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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Le monde fantastique d'Oz (Oz the Great and Powerful)
USA / 2013
13.03.2013
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MAGIC KINGDOM
"Je sais faire des épouvantails"
Sam Raimi se métamorphose en maître des illusions. Après l’horreur, le Western, le polar, le sport et les Comics, il s’attaque au mythe Disney. Habilement. A défaut d’être extraordinaire, son voyage est spectaculaire. Là où Alice au pays des merveilles sombrait dans un ennui soporifique, Oz et ses trois sorcières nous enchantent et nous éclatent.
La comparaison avec Alice au pays des merveilles de Burton n’est pas innocente : même producteur, même studio, même recette. Mais Raimi n’a pas abordé le livre de Baum comme Burton a adapté Lewis Caroll à son univers singulier. Sam Raimi a préféré faire une déclaration d’amour à une époque révolue, celle d’Edison et de Méliès, d’Houdini et des artisans « bricoleurs » qui manipulaient la réalité ou la transformaient par la simple magie de la science et du talent humain.
Paradoxalement pour rendre hommage à ces vieux métiers, ancêtres du 7e art, le cinéaste nous offre un déluge d’images de synthèse et d’effets spéciaux numériques. Abondance technologique à la gloire des métiers manuels.
Malin comme un singe (ailé), malicieux comme ses sorcières, Raimi ne cherche pas à surenchérir avec l’impossible, préférant un bon vieux feu d’artifice à une cascade de combats. Le pays d’Oz est un royaume de dessin animé. Rien ne semble réel. Il n’a cependant pas grand chose à voir avec celui du film de la MGM. Dans l’impossibilité d’utiliser les personnages qui accompagnaient Judy Garland, Raimi a préféré les clins d’œil : un lion dans la forêt, un fabriquant d’épouvantail, … Ce n’est pas le seul lien entre les deux œuvres. Le réalisateur choisit ainsi un (long) prologue en noir et blanc et en petit format, comme un film d’antan. Le film prendra sa dimension normale et se colorisera une fois le magicien arrivé au pays des « merveilles ». Traversée du miroir où cet Oz - lâche, égoïste, cupide, menteur, fabulateur, pingre, un peu minable, mais bon (c’est la morale de l’histoire : la bonté est supérieure à la grandeur) – se mue en Paris devant choisir qui est la plus belle parmi les trois grâces - trois sorcières, dames de pique, de trèfle et de carreau. Même la blonde, forcément la plus douce et la plus raisonnée, n’est pas tout le temps gentille. Avec leurs humeurs variantes, elles ont un air de Sorcières d’Eastwick, entre sororité et rivalité. Si James Franco est charmant en charlatan, les trois comédiennes – Mila Kunis, Rachel Weisz et Michelle Williams – semblent beaucoup s’amuser à jouer avec les clichés (jusqu’au rire démoniaque d’une méchante). Comme le cinéaste joue avec son talent à effrayer avec un rien.
Le monde fantastique d’Oz se lira naïvement – un homme découvre sa capacité à être utile et bon – grâce à son joli récit, très formaté mais efficace ; on se laisse volontiers prendre la main pour voyager dans ce pays imaginaire. Fastueux, presque opulent, le film (qui, en 3D, ajoute quelques piquants effets), très divertissant, ravira les romantiques et nostalgiques.
Pourtant, la magie d’Oz est ailleurs : Sam Raimi a utilisé toutes les technologies possibles pour mélanger l’onirisme aux effets visuels, le show au conte de fée. Sans cynisme et avec un seul objectif : faire plaisir. En réalisant une œuvre si grand public, s’adressant même aux enfants, le cinéaste signifie que la magie de films comme Le Magicien d’Oz ou les vieux Disney est plus forte que tout, plus forte que la plus revêche des sorcières sans cœur, et même que les films d’horreur, de cow-boys, ou de super-héros.
Ce Monde fantastique est bien le sien : le héros se cache derrière un écran de fumée (comme Peter Parker sous son masque) mais la jolie fille, qui sait tout de lui, a le droit à son baiser, et accepte cette situation baroque où ils ne peuvent pas vivre heureux au grand jour… Ne parlons pas des enfants, une poupée en porcelaine suffira.
vincy
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