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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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La rafle
France / 2010
10.03.2010
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CECI N’EST PAS UN POINT DE DETAIL
«- C’est plus facile avec les Français qu’avec le Duce ou Franco. »
Il y a de tout dans cette Rafle. Le moins bon et l’émotion, les maladresses et l’utile, le spectaculaire et la facilité.
Transposition d’une facette sombre de l’Histoire de France, on pourra entendre « encore un énième film sur la déportation des Juifs ». retenons un commentaire d’un jeune de 20 ans, caleçon apparemment et jean baggy à la fin de la projection « c’était vraiment des batards ces Nazis ». Tout est dit. De l’utilité de le montrer, de le redire, de le faire voir.
Cinématographiquement c’est une autre histoire. La Rafle, aussi passionnant soit-il, est assez fade visuellement. La mise en scène ne transcende que très rarement son propos. Les négociations entre le Régime de Vichy et les représentants du IIIe Reich sont édifiantes et captivantes. Le portrait d’Hitler en résidence d’été, en revanche, nous rappelle les séquences « caustiques » de L’As des As de Gérard Oury. La reconstitution du Vélodrome d’Hiver (rappelons qu’il n’y a aucune image disponible de ce camps de concentration discriminatoire et insalubre au cœur de Paris) est saisissante, inspirée, et n’a rien à voir avec les cartes postales de Montmartre, digne d’Amélie Poulain ou de La Môme, où réside une communauté juive bientôt perscutée. Cette impression de « déjà vu » se renforce avec le camp de Beaune-le-Loiret, où l’on se croit immergé dans La vita è Bella, sans le rire. De même, il est salutaire d’entendre les mots du racisme ordinaire des Français (les juifs désignés comme « indésirables ») et les citations un peu grossière (« vite et bien fait, une nuit par bouillard").
Loin d’être binaire, La Rafle met en avant des résistants non héroïques, des salauds et des antisémites, des putes au grand cœur, des protecteurs, des victimes, des collabos… Pourtant aucune star du casting n’est un « méchant ». Cette commodité affaiblit clairement le film, en forçant sur l’empathie et en simplifiant l’intrigue. Au-delà des hommes, l’image ne manque pas grand chose des complicités de l’époque : RATP, SNCF, Police…
Heureusement, l’aspect pédagogique domine dans cette œuvre dramatique. Il n’est pas étonnant que les principales bouffées d’oxygènes, les respirations du scénario, proviennent des gamins. Malgré la cruauté monstrueuse des faits, ils apportent un souffle de vie dans cet air irrespirable. La « petite évasion » de deux d’entre eux fait même écho à de nombreux films français de ces dernières années (Monsieur Batignole, Un secret…). Jean Réno, Gad Elmaleh, Thierry Frémont ne sont pas mauvais mais n’ont pas le charisme nécessaire pour nous émouvoir et leurs personnages n’inspirent que la bonté. Mélanie Laurent, en martyr sacrificiel, déroule sa maîtrise de « fontaine » lacrymale, sans nous bouleverser, sans doute à cause d’un personnage ouvertement sympathique et sans nuances. Sylvie Testud amène une dose éphémère de tragédie. La véritable révélation c’est Raphaëlle Agogué, sublime et toujours juste.
Tout cela est forcément révoltant. Touchant. Ecoeurant. Larmoyant. La séquence finale est un véritable tire-larmes. L épilogue de ce film populaire est poignant. Sans doute le compromis nécessaire pour remuer nos mémoires, si friables. Avec un bon professeur d’histoire, ce film devrait êre destiné aux colégiens et lycéens. Le cinéphile, lui, restera un peu déçu par ce film prévisible dans la forme, et classique sur le fond.
vincy
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