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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Corps à corps
France / 2003
23.03.03
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CORPS ET DESACCORDS
Un bon thriller ne doit-il pas faire peur à son réalisateur autant qu’au public ?
En regardant ce film, on a très vite le sentiment d’être embarqué dans une froide machination. On pense au train fantôme des fêtes foraines. Hélas, ces pathétiques attractions ne sont-elles pas invariablement décevantes ? La crainte éventuelle qu’elles procurent s’évapore une fois passée la devanture. C’est tout le principe de l’attraction.
Corps à Corps entasse les images vicieuses, les cicatrices, les salles d’opération, les mimiques psychopathes destinées à heurter l’oeil. Pour autant, on ne touche jamais réellement au malsain, tractés que nous sommes par le personnage propret de Laura.
Le film commence en évacuant assez rapidement la mise en place de l’intrigue. Comme le font les séries américaines, c’est un long flash-back doublé d’un commentaire off de Laura qui nous introduit la situation (elle écrit à une amie). A-t-on raté quelque chose ? Un spectateur qui paie sa place mérite surement mieux qu’un résumé énergique des épisodes précédents. Surtout quand il n’y a pas d’épisode précédent. On est à deux doigts de se sentir exclut du temps filmique, intrus d’un scénario pensé minutieusement et qu’on s’empresse de nous montrer. Plus tard, on retrouve cette impression à chaque fois que Marco utilise le langage des signes. On sent que le dialoguiste s’est donné tout le mal du monde à exprimer, à l’intention du spectateur, ce que Marco communique à sa femme, sourde. Cette traduction orale, relativement incongrue, génère quelques répliques pour le moins explicatives.
Plus largement, Corps à Corps est la manifestation d’un cinéma du déjà-vu. Un sitcom, c’est toujours le même épisode qui tourne en rond, semaine après semaine. Une forme stricte qui permet d’assurer la pertinence d’un personnage qui se construit, lentement, à travers sa capacité à répondre à une situation donnée.
Mois après mois, ce sont des thrillers sensiblement identiques qui tentent de nous fasciner. Comme pour la télévision, le personnage d’un genre donné se construit film après film. Dans Corps à Corps, ce méta-personnage persécuté s’est un peu appauvri, tant il est plat et naïf. Son existence est déconnectée de la réalité, constituée exclusivement d’attitudes cinématographiques et passe à travers l’Histoire du genre thriller avec détachement. En l’occurrence, c’est l’histoire du film, un peu égoïste, qui ne s’occupe pas des personnage et se contente de les utiliser. On a le sentiment que Laura et Marco ont été plaqués tardivement sur une structure scénaristique composée de vecteurs, d’adjuvants, etc. Ils souffrent, en conséquence, d’une personnalité assez binaire.
Malgré tout, passé le premier quart d’heure introductif, le spectateur pourra se laisser aller à une molle envie d’en savoir plus. Il jouera à deviner la suite, à comprendre ce qui se cache sous les cheveux du crapuleux Marco. C’est une des réussites du film.
Mais revenons, un instant, sur ce début en flash-back qui participe considérablement à la perte du film. Il provoque un détachement du spectateur que l’histoire met du temps à récupérer. Ce désintéressement s’insinue tandis que les images persistent à faire double emploi avec la voix off de Laura, racontant son histoire. Pour éviter le pléonasme pure (voir le langage des signe de Torreton, évoqué plus haut), le style est atteint d’envolées lyriques qui peuvent, en certains cas, tourner à la logorrhée poético-nunuche. Le ton du film retrouve, par la suite, cet aspect désagréable, non plus par les dialogues mais par une imagerie onirique de publicité pour parfum. Cet artifice perce particulièrement dans certaines séquences tape à l’oeil, sensées être expressives : le commissariat, par exemple, stylisé comme un garage de banlieue, oppresse (c’est le but) ou agace (c’est pas le but).
Enfin, pour faire gagner le film en profondeur, on l’affuble d’un fond intellectualisant qui a l’effet contraire. En effet, quoi de plus superficiel que des références gratuites à Lacan lorsque la psychologie des personnages frôle parfois l’invraisemblable. Le thème de la castration est épuisé jusque par le nom du chien - kiki - dont la disparition (moteur de tension vu et revu) double grossièrement le sens des craintes de l’enfant (Jeannot, interprété par le jeune Clément Brilland).
En fin de comptes,Corps à Corps est un film regardable mais qui souffre d’un manque d’humilité, défaut commun à beaucoup de premiers films.
axel
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