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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Darkness
Espagne / 2002
18.06.03
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CRAYONS DE NOIRCEUR
"- Ca n'arrivera jamais, je l'ai lu dans le livre ..."
A défaut d’être original, l’ami Balaquero aura le mérite avec ce nouvel opus surnaturel de faire preuve d’une belle efficacité et surtout d’une belle inspiration dans ses choix artistiques et narratifs. Au risque de se répéter, les bons sujets novateurs de films se font de plus en plus rares en général et les occasions de faire sursauter un spectateur qui en a déjà vu des vertes et des pas mûres… une réelle gageure. Les peurs ne se renouvellent pas, elles sont immuables et indissociables de notre nature. Cela explique que les ficelles du genre puissent à la longue paraître trop identifiables. Le cinéaste utilise donc inévitablement la familière peur enfantine de l’obscurité pour faire germer la tige de son drame. Peu importe les éléments du mécano, le génie tient à la manière des les agencer et l’homme se montre particulièrement doué dans cet exercice.
Certes, il sera difficile de ne pas voir surgir d’illustres références dans les divers rouages de cette sombre histoire. La maison, théâtre de l’étrange furtif renverra au récent The Others, le père possédé aux agissements incontrôlables ne sera pas sans évoquer le teigneux et cultissime Jack "Torrance" Nicholson de The Shining, mais peu importe. Balaguero a le bon goût de savoir choisir son héritage. Ses compétences ne s’arrêtent pas là et ses aptitudes à développer une réalisation maîtrisée qui engendre une adhésion louable vis-à-vis du propos exposé sort son film du commun des productions faites pour frémir. L’atmosphère de Darkness, composée de clairs obscurs est un plaisir pour les yeux et maintient le spectateur en permanence sur le fil qui sépare le réel de l’imaginaire à vocation déstabilisante. L’audace peut même parfois poindre son nez, à témoin ce passage dramatique où le fils est témoin de l’attaque cardiaque du père en plein embouteillage. Montée en parallèle avec une autre séquence où l'on voit Anna Paquin effectuer un crowl en piscine, la tension croissante qui se dégage de la scène remplit parfaitement les multiples desseins du cinéaste qui sait prendre son audience aux tripes sans oublier d’étoffer les liens qui définissent ses protagonistes.
Car il restera que les atouts majeurs, propres à donner une leçon sur la méthode idéale pour terroriser décemment une salle se trouvent réunis dans cette apparemment modeste oeuvrette. Jamais Balaguero ne cède au grandiloquent putassier ni à l’exposition outrancière de ses sources d’effroi. La suggestion demeure reine jusqu’à preuve de contraire (la matérialisation trop évidente du mal par des éléments chimériques du décors sont d’ailleurs en tout point décevants dans le film) et tout effet pixélisé de dernière génération ne sera le démentir. L’autre aspect définitif réside dans l’interprétation. Le soin qu’apporte chaque acteur pour étoffer la psychologie de son personnage respectif confère un intérêt à l’ensemble qui dépasse le pop corn movie peuplé de blondes en perdition et de surfeurs abrutis.
Darkness méritera donc d’être accueilli avec enthousiasme par quiconque souhaite se procurer une bonne dose d’adrénalyne sans avoir à se confronter à un navet bas de gamme. Son caractère étrangement international dans la plastique (difficile de prétendre que l’action se situe à Barcelone tant les ustensiles et les lieux semblent conformes à toute production américaine) ne tend pas à promotionner une spécificité espagnole mais plus un accès à un esperanto commercial. Il n'empêche que le talent de son réalisateur permet au moins d’écarter l’entreprise de l’insipidité dans le reste de son traitement. Pas le moindre mal. petsss
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