’un certain déclin), la femme qui appartient à un certain rang social, la putain, l’homme faible et maigrelet, le tueur froid et dandy, le banquier véreux. Bref, John Ford s’amuse à faire ressortir de chacun de ses protagonistes les travers, les vices, car chacun se prétend mieux que l’autre ce qui a quoi Ford répond : "On voit la paille dans l’œil de l’autre, mais pas la poutre qui est dans le nôtre."
C’est justement ce trajet semé de péripéties qui va entraîner les frictions : ça se percute, s’effrite jusqu’à cohabiter "ensemble" dans une certaine forme de paix et de respect des uns et des autres. Y a pire morale. Ces règles fondamentales à la vie en communauté vont être inculquées par le dernier personnage que John Ford présente : Ringo interprété par un John Wayne égal à lui-même. Il était jeune, imposant, pas encore une star...
Pourtant, John Wayne n’est rien d'autre que le héros fordien par excellence, l’homme droit et juste, qui ne franchit le seuil de la loi que pour réparer les affronts que cette dernière tolère. C’est le défenseur de la veuve et l’orphelin. Sa franchise, son autorité et sa droiture vont encadrer les autres passagers de la diligence et les unir. Il est l'autorité, pas le plus riche, pas le plus malin, juste celui guidé par ce bon sens qui plaît tant à l'occidental moyen. Voilà pourquoi les spectateurs se sont identifiés à lui. Ford en a fait le héros modeste idéal.
John Ford a toujours déclaré qu’il n’y avait rien de plus beaux qu’un homme. D’ailleurs, un jour où il devait tourner des scènes de poursuites à cheval pour l’un de ses westerns, le mauvais temps l’en empêcha. Un technicien lui dit alors "Mais Monsieur que va-t-on donc pouvoir filmer alors ?" Ford lui répondit du tac-au-tac "L’homme." John Wayne c'ets une forme de masculinité rassurante et médiane.
Mais ohn Ford était aussi très attaché aux grandes plaines de l’Ouest américain et notamment à Monument Valley, à la frontière de l’Arizona et de l’Utah. Une région complètement délaissée dont Ford saura percevoir les immenses ressources cinétiques. C’est ainsi qu’il y tourne la scène où la diligence est attaquée par les troupes de Jéronimo. Une course folle où la caméra file à la vitesse de l’éclair et où les sabots des chevaux lancés au triple gallot font trembler le sol. Dans cet immense désert, la scène se mue en fresque. John Ford contrôle chaque détail. Il transforme les images fixes, peintures ou photos, en spectacle presque transcendantal, hypnotisant. Après avoir montrer son talent pour filmer l’Jomme, il met en avant son amour pour la Nature. Et si
John Wayne est bel et bien le héros, les Indiens rebroussent chemin devant la horde sauvage qui fonce sur eux au son des trompettes. La cavalerie arrive toujours à temps. Epique en 97 minutes chrono. La chevauchée est en effet fantastique, dramatique, psycholique, mythique.
benjamin
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