Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Katyn


Pologne / 2007

01.04.2009
 



L'HOMME DE CHAIR





"- Ce que vous devez, commandant, c’est dire toute la vérité !
- Oui, je peux aussi bien me tirer une balle dans la tête...
"

Avec cette fresque historique aux résonnances intimes, Andrzej Wajda ne cherche pas tant à revenir sur des faits désormais avérés qu’à étudier l’influence et les conséquences du tragique épisode de Katyn sur les populations qu’il a touchées. Sa thèse, c’est celle d’une Pologne martyr, prise en tenailles entre deux armées destructrices qu’il renvoie dos à dos, et qui ont durablement privé le pays d’avenir et d’espoir.

Pour cela, il a choisi une construction classique en plusieurs actes : celui du drame (l’invasion et les arrestations), celui de l’attente (jusqu’à la fin de la guerre) et celui du mensonge (après la "libération", lorsque les Soviétiques rejettent contre toute vraisemblance la responsabilité du massacre de Katyn sur l’armée allemande). C’est cette dernière partie qui est la plus symbolique, dressant un parallèle entre l’héroïne tragique Antigone et ces femmes contraintes d’accueillir en libérateurs les assassins de leurs pères, époux et frères. Le monologue d’Antigone récité par une comédienne fraîchement rentrée d’un camp de concentration renvoie ainsi aux minuscules actes de résistance commis par les personnages, comme arracher une affiche ou refuser de graver la date officielle de Katyn sur une pierre tombale, et dont les conséquences sont néanmoins terribles.

Pour exprimer la difficulté de vivre avec ce mensonge d’état, Wajda met également en scène deux sœurs ayant choisi chacune une voie différente : pour la première, seules la vérité et la justice comptent et elle est donc prête à risquer sa vie pour que les véritables assassins de son frère soient désignés et punis. Pour l’autre au contraire, il faut aller de l’avant et se battre pour un avenir meilleur en laissant de côté le passé : elle refuse donc de contester le mensonge soviétique et accepte de travailler avec les représentants de l’URSS. Bien sûr, le réalisateur ne tranche pas entre ces deux positions, utilisant ces deux visions diamétralement opposées pour décrire et expliquer l’impossible situation du peuple polonais de l’époque, aux prises avec un dilemme insondable.

Malgré la fonction purement archétypale de la plupart des personnages (l’officier martyr, l’officier opportuniste, l’épouse qui garde espoir, la sœur qui réclame vengeance…), l’intrigue complexe et multiple va au-delà de la simple chronique historique, pour s’élever vers une portée plus universelle. Toutefois, on sent qu’ Andrzej Wajda a eu du mal à s’extraire de son propre passé et à prendre du recul par rapport à son récit. Cette implication affective ôte un peu de force dramatique à sa démonstration, et surtout vient parasiter une mise en scène qui n’avait pas besoin d’être si appuyée : musique funèbre, sensationnalisme (le corps du Christ caché sous un manteau de soldat, comme s’il s’agissait d’un cadavre), ampleur lyrique dans les mouvements de caméra (notamment lors du discours de Noël dans les baraquements), montage parallèle artificiel du mari et de la femme en train de penser l’un à l’autre… sans oublier le flashback final qui décrit en détails la manière dont se sont déroulés les massacres. Du sang, des cadavres mutilés et des fosses communes débordant de corps, Wajda n’a rien voulu nous épargner. Résultat, c’est lui qui se laisse déborder par l’émotion, quand le spectateur n’y voit finalement qu’une tentative (bien inutile) de lui faire prendre conscience d’une horreur que le reste du film suffisait parfaitement à rendre palpable.
 
MpM

 
 
 
 

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